Magazine Asie

Sankin-kôtai, de Tokyo à Versailles

Par Chroma @Chroma_France
La féodalité japonaise évolue sous les Tokugawa, après les guerres civiles. De nombreuses mesures sont prises pour affaiblir les petits roitelets locaux et les empêcher de se faire la guerre. L'une d'elle en 1635 sera la mise au point d'un système de résidence alternée (sankin-kôtai) qui oblige les daimyos à résider dans la nouvelle capitale, Edo, la future Tokyo. Chaque daimyo est contraint de passer plusieurs mois dans la capitale, les femmes et enfants toute l'année, quasiment des otages de la politique. Indirectement cette mesure a un autre effet, les seigneurs provinciaux devant entretenir deux résidences et participer de force à l'entretien public à Edo, elle ne leur permet plus d'entretenir une armée permanente. Plus ils sont éloignés, plus ils doivent consacrer de frais au voyage, moins ils vont pouvoir être déloyaux à leur shôgun ou se livrer à des vendettas contre leurs voisins. Pratiquement à la même époque, en 1682 sous Henri III, l'entourage du roi de France, autrement dit la Cour, qui se définit par les princes de sang et alliés et les dignitaires du régime avec leurs familles, se fixe hors de Paris à Versailles. Quelques années plus tard, profondément marqué par la rébellion nobiliaire de la Fronde, Louis XIV va faire pareil qu'au Japon, satellisant la noblesse autour de lui. Les Grands sont déracinés de leur clientèle locale et sous-contrôle, 1° de l'étiquette et du protocole réglés par le frère du roi, 2° dépendant des faveurs royales qui distinguent chacun selon le mérite. Financièrement ils deviennent tous dépendants du Roi-Soleil qui en profite pour établir une monarchie absolue. A la fin du règne de Louis XIV ils seront 10.000 à Versailles, à la veille de la Révolution 4000 familles bénéficieront des honneurs de la Cour, sans pour autant y résider tous.  Sankin-kôtai, de Tokyo à Versailles Dans les deux cas cette résidence forcée agglutinant l'élite du temps n'a pas seulement été un réducteur des violences politiques mais génère développement économique et culturel, devenant par la force des choses un lieu où convergent artisans du luxe ou acteurs du kabuki au Japon ou du théâtre de divertissement en France. La Cour française devient obsolète avec Louis XVI qui n'a pas les qualités de ses ascendants pour contrôler les factions, le sankin-tôkai survivra au Japon jusqu'à la fin du shôgunat en 1868.      

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Chroma 2526 partages Voir son profil
Voir son blog

Magazines