François LAUR (France).

Par Ananda

RÉMISSIONS


La grande voilure des platanes qu’embrase aux faîtes un rayon final, et l’ombre qui frémit avant d’être nuit claire monte de la vallée en subtile poudre bleue, le canal en frisons de métal aux digues tavelées d’un bouillon chatoyant : éblouissement circonscrit.
Pins pignons ténébreux dont le sens de la ramure tamise la lumière au point de ne livrer passage qu’à des rayons parallèles aux branches : grâce du soir où les allées sont silencieuses, abandonnées au babil des jets d’eau.
Etendu là, les yeux fermés, sans méditation ni maximes, abrité dans l’arôme du feuillage nouveau, la face purifiée par la brise, l’incessant friselis des peupliers façonnant au murmure de l’euphorie. L’univers est une gerbe.
Bien peu, un feuillage, une moirure à la vitre : aussitôt exister se suspend et luit. Au séchoir du jardin où oscille ton linge, je revis un laps bref que j’ai déjà vécu, je reconnais ton pas sur le dallage de l’allée, la porte grincera peut-être. C’est entre deux silences.

François Laur

Extrait de Quotidiennes, Éditions Rafael de Surtis, Cordes-sur Ciel, 2006