Dans le spectacle Déviation, c’est peut-être moins évident ; à cause des accessoires : le cerceau et la voiture, qui semblent prendre trop de place sans produire le sens qu’on en attend (puisque c’est ce qui est annoncé). Il y a du potentiel, des relations entre les danseurs, de l’espace, mais à mes yeux dans cet espace manque parfois la tension qui s’exprime trop rarement. Et il me semble que ce manque vient du fait que cette pièce ait été présentée en salle. Je n’en avais vu que des morceaux en extérieur et pourtant les sensations que j’avais éprouvées étaient plus fortes. Dans cette salle, les spectateurs sont installés en gradins, sur des sièges rouges, et assis confortablement. La cage de scène est noire, neutre, un peu neutralisante. Les effets de lumière et de fumée ne suffisent pas pour en masquer le côté convenu, convenable. Ce spectacle dégage sans doute plus de puissance dans la rue, le territoire de l’automobile.
A condition (Photo : Katya Mokolo) est la seconde pièce de la soirée. Mieux maîtrisée sans doute, ou peut-être simplement mieux adaptée à la salle. Les gestes banals du quotidien, ici sortis de leur contexte, prennent un aspect original. Ce hip-hop est un art du quotidien, un art qui déplace le quotidien, le met en lumière et en modifie la portée. Tous les gestes devant nous, nous les avons déjà vus, mais pas comme ça. A l’image de cet index tendu, qui désigne, qui interroge, qui exclut, qui appelle. Des danseurs dont le physique est commun, même dans la diversité, capables de prouesses mais pas en démonstration. Et quelque chose que je ne parviens pas à définir dans les relations qui se jouent, se nouent peut-être, sur le plateau : la vie d’une cité peut-être, d’une cité ordinaire. De la condition de nos vies.
J’ai vu ces spectacles au Pôle Culturel d’Alfortville (94).