La forme de l’eau, c’est celle du récipient dans lequel on la verse … Logique, non ? Comme la vérité, elle s’adapte donc au cadre. Ici, le cadre de ce premier polar de la série des enquêtes du commissaire Salvo Montalbano, c’est Vigàta, faux-nez de Porto Empedocle, dans la province d’Agrigente en Sicile.
On vient de découvrir un mort dans un lieu particulièrement sordide : l’ancienne usine chimique complètement désaffectée, devenue le lieu de débauche et de tous les trafics de la ville proche. Ce sont les employés de la société de nettoiement qui l’ont trouvé au petit matin, le pantalon baissé, le bas-ventre à l’air, affalé à la place à côté du conducteur d’une Mercédès curieusement garée. Pourtant, il semble que l’ingénieur soit décédé de mort naturelle. Son cœur a lâché pendant l’action. Car les deux employés ont tout de suite reconnu la victime, une sommité politique dans la région, un acteur majeur, avec son avocat et alter ego, de la Démocratie Chrétienne. L’ingénieur Luparello va laisser un grand vide dans le parti. Surtout, consigne est donnée à la Presse locale de ne pas dire un mot sur les circonstances de sa mort, par égard pour la famille. Après tout, il s’agit bien d’un arrêt cardiaque. Cette mort va bien arranger son successeur à la tête du parti, le professeur Cardamone, qui va être élu à la place de l’ingénieur défunt.
Cependant, à côté du cadavre, quelqu’un a "oublié" un collier de grand prix. Et il semble que tout converge pour impliquer la belle-fille du professeur Cardamone, une splendide créature nommée Ingrid Sjostrom ressemblant à Victoria Swinsted, longues jambes, belle crinière blonde et suédoise…Le collier lui appartient en effet, mais elle n’aime pas porter de bijoux.
Salvo ne va pas se laisser berner. Il remonte la piste des habitudes sexuelles de l’ingénieur, aidé en cela par son épouse, depuis longtemps blasée, mais toujours très digne. En fait, c’est l’avocat Rizzo qui tire les ficelles …
Guerre de clans, intrication de la politique et des affaires, paysages beaux à couper le souffle, villas surplombant la mer … Tout est en place dans ce premier opus. Dans les suivants, les personnages secondaires auront plus de corps, mais celui-ci est déjà un vrai régal.
La forme de l’eau (La forma d’ell’aqua), polar d’Andrea Camilleri, traduit de l’italien par Serge Quadruppani, Fleuve Noir Pocket, 251 p. 5,70€