Qui, lecteur de musaraign.com ou non, simple internaute, surfeur occasionnel, accro à la toile, peut se prévaloir d'avoir un "casier internet" vierge ?
En effet, que ce soit un C.V. en ligne, une petite annonce, un commentaire sur le site de la Fnac ou une question saugrenue dans un forum, nombre d'entre nous ont laissé leur empreinte sur le web.
J'en veux pour preuve le réflexe qui pousse un recruteur à "googliser" un candidat, celui qui vous fait entrer le nom d'une vieille connaissance dans le champ idoine pour savoir ce qu'il/elle est devenu, cet autre qui vous incite à lancer une requête sur votre patronyme à la recherche d'un homonyme ou pour remonter votre arbre généalogique. Je ne parle même pas de la curiosité de certains qui saisissent leur nom à la recherche de leur e-réputation !
Si cela peut avoir une réelle utilité, a contrario cela peut représenter un handicap voire un danger. En effet, qui nous dit que le commentaire laissé ça ou là n'est pas truffé de fautes d'orthographe, de grammaire, témoin d'un instant de colère ou d'emportement passager, une réponse à la con dans un forum pour geeks éclairés ? Tout le problème est là : cette trace de vous est gravée dans la silice et, toute enfouie qu'elle est, peut ressurgir à la moindre sollicitation.
Pires encore : les réseaux communautaires !
Croyant dispenser quelques infos vous concernant à destination de vos proches, vous jetez en pâture des pans de votre existence, de vos croyances, de vos pensées intimes, de vos opinions politique à qui voudra bien les lire.
Et voilà que la quête de notoriété, l'exutoire éphémère se révèle être une mémoire de toute votre personne avec ses qualités et ses défauts.
Défauts sur lesquels certains s'attardent comme cette photo de lendemain de fête postée sur votre blog, ce message tendance deuxième degré à l'encontre d'un ami qui, sorti de son contexte, peut passer pour une diatribe immonde. Je ne fais même pas état de ce pamphlet lâché sur votre supérieur parce qu’il vous avait refusé une augmentation la semaine passée.
Tout ceci peut paraître anodin mais il n’en est rien. Car le web est une véritable éponge à souvenirs, un puits sans fond de la mémoire de l’humanité (je vous invite à un voyage dans le temps avec Wayback Machine : entrez une URL dans le champs adapté et retrouvez le site tel qu'il était il y a 1, 5 ou 10 ans !) dans tout ce qu’elle a d’extraordinaire, d’odieux ou d’insignifiant.
Et cela risque de s’aggraver avec le web 3.0 que l’on annonce sémantique, taguant tout et n’importe quoi, répondant à la moindre interrogation en langage naturel.
"Mais, Musa, où veux-tu en venir au juste ?". J’y viens. Je rêve d’un web fonctionnant à l’image du cerveau humain, enfouissant ces bribes de nous qu’il n’y a pas lieu de retenir, pardonnant avec le temps, retenant le plus marquant de ce qui fait notre être et de ceux qui nous entourent.
Je réclame le droit à l’oubli !
A vouloir tout cataloguer, catégoriser, ranger, stocker, historiser, le web devient une manne à manier avec précaution et peut-être une arme redoutable s’il venait à tomber entre de mauvaises mains.
Alors gare à vous, éteignez votre ordinateur, ne surfez plus pendant une semaine, ne relevez plus vos mails, sortez de chez vous, discutez, allez à la rencontre des gens, proches ou moins proches, apprenez à les écouter, les connaître et nul doute qu’au terme de cette semaine vous aurez appris bien plus sur l’existence, sur des valeurs immuables et sur vous même qu’en bien des années.
Déconnexion…