On connaissait la scène du Conseil régional de Bretagne, rejouée 4 fois, celle du Conseil Général de Loire-Atlantique à l'époque où Patrick Maréchal était à sa tête, celle encore du Conseil Général du Morbihan jouée récemment. Aujourd'hui, nous avons pu assister en direct à... la scène de l'Assemblée Nationale! Les premières prises ayant été ratées, deux députés, Marc Le Fur (UMP) et François de Rugy (EELV) ont déposé un amendement pour dézinguer le droit de veto de la Région des Pays de la Loire en cas de référendum sur la réunification administrative de la Bretagne.
Nous étions nombreux cette nuit, vers 1h du matin, à écouter le début des échanges concernant la modification de l'article 3 de la Constitution (parmi eux d'ailleurs, un paquet de jeunes de l'UDB, mais aussi du collectif 44 = Breizh). La secte des auditeurs nocturnes de l'Assemblée Nationale. Yep, sauf qu'on s'est planté et que le débat était ce matin, vers 11h. Nous, ce qu'on souhaitait, c'est que les députés en arrivent au fait: "bon, ok, on a merdé pendant 70 ans, on est des gros tocards et pour la réunification, on signe demain à 7h". Au lieu de ça, on a entendu François de Rugy discourir devant des banquettes vides de l'ineptie de l'UMP qui propose un référendum populaire impossible à mettre en place. Jugez plutôt: pour qu'un référendum populaire soit approuvé, il faudrait réunir en 3 mois 1/10 du corps électoral français (soit 4.5 millions de personnes) et 1/5 du Parlement. Autrement dit, la votation citoyenne pour la Poste qui a réuni 2 millions de personnes, n'aurait pas eu le droit de passer à l'Assemblée. Mais imaginons un instant qu'un sujet y parvienne (je ne sais pas moi, les retraites?): le parlement se donne 23 mois pour mettre le sujet à l'ordre du jour!
Bref, revenons à nos moutons. Ce matin, la gueule enfarinée, la secte des nocturnes devient diurne et on sent l'impatience d'un paquet de militants échangeant leurs
impressions sur facebook. 11h30. Fañch an Distro. Explication de l'amendement. La parole passe à Marc Le Fur qui estime que "quand un propriétaire quitte un immeuble, il ne demande pas l'avis
de tous les copropriétaires pour s'en aller". Belle sortie. Il sourit, il est content de son coup politique.
Christian Vanneste s'oppose, le gouvernement tousse, les Alsaciens soutiennent les bretons. Jean-Jacques Urvoas et Marylise Le Branchu y vont de leur mot, eux aussi. Tous savent que c'est un coup médiatique et politique (l'élection approche, il faut ressortir les marronniers), mais ils défendent d'un seul homme cet amendement. L'Histoire retiendra sur fond de violon que c'était trépidant et que tout un peuple était derrière son écran. Et bien non, c'était chiant et monotone, mais ça valait le coup d'être vu quand même. Ne serait-ce que pour voir la gueule du rapporteur ("Mesurez-vous les conséquences?") ou de Vanneste ("mêler un problème local avec la souveraineté populaire...").
Qu'importe, l'amendement est passé, il y avait 25 personnes dans l'hémicycle. Le potentat Ayrault était occupé et n'a pas pu taper du poing sur la table. "Popop, il suffit! Si le Conseil Général de Loire-Atlantique retrouve son giron historique, ç'en est finit de ma toute puissance. Les Pays de Loire, cette région molle et sans goût, me convient très bien à moi. ça me permet de briller". (monologue imaginé, toute ressemblance avec la vérité serait pure coïncidence)
Demain matin, les journalistes, dans leur grande bonté, donneront la parole au PS, à l'UMP et à EELV. Marylise Le Branchu que nous avons entendu prétendre que les socialistes "demandent que ce référendum soit organisé" (voir ici) dira sans doute aussi que le Conseil régional est assidu. Logique, chacun essaye de tirer la couverture à soi. La réalité, c'est que tout le monde excepté l'UDB est blasé dans cette assemblée. Car chacun sait que cet épisode plutôt inattendu et positif sur ce sujet transparti qu'est la réunification n'est qu'une étape minime et que, quand bien même, le Sénat puis le Conseil constitutionnel validerait ceci, il resterait encore à trouver 1/10 du corps électoral de Loire-Atlantique et à convaincre 1/5 de l'assemblée du Conseil Général que les voeux, c'est bien, mais les actes, c'est mieux...