Picher est une de ces villes qui n’a pas eut beaucoup de chance – et c’est bien parce qu’elle est située dans l’Oklahoma qu’elle peut se voir accolé les deux lettres OK. D’abord, personne ou presque ne sait ou est Picher, et la sonorité du nom fait penser à Pichet en français. Vous me direz que c’est anecdotique et que la question n’est pas là, et bien d’accord, mais écoutez plutôt cela : la ville a été fondée en 1913, suite à la découverte de mines de plomb et de zinc. Tandis que la ressource minière s’épuisait lentement, l’exploitation faisait des ravages : les cavités creusées dans le sol s’effondrent régulièrement, obligeant à dévier les routes, les rejets de plombs ont transformé la ville en un enfer toxique. En 1996, une étude montra que 34% des enfants étaient atteints d’empoisonnement au plomb, alors que l’activité minière avait cessé en 1967 ! Mais ce n’était pas grave, puisqu’en 2004 une autre étude mis en lumière la vétusté de l’habitat. 86% des maisons situées au dessus de cavités minières (il y avait 17 000 puits à Picher) étaient menacées d’effondrement… Mais ce n’était pas vraiment grave puisqu’en 2008 une tornade dévasta la ville, endommageant ou détruisant environ 150 maisons. Coup de grâce pour la ville, dont la population déclinait déjà, et dont l’évacuation avait été programmée par la célèbre APE. Picher devenait une ville fantômisée pour des raisons environnementales, un privilège qu’elle partagerait avec quelques autres cités dans le monde. Les autorités, qui n’aiment pas la poésie, ont commencé à détruire les bâtiments à partir de janvier 2011. Vous trouverez plusieurs articles sur la ville, ici, ici, et ici. Ils nous apprennent qu’une bande d’irréductibles refusa de quitter la ville.
Picher, Oklahoma, au temps de sa splendeur
Une rue de Picher aujourd'hui
Un terril composé de matériaux ultra-toxiques
Pourquoi je vous raconte tout cela ? Parce qu’il faut dépolluer le site, mais il faut croire que le statut de désastre écologique majeur des USA a donné une visibilité incroyable au lieu. Deux étudiants en architectures se sont penché sur le cas de cette zone abandonnée. Le premier, Brandon Mosley, propose d’y installer un musée des mines. L’objet peut se décrire comme une immense vis reliant le niveau du sol avec de profondes cavités. Accessoirement, cette vis est un puit de lumière géant : voila pourquoi elle figure sur 5000K ! Ça rappelle le projet de vis d’accès au château de Bellinzona (Galfetti architectes), mais à l’envers, ou les propositions d’urbanisme souterrain de Bernard Utudjian. L’objet est aussi une grande camera oscura, et projette au sous-sol une image des collines de déchets toxiques qui forment le nouveau paysage apocalyptique de Picher.
Brandon Mosley, le musée des mines
Loumière !
vue du puits de descente du projet de Brandon Mosley
L’autre projet, signé Clint Langevin et Amy Norris, reste en surface. c’est une immense canopée qui profite de l’énergie des rayons lumineux. Transformer le site pollué avec les énergies renouvelables, voila une belle rédemption. La ville chinoise ou les panneaux solaires auront été produits avec forces dégats environnementaux pourront s’en souvenir. La lumière, dernière ressource de Picher…
vue d'une maquette de la canopée
Je ne sais plus quel urbaniste disait “aucun territoire n’est désespéré“… La preuve !
Balcon sur la caverne, Brandon Mosley, Musée des mines abandonnées
Via BldgBlog