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Exemple d'un permis de construire obtenu frauduleusement

Publié le 21 décembre 2011 par Christophe Buffet

Par cet arrêt :

"Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, le 18 novembre 1997 sous le n 97MA05351, présentée pour M. Gilbert Z..., demeurant Résidence Chambord, 19 bis boulevard Franck Pilatte à Nice (06300), par Me Y..., avocat ;

M. Z... demande à la Cour :

1 / d'annuler le jugement du 30 juin 1997 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de ROQUEBRUNE-SUR-ARGENS en date du 5 août 1988 accordant un permis de construire à M. X..., à l'annulation de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé pendant plus de quatre mois par ledit maire sur sa demande du 4 mai 1992 tendant au retrait de l'arrêté précité du 5 août 1988, à l'annulation de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé plus de quatre mois par le préfet du Var sur sa demande du 4 mai 1992 tendant au retrait de l'arrêté précité du 5 août 1988 et à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 500.000 F en réparation du préjudice résultant du refus préfectoral de retirer ledit arrêté ;

2 / d'annuler l'arrêté susvisé du maire de ROQUEBRUNE-SUR-ARGENS du 5 août 1988 ;

3 / d'annuler la décision implicite de rejet susvisée du maire de ROQUEBRUNE-SUR-ARGENS ;

4 / d'annuler la décision implicite de rejet susvisée du préfet du Var ;

5 / de condamner l'Etat à lui verser la somme de 500.000 F en réparation de son préjudice ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu la délibération du conseil municipal de ROQUEBRUNE-SUR-ARGENS du 10 juillet 1987 approuvant le plan d'occupation des sols de la commune ;

Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 juin 1999 :

- le rapport de M. BIDARD DE LA NOE, président assesseur ;

- et les conclusions de M. BENOIT, premier conseiller ;

Considérant que pour délivrer à M. X..., par un arrêté du 5 août 1988, un permis de construire en vue de l'édification d'une maison d'habitation d'une surface hors oeuvre nette de 153 m sur un terrain cadastré section CH n 534 situé au lieu-dit "Les Agasses", le maire de ROQUEBRUNE-SUR-ARGENS s'est fondé sur les dispositions de l'article ND 1 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune approuvé le 10 juillet 1987 qui autorise, par dérogation à l'inconstructibilité de la zone ND, "la réhabilitation des constructions existantes à la date de publication du plan d'occupation des sols" ; que cet arrêté a été pris au vu des déclarations de M. BAUDET certifiant être propriétaire sur ladite parcelle d'une "bastide de 222 m sinistrée à la suite d'un incendie survenu le 21 août 1982" et produisant une photographie de cette maison ; qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté que la parcelle section CH n 534 n'avait jamais comporté de maison d'habitation, mais seulement un cabanon d'une superficie de 19,25 m ainsi que des ruines ; que M. Z..., voisin de M. X..., a demandé au préfet du Var le retrait de ce permis de construire ; qu'il a introduit le 2 septembre 1991 devant le Tribunal administratif de Nice, à l'encontre de la décision préfectorale implicite rejetant sa demande, un recours pour excès de pouvoir dont il s'est désisté ultérieurement ; que le 8 octobre 1992, il a formé devant le Tribunal administratif deux nouveaux recours tendant, pour le premier, à l'annulation de l'arrêté du maire de ROQUEBRUNE-SUR-ARGENS du 5 août 1988 accordant le permis de construire, et, pour le second, à l'annulation des décisions implicites du préfet du Var et du maire de ROQUEBRUNE-SUR-ARGENS rejetant sa demande du 4 mai 1992 tendant au retrait du permis ainsi qu'à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 500.000 F en réparation du préjudice causé par le refus du préfet ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de ROQUEBRUNE-SUR-ARGENS du 5 août 1988 accordant à M. X... un permis de construire :

Considérant que si un acte administratif obtenu par fraude ne créé pas de droits pour son titulaire et peut à tout moment être retiré par son auteur, cette circonstance n'a pas pour effet de proroger le délai de recours contentieux au bénéfice des tiers ;

Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article R.102 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel que le délai de recours contentieux est de deux mois ; que, comme il a été dit ci-dessus, M. Z... a formé le 2 septembre 1991 un recours pour excès de pouvoir contre le refus de l'administration de retirer l'arrêté du 5 août 1988 ; qu'ainsi, il doit être regardé comme ayant eu connaissance dudit arrêté au plus tard à la date du 2 septembre 1991 qui a marqué le point de départ du délai du recours contentieux contre le permis de construire ; qu'ainsi, la nouvelle demande d'annulation dudit permis, enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Nice le 8 octobre 1992, était tardive ; que, par suite, M. Z... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le jugement attaqué a rejeté sa demande comme irrecevable ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite du préfet du Var refusant de retirer l'arrêté du 5 août 1988 :

Considérant qu'il est constant que la commune de ROQUEBRUNE-SUR-ARGENS était dotée d'un plan d'occupation des sols à la date à laquelle son maire a accordé le permis de construire litigieux à M. X... ; que l'article L.421-2-1 du code de l'urbanisme dispose que : "Dans les communes où un plan d'occupation des sols a été approuvé, le permis est délivré par le maire au nom de la commune." ; qu'ainsi, seul le maire de ROQUEBRUNE-SUR-ARGENS était compétent pour retirer son arrêté du 8 août 1988 ; que, par suite, M. Z... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé plus de quatre mois par le préfet du Var sur sa demande du 4 mai 1992 tendant au retrait de l'arrêté du maire de ROQUEBRUNE-SUR-ARGENS du 8 août 1988 ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite du maire de ROQUEBRUNE-SUR-ARGENS refusant de retirer son arrêté du 8 août 1988 :

Considérant que le Tribunal administratif de Nice n'a pas répondu aux conclusions de M. Z... tendant à l'annulation de la décision implicite du maire de ROQUEBRUNE-SUR-ARGENS refusant de retirer le permis de construire délivré à M. X... le 8 août 1988 ; que, par suite, il y a lieu d'annuler le jugement attaqué sur ce point, d'évoquer et de statuer sur ces conclusions ;

Considérant que, comme il a été dit ci-dessus, le permis de construire litigieux a été obtenu à la suite de manoeuvres frauduleuses de M. X... ; qu'ainsi, il n'a pu créer de droits à son profit ; que, par suite, le maire, saisi de la demande de M. Z..., même si celle-ci avait été présentée après l'expiration du délai de recours contentieux à l'encontre dudit permis, était tenu d'en prononcer le retrait ; que, dès lors, il y a lieu d'annuler la décision implicite du maire de ROQUEBRUNE-SUR-ARGENS refusant de retirer son arrêté du 8 août 1988 ;

Sur les conclusions tendant à la condamnation de l'Etat au versement d'une indemnité d'un montant de 500.000 F :

Considérant que M. Z... ne conteste pas qu'il a omis, avant de saisir le Tribunal administratif, de présenter une demande d'indemnisation à l'Etat ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif a rejeté ses conclusions indemnitaires pour irrecevabilité ;
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nice du 26 juin 1997 est annulé en tant qu'il a omis de statuer sur les conclusions de M. Z... tendant à l'annulation de la décision implicite du maire de ROQUEBRUNE-SUR-ARGENS refusant de retirer l'arrêté du 8 août 1988 accordant un permis de construire à M. X....
Article 2 : La décision implicite du maire de ROQUEBRUNE-SUR-ARGENS résultant de son silence gardé plus de quatre mois sur la demande de M. Z... du 4 mai 1992 tendant au retrait de l'arrêté du 8 août 1988 accordant un permis de construire à M. X... est annulée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Z... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Z..., à la commune de ROQUEBRUNE-SUR-ARGENS, à M. X... et au ministre de l'équipement, des transports et du logement. Copie en sera adressée au préfet du Var et au procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Draguignan."


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