Mondial Nomade, c’est le nom de l’entreprise créée par Jean-Charles Rem, un homme étrange. C’est grâce à une idée d’apparence saugrenue qu’il est parvenu à la tête d’une des plus grandes fortunes mondiales : une société de garde-meubles. Rem propose à ses clients de conserver leurs objets les plus chers, symboliques de leur mémoire et de leur passé. Pour arriver à un tel succès, il n’est pas à une malversation près ; quand un client disparait, l’entreprise se soucie peu de son héritage et revend les objets sans scrupules.
Mais voilà qu’arrive le jour fatidique : Rem, acculé par les actionnaires, revend son patrimoine. S’ensuit alors une période d’errance. La nostalgie l’accable, ses anciennes fonctions lui manquent, et surtout sa secrétaire, véritable complice, qui s’occupait de lui comme d’un enfant. Rem découvre une ancienne photo, où il posait en Inde avec un homme qui l’a beaucoup marqué. Voilà peut-être l’occasion de donner un sens nouveau à sa vie. Il part à sa recherche. À New-Delhi, il découvre une région bouleversée… Les entreprises françaises ont tout délocalisé. Leurs employés ont dû s’expatrier. Le commerce et la finance ont eu raison de l’être humain. Les gens vivent dans la misère, travaillant comme vélo-taximen le soir pour joindre les deux bouts. Leurs épouses se prostituent. Le monde est devenu (encore plus) misérable, glauque, dévoyé.
Mondial Nomade décrit un monde bouleversé, dans un futur proche… Quelques nostalgiques roulent encore en Porsche, mais c’est devenu ringard. C’est un univers de chaos, où les lois du marché ont totalement dominé l’homme… Une sorte de projection de ce qui se passe aujourd’hui… Pas forcément très audacieuse. Quand on voit la débâcle économique, il n’était point difficile d’imaginer l’étape suivante. En ce sens, Mondial Nomade est une sorte de récit dystopique, c-à-d qui montre un futur sombre pour nous mettre en garde. Mais pas tout à fait, il reste un côté optimiste.
L’histoire est entièrement centrée sur Jean-Charles Rem, qui se montre sensible, contrarié, faible aussi. Il apparait comme une sorte de fantôme, dans des situations décalées, presque absurdes. On aura peut-être un peu de mal à s’attacher à cet homme veule et à comprendre sa quête… Le personnage et son histoire inaboutie gardent une part de mystère. Au lecteur alors de paraphraser la philosophie à sa manière. Les cent premières pages sont assez lentes, après seulement viennent les situations cocasses. Le lecteur qui s’ennuie pourra sauter aux pages 90-100 sans rien avoir perdu. L’écriture elle-même m’a semblé plus aboutie dans la seconde partie, alors que la première est assez liquide, sans épaisseur. (Peut-être aurait-il fallu une troisième partie…) Finalement, l’ensemble m’a semblé amusant sans être désopilant, laissant un sentiment d’inachevé, d’avoir pu aller plus loin, faire plus fort, plus audacieux. L’auteur ne se mouille pas vraiment en décrivant cette société qui est juste notre héritière, en poussant simplement la situation actuelle un cran plus loin. Je l’ai trouvé plaisant, édifiant sans être moralisateur, mais avec un manque de force. La fin reste en point de suspension… Au lecteur d’imaginer une suite.
Mondial Nomade de Philippe Pollet-Villard. Éditions Flammarion
Date de parution : 31/08/2011