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Géographie électorale des primaires du 4 mars (2) : Ohio, Rhode Island

Publié le 02 mars 2008 par Scopes
L'Ohio et la Rust Belt (D. Ahntholz, NYtimes)


Après le Texas, InBlogWeTrust revient sur la géographie électorale des deux autres États clés de ce 4 mars: l'Ohio et le Rhode Island
L’imaginaire du Texas est fait de rodéos, de santiags et de barons du pétrole. Les billets verts pleuvent, et si l’ancien État-frontier ne s’est pas vraiment adouci, il s’est du moins considérablement enrichi depuis l’ère Reagan.
L’Ohio n’est pas si glamour : ses industries lourdes (fonderies, aciéries) ou automobiles sont en crise ; les villes se sont vidées et le chômage a fait son apparition dans une région autrefois prospère. L’Ohio est au cœur de cette Rust Belt (ceinture de la rouille) qui entoure les Grands Lacs, parsemées des vestiges d’un passé glorieux au temps des Carnegie et des Rockefeller. La récente crise des subprime n’a rien arrangé : l’endettement des ménages s’est aggravé, et nombreux sont ceux qui, ne pouvant honorer leurs traites, ont du abandonner leur maison.
Quand ils se déplacent dans l’État, les hommes politiques aiment parler dépression et économie et en rajoutent dans le misérabilisme, au risque d’irriter les habitants : en 2004, John Kerry en visite à Youngstown s’était fait photographier devant une usine décrépite alors qu’à deux pas se trouvait un complexe de bureaux flambant neuf… Pourtant tout l’État n’est pas touché par la crise : la ville de Cincinnati reste (relativement) prospère, celle de Cleveland semble revivre après des années de déprime, Columbus bénéficie de son université…

Comme le Texas, l’Ohio est un État divers : on y trouve des couloirs industriels (le long du lac Michigan ou la Mahoning Valley) et leurs cortèges de villes en crise (Gary, Youngstown, Akron voire Cleveland), des régions plus dynamiques comme Cincinnati (siège de Procter & Gamble), des plaines agricoles (maïs, soja et fromage -- 1er État producteur de Swiss cheese !).
On y rencontre surtout une forte proportion de classes populaires blanches, travaillant dans l’industrie et fortement syndicalisées, caractéristiques de cette working class censément acquise à Hillary Clinton. Mais voilà, ici aussi, Barack Obama semble rattraper son retard, qui est passé de près de vingt à quatre points en moins d’un mois. Les deux candidats feraient même jeu égal (45 %) selon un sondage récent (Reuters/CSpan/Zogby).
L’état étant un « must win » pour Clinton, la compétition y est féroce et les attaques se multiplient. Une vidéo de Clinton jouait sur les peurs de l’électorat et présentait Hillary comme la mieux armée pour répondre aux défis d’un monde dangereux ? Obama répond avec sa version parodique. Jugez plutôt :
C’est à qui sera le plus opposé à l’ALENA (Traité de Libre Echange de l’Atlantique Nord) mis en œuvre sous la présidence de Bill Clinton et qui n’a guère fait qu’accélérer les délocalisations en Ohio. Barack Obama y serait farouchement opposé et tance sa rivale, qui rabat la faute sur son mari, qui lui dénonce l’administration Bush (père). La lutte fait rage, les 141 délégués en jeu doivent se sentir désirés.
Chez les républicains, John McCain est assuré d’une victoire tranquille et peu fatigante : il possède trente points d’avance dans quasiment tous les sondages. Il en profite pour tirer sur Obama -- en qui il voit son prochain rival dans la course à la présidence -- et pour mettre en avant son passé militaire et son statut de héros américain.

Le 4 mars, deux autres États votent, qui ne vont pas les grands titres de l’actualité: le Vermont, a priori acquis pour Obama ; et le Rhode Island, beaucoup plus disputé. Chasse gardée de Clinton, ce petit bout d’État riche en travailleurs, en femmes et en retraités, subit lui aussi le momentum Obama. Les inscriptions sur les listes électorales se multiplient, des jeunes surtout, plutôt acquis à celui-ci. Des volontaires de toute la Nouvelle Angleterre investissent en masse Providence (la capitale, ville universitaire - Brown) et ses environs, motivés comme jamais.
C’est que les enjeux de mardi sont cruciaux. Hillary Clinton joue son va-tout. Avec trois victoires, elle reste en course ; avec deux victoires (et en particulier si elle perd le Texas ou l’Ohio, riches en délégués) ses chances sont compromises ; si elle perd et le Texas, et l’Ohio, elle est virtuellement éliminée de la compétition. Barack Obama espère bien s’imposer dès mardi pour se concentrer sur la campagne nationale et répondre aux attaques des républicains. Mais Hillary est combative. Bill Clinton était surnommé « come-back kid » ; elle aimerait bien faire sienne cette réputation.
Scopes

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