XYZ éditeur
184 pages
Résumé:
Louis Hémon n'hésita pas à abandonner sa fille pour s'embarquer pour le Canada, où l'attendait la mort. Par chance, quelques jours avant son départ, il avait mis à la poste Maria Chapdelaine, le roman qui allait devenir un best-seller mondial.
Mon commentaire:
Louis Hémon a marqué l'histoire de la littérature québécoise grâce à son récit du Canada-Français, Maria Chapdelaine. L'histoire de ce récit biographique débute alors que Louis Hémon marche avec un ami le long d'une voie ferrée. Épris de liberté et de grands espaces, Hémon est heureux. Il s'apprête à entreprendre un long voyage, mais il ne se rendra pas jusqu'au bout: à l'âge de 32 ans il est mortellement happé par un train. Il ne meurt pas tout de suite, mais agonise tranquillement. La forme que prend cette biographie est intéressante. Avant de mourir, alors qu'il a toujours les idées claires, il nous raconte sa vie et son parcours.
Français, Louis Hémon est diplômé en droit de la Sorbonne. Sa famille est issue de la bourgeoisie et les aspirations du jeune Louis ne correspondent pas aux ambitions que sa famille aimerait encourager. Fervent amateur de boxe (il en fera même l'objet d'un roman), Louis Hémon apprend le vietnamien, vit de petits boulots, rêve de liberté et de grands espaces sauvages. Il veut voyager. Il vit un temps en Angleterre, où il a une liaison avec une actrice. Une fillette naît de cette union. La petite sera toujours dans les pensées de son père qui s'occupe d'elle à distance, même s'il n'hésite pas à s'exiler pour le Canada.
Louis Hémon est un homme discret, taciturne par moments, qui reste à l'écart de ses collègues. Il semble apprécier sa vie lorsqu'il travaille pour trois fois rien pour Samuel Bédard, un défricheur du genre de Samuel Chapdelaine dans son roman. Grand marcheur, Louis Hémon passe de merveilleux moments au Canada. Il est toutefois rapidement surnommé "Le fou du lac" à cause de ses habitudes un peu étranges aux yeux des colons.
La biographie fait souvent le parallèle entre sa vie personnelles, les gens qu'il rencontre durant son séjour et leur transposition dans son roman. On retrouve facilement les Bédard, Samuel et sa femme, personnifiés dans les parents Chapdelaine. L'histoire de François semble aussi s'inspirer d'un fait entendu, l'histoire de Trefflé Gagnon.
Louis Hémon: le fou du lac est une biographie fort intéressante. Accompagnée de nombreuses photos d'époque, représentant l'entourage de Louis Hémon et les lieux où il a vécu, cette biographie apporte un éclairage intéressant sur le travail d'écriture et le mode de vie prôné par Hémon. En lisant cet ouvrage, j'en viens à comprendre pourquoi Louis Hémon a fait de Maria un personnage résigné, fidèle à ses racines, prête à poursuivre ce que sa famille a commencé. C'est en fait tout le contraire de Louis Hémon qui a toujours fuit. Il a fuit sa famille, bonne mais bourgeoise et ayant trop d'attente face à lui. Il a fuit les villes au profit des grands espaces. Il a fuit les responsabilités au profit de l'aventure. Il a fuit sa maîtresse au bord de la folie et sa fille illégitime qu'il ne se sentait pas le courage d'élever. Remplit de désillusions face à la vie, à sa vie, il part.
En moins de 200 pages, Mathieu-Robert Sauvé réussit à cerner l'homme qu'était Louis Hémon, en lui donnant un visage, une âme, un passé et un avenir remplit d'espoir. Malheureusement, son rêve était trop grand pour lui et Louis Hémon mourra trop jeune pour en profiter pleinement.
Une biographie très intéressante, qui m'a donné envie de découvrir toute l'oeuvre de Louis Hémon.
Quelques extraits:
"Qu'importe! Les petits boulots sans lendemain n'ont rien de déshonorant à ses yeux, tant qu'il lui reste du temps pour travailler à des nouvelles et à des romans. Tout ce qu'il demande, après tout, c'est d'avoir la paix, et de pouvoir changer de quartier ou de village quand il en a fait le tour. Le reste n'a pas d'importance. C'est ça, vivre. Dans de telles conditions, il vaut mieux répondre à l'appel de l'aventure." p.46
"Il a le sentiment que l'épisode du Québec se termine ici. Un peu comme à Londres, il sent le besoin impérieux de fuir avant d'être rattrapé par ses souvenirs." p.147