De Daho à Bashung
Combien, à part votre serviteur, auront reconnu l'accompagnatrice de Doriand (avec un "D"), support artist de la jolie franco-néerlandaise ? Car il s'agit bien en effet de l'ex-meneuse des cultes et très délicats Valentins qui officie à la guitare folk, seul oripeau instrumental du mini-set, si ce n'est le tambourin agité frénétiquement en final des morceaux par le chanteur dandy.
Lequel ne se prive pas de rappeler (merci à lui) les exceptionnels états de service d'Edith en variété pop française (de Daho à Bashung, en passant par.......à peu près tout le monde) qui, bien qu'abîmée par les années, n'a rien perdu du charisme qui avait fait d'elle l'ex-égérie de la nouvelle vague gay romantique du début des 90's.
Et à la vérité, c'est presque d'elle dont on le plus envie de parler, plus que de Doriand, au demeurant chanteur néo-réaliste aux histoires drôles et tendres, jamais très loin d'un Renan Luce, et sans doute plus attachant que toute la cohorte d'affreux Benabar de la terre !
Louise Brooks, Mireille Mathieu et Carla Bruni
Place à Keren Ann dans une salle qui c'est un comble, ne l'est pas, avec le parti gonflé de lancer le set après avoir balancé le title-track lancinant de 101, juste avant de monter sur scène. En formation resserrée, la belle Keren a donc décidé d'abandonner la très discutable coupe de cheveu à mi-chemin entre Louise Brooks et......Mireille Mathieu qu'elle arborait sur la superbe pochette du dernier album.
A présent, sa silhouette moulée dans le cool d'un fut moulant et de la veste rock'n'roll de rigueur, évoque davantage une Carla Bruni branchée, et c'est tant mieux.
Le groupe de 4 musiciens, particulièrement efficace propose batteur, sosie de Sinclair à la basse, clavier et ô joie rien de moins que Philippe Almosnino, échappé des Wampas, dont le jeu virevoltant insufflera à "Sugar Mama" et certaines vieilles scies telles "It Ain't A Crime", une seconde jeunesse. Keren, d'humeur très accorte, fait de longs commentaires sur les chanteurs peints sur les murs de l'Espace, se félicitant de figurer aux côtés de Dee Dee Bridgewater et s'autorisant une saillie réitérée envers Booba et Diam's, qu'elle se désole (?) de ne pas côtoyer (LOL).
Son maousse, voix diaphanes.....
Un sobre éclairage aux tons violets sied particulièrement à la mélancolique et magnifique "Strange Weather" qui lance les hostilités. Le son est maousse, la voix en pâtira d'ailleurs parfois, mais ça n'est pas grave. C'est à un véritable best-of de sa déjà conséquente discographie que convie Keren ; tous les morceaux qui comptent seront joués, avec une part belle faite évidemment à 101. Dont les morceaux de bravoure hormis la chanson-titre, sont tous interprétés. Nos préférés ? Outre la chanson d'ouverture, un très beau "You Were On Fire" délicatement saupoudré de Theremin, et sur lequel Keren évoque feu Trish, la chanteuse des hélas méconnus Broadcast.
Ca n'est d'ailleurs pas le moindre des mérites de la chanteuse que d'évoquer les voix diaphanes les plus prisées des années 90/2000 ; on pense aussi à l'adorable Hope Sandoval sur "All the Beautiful Girls" et la rêveuse "Song From A Tour Bus".
Traitement club......souvenirs feutrés
Si l'on devait retenir une caractéristique de la prestation de Keren Ann ce samedi, c'est l'absence de faute de goût, tant dans le choix de ses accompagnateurs ; qu'il s'agisse de ses propres musiciens ou de la première partie. Ou de façon plus subjective, de celui du répertoire interprété, qui atteint son apogée après le rappel.
Auparavant la tant attendue et tourbillonante "My Name Is Trouble", jouée en 12ème position aura droit à un traitement club : après un début classique, ce ne sont que guitare funky et basse slappée étirées sous de roboratifs stroboscopes, avec faux départs, vrais redémarrages, et Keren qui prend la pose oiseau de nuit sur le dance-floor !
Feu d'artifice final, les deux plus beaux titres du fantastique Not Going Anywhere (2003), le morceau-titre bien évidemment, et aussi le grandiose "Sailor And Widow" (ma préférée entre toutes), où la voix de Keren -qui officie derrière la batterie pour l'occasion- n'a jamais tant évoqué nos souvenirs feutrés de la grande Suzanne Véga.
Vivement le prochain album !