Le goût du lait sauvage de Michel Rodigneaux : étrange, surprenant, magique, sensuel, désarmant, agaçant.

Publié le 17 décembre 2011 par Halleyjc

Je reviens d’un beau voyage
au pays de mes souvenirs.
Je reviens d’un beau séjour
au pays de mes fantasmes.
Je reviens d’un beau voyage
au pays de la découverte.

Et je ramène de ce triple périple le goût étrange du lait sauvage.

Je croyais connaître un peu Michel Rodigneaux par les quelques échanges que j’ai eu le privilège d’avoir avec lui… notre dernière rencontre a été assez brève mais comme toujours délicieuse… sous son vaste chapeau blanc, son sourire éternel et quelques phrases amicales, me renvoi à mille autres occasions. Je regarde avec curiosité sa main qui dessine quelques mots de dédicace sous le titre de son roman… Je devine le mot amitié, je suis plus surpris par le mot admiration et je me lance alors dans une pseudo expertise graphologique pour essayer de comprendre en avant projet de lecture cet auteur qui vient spécialement pour m’offrir son roman… Le goût du lait sauvage

Notre conversation tourne autour des Corsaires, de Victor Hugues, de choses et d’autres j’entends plus que je n’écoute ses phrases… je suis déjà parti vers ses mots écris qui me sont offerts, en essayant de qualifier ce goût du lait sauvage d’une bonne dizaine d’adjectifs…

Quelques heures plus tard au sortir de ce voyage, je devrais dire mon voyage… j’égraine à nouveau les belles sensations gustatifs prémonitoires que j’avais eu en promettant à mon visiteur de lire son ouvrage.

Le goût surprenant du lait sauvage… Oui surprenant il l’est ce roman chargé de Golconde à mille facettes comme celle que Victoire offre à Armand dans une curieuse flute de pan.

Le goût magique du lait sauvage… Magique comme ce jeu de miroirs qui nous fait découvrir un personnage si vivant.

Le goût sensuel du lait sauvage   Michel est sensuel et pudique, nous conduisant de Socrate jusqu’au plus profond de nos fantasmes amoureux.

Le goût désarmant du lait sauvage… désarmant en effet est ce roman qui nous fait découvrir à chaque épisode des lieux, des personnages, des évènements qui se substituent l’un à l’autre à une cadence de biguine endiablée alors que nous aurions aimé déguster le doux tempo d’un tango ou d’un boléro…

Le goût agaçant du lait sauvage… agaçant de vivre comme un éternel outrage cette crainte d’un enfant-chocolat dans ce que l’auteur qualité pudiquement de difficultés rencontrées par les originaires d’outre-mer… si différents et si proches…

Oui ce voyage a été beau…

  • de Saint-Charles au bal nègre de la rue de Blomet en passant par la Suisse, la Belgique, Nice, Marseille, l’hippodrome du Baillif, les fêtes de Bisdary, la plage de Rocroy, le premier festival de Cannes, les quais de la gare Saint-Lazare, la boule blanche ou le Triollet, la revue nègre, la coupole, ,
  • de Erard à Dan en passant par Delphin, Pancrace, Victoire, Elisabeth, Christine, Gingebière, Dustin, Ambrose, Marie-Joséphine, Isabelle, Rosine, des Zambos au Sapotilles, sans oublier le talentueux Armand dit « Tête Blanche ».
  • Du tango argentin à la biguine de Guadeloupe en passant par Verdi, la musique cubaine, Ravel et les neuf reprises de chaque thème, le quadrille, le Jazz… de Sidney BECHET à Stellio, en passant par Gérard Laviny, Porgy and Bess, Petite Fleur, Serpent maigre, Harry Belafonte, Toto Bissainte, Charlie Parker … et j’en passe.
  • De la tuerie de Gourbeyre à l’exposition coloniale, en passant par les pacotilleuses et milles épisodes de notre monde,
  • De la jeunesse ardente à la sage philosophie de l’âge avancé.

Mais ne pensez surtout pas que ce roman, de quelques 200 pages, ne soit que ce catalogue à la Prévert que j’énumère ici pour simplement tenter d’attiser votre curiosité… Michel RODIGEAUX est un vrai poète capable de nous charmer par la description d’un beau paysage, d’une belle femme, d’un homme, d’une parturiente, d’un couple d’amants à la recherche de la petite mort, … et toutes ces petites touches délicates et précises apportent au lecteur de beaux moments. Puis soudain nous voilà dans des références musicales ou historiques à faire pâlir musicologue ou historien ; Michel est tout aussi étonnant dans ses citations littéraires, par exemple l’enseignement de Gurdjieff vers la connaissance de son « Être », sa filmographie gourmande ou dans la simple révélation de la thalassémie.

En conclusion et en finissant ce voyage l’envie me prend d’offrir ce roman à d’autres lecteurs…

Je suis comme le voyageur qui n’implore pas, ne pleure pas, mais se laisse… emporter.

http://halleyjc.blog.lemonde.fr/2011/11/25/le-gout-du-lait-sauvage-roman-de-michel-rodigneau-chez-lharmattan/