Magazine Culture
Petit Palais des Glaces37, rue du Faubourg du Temple75010...
Publié le 15 décembre 2011 par Gjouin @GilbertJouinPetit Palais des Glaces
37, rue du Faubourg du Temple
75010 Paris
Tel : 01 48 03 11 36
Métro : République / Goncourt
One man show écrit par Alexis Macquart
Mis en scène par David Salles
Mon avis : Le dossier de presse annonce un artiste « sincère, honnête, qui se présente sur scène sans faux-semblant à travers un humour spontané, incisif, perturbant, provocateur, acerbe, mordant et osé »… Et bien tout est vrai là-dedans, il n’y a rien à ajouter, et ma critique est pour ainsi dire déjà terminée…
De même, le titre de son one man show est « Faites le taire »… Là aussi je suis tout-à-fait d’accord. Pour la simple et bonne raison que ce sagouin, en parlant de sa vie personnelle, livre au public féminin toutes les clés de la psychologie masculine. Du coup, il aurait pu sous-titrer son spectacle : « les hommes : mode d’emploi ». Déjà qu’on est assez démuni comme ça face à la gent féminine, il n’y avait pas besoin de leur fournir autant d’éléments concernant les rouages les plus intimes de notre mécanique comportementale. C’est nul ! J’ai passé mon temps à l’insulter en silence. Et, évidemment, dans l’auditoire, il y avait une majorité de jeunes femmes et de couples. Nous, on se retrouve à poil, complètement désemparés et pire, démythifiés. Après ça, il faut être drôlement costaud pour affronter la vie à deux…
AleCh’ti Macquart – il revendique d’emblée ses origines nordistes, histoire ce se débarrasser tout de suite de ce poids – a tout pour attirer la sympathie. Avec son allure de copain de fac, son œil bleu ciel rigolard, et sa propension à jouer les losers, il nous met tous dans sa poche. Son truc, c’est le stand-up. Il raconte… Il SE raconte. Après avoir affirmé sa lâcheté chronique, son incapacité face à la violence, surtout celle émanant des femmes, il nous emmène dans son monde. En guise de préambule, il évoque des généralités. Il parle de la bouffe, des émissions télévisées, des dysfonctionnements de notre société, de Tweeter et de Facebook.
Sa vision des choses repose sur une logique froidement réaliste. Elle est toute entière contenue dans cette affirmation qu’il nous livre benoîtement : « C’est peut-être moi qui vois le mal partout… » Effectivement, plus on avance dans le spectacle, plus on se dit que ce gars-là, c’est la méchanceté tranquille. Rien n’est gratuit. Tout est finement décortiqué, analysé, mais sans jamais appuyer le trait. Ce qui est d’autant plus redoutable car il nous oblige à une réelle réflexion. Ses apparentes élucubrations sont bien plus profondes qu’il ne voudrait le faire croire.
Après avoir balayé avec son télescope de façon panoramique le monde qui l’entoure, il le retourne sur lui-même, se lamente sur son physique, avoue sa peur de vieillir puis, insensiblement, en vient à sa vie de couple. Un sujet qui lui tient particulièrement à cœur et auquel il va consacrer plus de la moitié de son discours. Huit ans qu’il vit avec sa copine, huit ans qu’il lui est fidèle, huit ans au cours desquels il n’a rien élucidé du « mystère féminin ». Une seule chose est sûre pour lui, les femmes lui font peur… Sans aucun tabou, avec un langage et des gestes parfois sans équivoque, il parle avec force détails de sexualité, de masturbation, de l’éducation des enfants avec en corollaire notre émerveillement crétin pour nos rejetons, des méfaits d’Internet… C’est la première fois que je vois un humoriste s’exprimer avec un réalisme aussi clinique, une lucidité implacable et, surtout, sans aucune mauvaise foi. Habile et fin, d’une honnêteté sans faille, il ne voit que l’aspect négatif des choses. Le doute l’habite et ça lui donne vachement de grain à moudre. Son parler vrai est absolument convaincant. Je suis certain en outre que ce comportement de loser doit considérablement émouvoir les spectatrices. Son côté Calimero, parfaitement assumé, c’est en fait sa façon de séduire. Et même, j’irai plus loin : en parlant sans cesse de sa compagne (après huit années de vie commune, on ne peut plus parler de copine), il lui rend en réalité un profond hommage. C’est certes en filigrane, mais on le ressent néanmoins très fort.
Je ne connaissais pas du tout Alexis Macquart. Il a été pour moi une véritable découverte. Il est intéressant, très drôle, intelligent, malin, avenant. Il mérite vraiment que les gens viennent en nombre à son spectacle car il s’y passe quelque chose. En tout cas, j’ai quitté le Petit Palais des Glaces absolument ravi et conquis. Ce Macquart est un tout-bon.