Petite soeur, mon amour
de Joyce Carol OATES (Opération Libfly)
Points,
2011, p. 735
Première Publication : 2008
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Joyce Carol Oates, née le 16 juin 1938 à Lockport (État de New York) est une poétesse et romancière américaine. Depuis 1964, elle publie des romans, des essais, des nouvelles, du théâtre et de la poésie. Au total plus de soixante-dix titres. Elle a aussi écrit plusieurs romans policiers sous les pseudonymes de Rosamond Smith et de Lauren Kelly.
Wikipédia.
Entouré d’une mère obsédée par son physique et la renommée de sa fille et d’un père toujours absent, Skyler le petit boiteux jalouse cette petite sœur tant adulée… au point de la tuer ?
En fait, j’ai entamé Petite sœur, mon amour bien avant Les Chutes mais, peinant à tourner les pages, j’ai fait une grosse pause. Résultat, j’ai mis un mois avant de parvenir à la 735ème page de Petite sœur, mon amour. Généralement, le temps de lecture est un bon indicateur d’engouement mais dans ce cas-là, malgré presqu’un mois pour en venir à bout, je ne peux pas dire que j’ai détesté. Non. Le texte est loin d’être inintéressant, il est juste particulièrement dense et « pesant ». Et, comme Les Chutes de la même auteure, il restera un bon moment dans mon esprit !
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Le sous-titre - « L’histoire intime de Skyler Rampike » - annonce la couleur, nous voilà en présence de 735 pages issues du journal intime d’un jeune homme. Mais pas n’importe quel jeune homme, un junkie de 19 ans. Autant vous dire que la narration est à l’image de son narrateur : parfois embrouillée, souvent lapidaire, exclusivement à la troisième personne du singulier. Et oui, Skyler parle du Skyler du passé en utilisant le « il », comme si l’enfant boiteux et réservé et plus tard l’adolescent isolé et perturbé, étaient deux autres lui complètement détachés. Alors oui, Joyce Carol Oates se met avec brio dans la peau d’un junkie paumé - et je la félicite pour la réussite de l’entreprise - mais sur 735 pages, c’est parfois très lourd, assez suffocant et souvent dérangeant.
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Ajoutez à cela une intrigue plutôt « contemplative » comme pour Les Chutes, et vous comprenez qu’il fut parfois difficile de tourner les pages de Petite sœur, mon amour. Finalement, la découverte du coupable du meurtre de la petite Bliss passe au second plan, on veut juste savoir ce qu’il est advenu de Skyler et accessoirement de ses deux parents, après la mort de la petite patineuse.
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On suit donc, à travers le témoignage de Skyler, l’évolution de cette mère obsédée par la carrière et la réussite de sa fille, profitant de la mort de celle-ci pour monter un véritable business autour de l’image de la petite star ; ou l’évolution de ce père volage, absent, un brin macho, complètement en dehors du circuit familial. A travers les yeux de Skyler, on découvre également le quotidien de cette petite fille obligée d’aller chez le coiffeur et de recevoir des piqures (pour améliorer ses performances, sa santé, sa vitalité,…) toutes les semaines, contrainte de porter une gouttière toutes les nuits pour avoir des dents parfaites ou des costumes de scène ridicules pour attirer l’attention et la sympathie du public essentiellement féminin. Une petite fille seule, n’arrivant pas à retenir les leçons qu’essayent de lui enseigner ses professeurs successifs, faisant encore pipi au lit à 6 ans ; victime de l’obsession folle de sa mère et de l’absence de son père. Skyler, quant à lui, petit garçon impuissant, voit sa petite sœur qu’il aime subir les traitements de ses parents et la jalouse souvent, délaissé dans son coin, lui, le petite garçon grimaçant et sans ami.
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A travers cette histoire - apparemment tirée d’un fait divers réel -, Joyce Carol Oates revient sur cette Amérique éprise de gigantisme, amoureuse du paraître et des faux-semblants, détruite par le besoin de luxe et de célébrité.
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Comme dit un peu plus haut, c’est dense, assez suffocant et dérangeant mais évidemment, loin d’être inintéressant. Certains passages sont assez longs (la montée de Bliss dans le monde du patinage par exemple) et l’action est quasi inexistante (j’ai en revanche bien aimé le passage relatant l’histoire d’amour adolescente de Skyler), ce qui rebutera sans doute quelques lecteurs.
Joyce Carol Oates possède une narration et un style particuliers qui appellent les extrêmes : soit on adhère, soit non. Si c’est non, il vaut sans doute mieux passer à autre chose (c’est la même chose jusqu’au bout, vous ne vous mettrez pas à aimer au bout de 300 pages) ; en revanche, accrochez-vous quand même un tout petit peu plus que les dix premières pages (il faut le temps de se mettre dans le bain) car c’est peut-être particulier mais Joyce Carol Oates vaut tout de même le coup d’être lu au moins une fois.
Les Petits [ + ] : Joyce Carol Oates réussit brillamment à se mettre dans la peau d’un jeune junkie paumé. L’auteure brosse des portraits complexes et approfondis. Un témoignage de la folie du luxe, de la renommée et du paraître si propre aux Etats-Unis. Une mise en page soignée (beaucoup d’efforts avec des effets intéressants : côté « journal », format « lettre »,…).
Les Petits [ - ] :Quelques passages assez longuets (au début surtout). C’est très dense et met mal à l’aise, ce n’est pas une lecture détente...