Aujourd’hui, nous allons parler gros sous, et mieux, nous allons parler gros sous pour les partis politiques. Et chacun sait qu’en ces temps de campagne électorale débridée, les sous sont le nerf de la guerre, surtout lorsqu’ils sont gros. Et quand on parle sous et qu’on parle partis politiques, forcément, on doit aussi parler magouilles.
Et dernièrement, question magouilles, on a été servi.
Soit, il s’agit d’un passage obligé de toutes les élections présidentielles : dès que les fauves, à l’appétit aiguisé par l’odeur chaude et salée du sang de contribuables fraîchement détripaillés, sortent de savane, les uns multiplient les feulements et les coups de griffes, pendant que les autres pissent consciencieusement sur les endroits stratégiques de leur territoire pour mieux le marquer.
Dès lors, il n’est pas étonnant que les affaires sortent actuellement dans un flot puissant et dévastateur et emportent une bonne partie de la maigre crédibilité de nos candidats.
Actuellement, ça pleut pas mal sur Hollande et tout le Parti Officiellement Socialiste.
Déjà, on se souvient que les primaires avaient déjà été légèrement bousculées par les remugles puants de l’affaire Guérini, dans laquelle l’aimable mafioso président du conseil général s’était retrouvé mêlé à une cohorte bruyante de malversations, de détournements de fonds, de corruptions diverses, de marchés publics truqués, et même des liens avec l’Opus Dei dans un mic-mac à côté duquel un roman de John Le Carré ressemble à une petite bluette romantique ; si Thierry Meyssan avait décrit l’ensemble des ramifications des affaires de Guérini, on aurait crié à la complotite devant l’énormité et la complexité des exactions menées.
Heureusement, au Parti Officiellement Socialiste, tout se termine par des chansons … même si là, il va falloir mettre la sono très très fort pour couvrir les hurlements des militants, sympathisants, adversaires, journalistes, juges et policiers en charge du bordel.
Et alors que les DJ Aubrygolo, Langue-De-Jack et Orgue-Hamon font pulser les décibels comme jamais dans les rythmes chaloupés les plus torrides et qu’on sent que l’assourdissant vacarme parvient tout juste à faire oublier Guérini et sa troupe de saltimbanques, une nouvelle affaire déboule sauvagement, facétieusement relancée par nulle autre que le frétillant gentleman farmer, Montebourg.
Et cette fois-ci, c’est dans le Pas de Calais que ça se passe. Variété des régions, renouvellement des méthodes, découverte d’un cadre géographique différent : le tour de France des Corruptions Socialistes s’annonce cette année sous les meilleures auspices avec une couverture nationale probablement complète. On attend les commentaires gourmands des têtes de listes socialistes lorsqu’il s’agira de se sortir d’un traquenard de plus en plus impossible à éviter puisqu’il semble être lancé par leurs propres troupes.
Bref, tout ce petit monde se bastonne assez vigoureusement, au point de vouloir se filer des claques, et, objectivement, c’est à la fois amusant et révélateur de l’éthique générale du parti, dans lequel, on ne le rappellera jamais assez, de joyeux larrons / lurons, comme Dominique Strauss Kahn, pouvaient fricoter avec la faune la plus interlope au vu et au su de tous dans la plus parfaite décontraction citoyenne et festive.
Bien évidemment, tout ceci fait les choux-gras d’un Front-National qui a pour le moment réussi à passer entre les gouttes.
Après tout, c’est logique : n’ayant jamais accédé au pouvoir, les cadres du parti frontiste n’ont jamais eu l’occasion de donner la pleine mesure de leurs talents de magouilleurs, ce qui leur permet d’affirmer sans sourciller qu’ils sont blancs (ou bleu-blanc-rouges, disons) et sans taches. De la même façon, toutes ces péripéties profitent directement à Bayrou, évidemment, même s’il est plus discret sur ce bénéfice collatéral.
Eh oui : tant la posture du Front National que la discrétion de Bayrou corroborent l’hypothèse que plus un parti est présent au pouvoir et plus il y reste longtemps, plus sa gestion devient calamiteuse pour le peuple et extrêmement bénéficiaire pour les apparatchiks qui en profitent à tous les étages.
C’est une évidence pour le Parti Officiellement Socialiste qui dispose, en gros, d’une grosse majorité de départements, de régions, de communes, et ce depuis un bon moment. C’est évidemment aussi vrai pour le parti présidentiel, par des moyens similaires en profondeur et en largeur. En gros, les détournements d’argent sont locaux ou régionaux pour le PS, et nationaux ou ministériels pour l’UMP. Ils ont mis le pays en coupe réglée et se le partagent habilement.
Et lorsqu’on regarde les chiffres officiels de financement des principaux partis, on découvre, ô stupeur, un tableau … parfaitement raccord avec ce que je viens de dire (cliquez pour agrandir le tableau):
Ces chiffres montrent de façon limpide l’implantation, l’enracinement des partis dans le portefeuille des Français. La colonne des financements publics est très éclairante puisqu’elle montre qu’un vieux parti comme le PCF, qui réalise des scores anémiques, reçoit aussi des sommes anémiques comparées aux deux partis majeurs. Mais lorsqu’on tient compte des financements totaux, on se rend compte que ce même parti, quasiment disparu du champ politique français, reçoit plus de la moitié de ce que reçoit au final l’UMP.
Et d’où vient tout ce miraculeux argent ? De la vente de muguet ? Que nenni ! C’est bel et bien de la contribution des élus. Là où ceux de l’UMP ramènent à peine deux millions, les élus communistes, eux, larguent plus de 16 millions (et plus que les élus socialistes). Rien que l’écart visible (un rapport de 1 à 9 entre l’UMP et le PC, en faveur du PC, diable !) laisse planer une légère consternation, ne trouvez-vous pas ?
(Ici, je vous laisse tirer vos propres conclusions avec les quelques pistes que j’ai jetées, c’est plus rigolo)
Mais avant de terminer, force est de constater que ce qui est vrai pour un parti l’est pour les syndicats qui bénéficient eux aussi des leviers du pouvoir, de moyens de pression conséquents et, de surcroît, d’une opacité complète de leurs comptes entretenue par la loi.
Ce qu’on « découvre » (oh, surprise) pour le Parti Socialiste, on est aussi en train de le discerner pour les syndicats, et en particulier celui qui est implanté à la fois partout en France et depuis fort longtemps, la CGT : le bouillon médiatique autour de la Mairie de Montreuil en dit ainsi fort long, tout comme celui autour du CE de la RATP.
Pas de doute : un pouvoir obtenu longtemps et sur une grande partie de la population implique normalement de grandes responsabilités qu’on est très en peine de voir dans ces partis et ces syndicats. Tout ceci mérite largement un Epic Fail en forme de citation, tiens.
(Un double fail pour une citation parfaitement adaptée)
Décidément, ce pays est foutu.