Décidément, les «monocouloirs» de Boeing et d’Airbus s’arrogent tous les titres de l’actualité. Après l’arrivée en fanfare des 737 MAX et A320 NEO, voici que l’avionneur européen célèbre un événement symbolique, la livraison de son 7.000e avion, un A321 destiné à US Airways.
Southwest Airlines ayant annoncé sa commande record de MAX au même moment, les deux informations se sont télescopées dans les salles de rédaction et ce numéro 7000 a bien failli passer inaperçu. Il mérite pourtant l’attention en même temps qu’il «interpelle» les grands anciens qui ont vécu les débuts difficiles du groupement d’intérêt économique Airbus Industrie et, notamment, sa première percée aux Etats-Unis.
Bernard Lathière, administrateur-gérant, non sans mal, avait convaincu l’ancien astronaute de la NASA Frank Borman, patron d’Eastern Airlines, d’exploiter à l’essai, gratuitement, quatre A300B. Un forcing commercial, en quelque sorte, Eastern étant une compagnie fragilisée, en manque de financement et pourtant confrontée à l’obligation économique de rajeunir sa flotte. L’opération conduisit finalement à une commande jugée décisive de 34 avions.
Tout cela est évidemment de l’histoire ancienne. Si ce n’est qu’il est intéressant de noter qu’aujourd’hui, c’est une compagnie américaine, US Airways, qui exploite la plus grande flotte d’Airbus au monde dont 220 monocouloirs de la famille A320. Douglas Parker, PDG de US Airways, qui n’a probablement jamais rencontré Frank Borman, connaît peut-être ses classiques. Le fait est, de toute manière, qu’il est visiblement heureux d’avoir été choisi, si l’on peut dire, comme récipiendaire du 7.000e Airbus, un A321 qui vient de lui être remis à Hambourg.
A cette occasion, l’avionneur européen rappelle qu’il avait livré son millième avion, un A340-300 destiné à Air France, 19 ans après la livraison de son tout premier appareil, un A300B. Dix-neuf ans, à comparer à plus de 500 avions annuels, au rythme actuel, et bientôt plus. Visiblement, tout le monde est heureux de ce résultat, Douglas Parker n’ayant pas hésité à affirmer : «nous sommes impatients de poursuivre ce partenariat réussi».
Quitte à verser bien involontairement dans le publi-reportage, façon Le Figaro, on notera que cet A321 est très exactement le 4.903e appareil de la lignée A320 à sortir des chaînes, sur les 8.251 vendus depuis le lancement du programme en 1984.
Le millième Airbus est enfoui bien loin dans la mémoire collective, sachant que les commandes, tous types confondus, totalisent actuellement 11.438 avions, hors productions militaires Airbus/EADS, A400M, MRTT, etc.
La négociation avec Eastern, audacieuse, novatrice, s’inscrivait dans un contexte qui relevait encore d’une époque historique et fleurait bon le savoir-faire très personnel des pionniers. Aujourd’hui, dans un environnement «mondial» qui n’a plus rien à voir avec ces débuts héroïques, Airbus vend des avions «éco-efficients» (sic). Du temps de Lathière, les arguments commerciaux étaient novateurs mais, aujourd’hui, ils font appel à de bien curieux néologismes. Peu importe, finalement, seul compte le résultat.
Pierre Sparaco - AeroMorning