Ici, nulle critique acerbe, pas d'analyse sociologique, mais au contraire une succession de saynètes toutes plus jubilatoires les unes que les autres, le seul lien entre elles étant constitué par les mésaventures pouvant tomber sur la figure d'un adepte des sports d'hiver en vacances à la neige. Comique de situation, dialogues hilarants, répliques s'ancrant instantanément dans la mémoire collective ("tu m'aide pas là ? " "pas là non"), ou individuelle ("y'avait blumaise, en 8 lettres"): la mécanique du film possède un rythme qui ne faiblit jamais, et qui ne permet en aucune manière à la lassitude de s'installer (même après des dizaines et des dizaines de visionnages, le long-métrage conserve son efficacité intacte).
Parfaitement rodés au mécanisme comique d'un scénario, Michel Blanc, Gérard Jugnot, Josiane Balasko et leurs comparses savent pertinemment que sans situation dramatique, le comique ne fonctionne pas, ou fonctionne mal. Ainsi, les rires provoqués par le personnage de Jean-Claude Dusse trouvent leur substrat dans son incapacité à rencontrer l'âme soeur et dans ses démarches opiniâtres pour ne plus être seul. De même, Popeye, sous ses apparences de playboy des neiges, est un être profondément blessé (voir à ce titre la scène de la voiture dans laquelle il se confie à son ami vétérinaire incarné par Christian Clavier). Le personnage de Christiane, lui aussi, souffre d'un manque d'amour évident et ne trouve refuge que dans les bras d'un homme marié plus vieux qu'elle. Les exemples sont ainsi multiples et débouchent tous sur des situations plus drôles les unes que les autres, que l'on revoit à l'envi et à l'infini avec le même plaisir.
Notons également la mise en scène de Patrice Leconte, alors jeune réalisateur, exempte de tout parti pris visuel marquant, laissant avant tout la place aux personnages et aux situations. L'expérience du réalisateur lui permettra cependant dans Les bronzés 3 de proposer une mise en scène plus personnelle tout en ne perdant jamais ses personnages de vue. Son parcours et son expérience entre les deux films étaient vraisemblablement nécessaires à cette évolution de style (déjà amorcée dans le sous-estimé Tango).
Les bronzés font du ski constituent sans aucun doute possible ma comédie préférée, celle dans laquelle je me replonge régulièrement avec le plus de plaisir, connaissant dialogues et situations par coeur (les Italiens, la fondue, le télésiège), sachant pertinemment que cette connaissance du film est partagée par un nombre incalculable de personnes. Ou l'exemple parfait que le cinéma constitue une expérience individuelle collective.