Il va falloir que j'accélère le rythme si je veux finir de publier ma série de chroniques avant la fin de l'année. Le problème, c'est que lorsque je redécouvre un live du NET, j'ai tendance à me plonger dedans du début à la fin. Alors forcément, je suis pas très efficace. Attaquons donc sans plus tard ce nouveau millénaire où Bob joue les architectes sur scène et pond un nouvel album rétro dont la richesse n'a pas fini d'étonner (après l'avoir boudé pendant un moment, je l'ai écouté en boucle chaque jour de l'été avec un plaisir sans cesse renouvelé). La mort de sa chère mère ou les attaques du 11 septembre ne semblent pas en tout cas capables de l'arrêter et même si la voix prend un bon coup de vieux lors de cette période, elle n'a pas dit son dernier mot...
Comme d'habitude, pour les liens des concerts, il suffit de demander ! Quand à ceux qui débarquent, sachez que "NET", ce sont les initials du "Never Ending Tour". Bon, faut suivre un peu !
151) NET #1290 / "Budokan", Tokyo - Japon [14 Mars 2001] Contenu : On est loin du Budokan '78, mais l'intention y est. Et si c'est moins accessible pour les amateurs, les avertis y trouveront de quoi taper du pied et s'émouvoir. Comme c'est souvent le cas depuis 1997, les meilleurs moments sont extraits de "Time Out Of Mind" et des reprises (ici, "Duncan & Brady" qui ouvre le show). Et le "M. Tambourine Man" acoustique avec harmonica est un beau cadeau offert aux fans japonais tout comme le rare et amusant "If Dogs Run Free". Highlights : "M. Tambourine Man", "Duncan & Brady", "Tryin' To Get To Heaven"
Son : 8/10.
152) NET #1309 / Asheville - Caroline du Nord, USA [1er Mai 2001] Contenu : Après un solide détour en Australie, retour au pays. Une playlist parfaite, un son sublime, le retour inattendu de "Where Teardrops Fall" (pas entendu depuis 1996) et une partie acoustique toujours aussi maîtrisée. Highlights : "Visions of Johanna", "Standing In The Doorway", "Where Teardrops Fall"
Son : 9/10.
153) NET #1326 / Stirling - Ecosse [13 Juillet 2001] Contenu : Un vendredi 13 dans une château en Ecosse sous la pluie avec un vieux troubadour, son harmonica hanté et son groupe démoniaque. Une putain de performance dans un lieu insolite, parfaitement capturé. Et vous pouvez revivre l'évènement en boucle sans bouger de votre fauteuil et en ayant, vous aussi, quelques frissons. Highlights : "All Along the Watchtower", "Don't Think Twice", "Not Dark Yet"
Son : 8,5/10.
154) NET #1349 / Spokane - Washington, USA [5 Octobre 2001] Contenu : C'est à l'automne que la tournée 2001 mérite toute votre attention. D'abord, parce que le répertoire de "Love & Theft" rejoint avec grand fracas la playlist, ensuite parce que de nouvelles reprises de toute beauté font leur entrée ("Waiting For The Light To Shine", ici). Beaucoup ont du mal avec "Tweedle Dee & Tweedle Dum", moi je trouve que son rythme de cavalcade et son texte malicieux en font une chouette addition au NET (même s'il est vrai qu'elle sera un peu trop omniprésente durant la décennie). La jouant pour la première, Dylan se prend un peu les pieds dans sa récitation, mais le coeur y est et le groupe assure derrière (Charlie Sexton est toujours de la partie et ça s'entend). Encore un peu hésitants, ces nouveaux morceaux n'atteignent pas encore les sommets d'un "Blind Willie McTell" bluffant ou d'un "Desolation Row" solide comme il faut. Mais tout comme "Love & Theft", c'est un nouveau départ, enthousiasmant dans un monde en plein bouleversement. Highlights : "Desolation Row", "Blind Willie McTell", "Tomorrow Is A Long Time"
Son : 8,5/10.
155) NET #1378 / Philadelphie - Pennsylvanie [17 Novembre 2001] Contenu : Malgré une voix de plus en plus difficile à maîtriser, Dylan a toujours autant d'aisance à jouer avec ses mots et à donner une nouvelle vie à ses morceaux. C'est particulièrement bluffant avec ce show où tout s'enchaîne à toute vitesse, avec un rythme dément et une ambiance décontractée. Si l'on met de côté un "Forever Young" un peu trop grandiloquent à mon gout (mais ça a toujours été le problème de ce morceau), Dylan se balade avec entrain d'un paysage à un autre, des les collines dévastés de "Hard Rain" à l'apocalypse nonchalante de "Things Have Changed" qu'il déclame comme un vieux crooner malicieux. Mais rien n'égale un "John Brown" raconté doucement et un "Sugar Baby" une fois de plus en apesanteur. Le Zim renouvellera l'essai quelques soirs plus tard au Madison Square Garden mais rien que pour la setlist et la cohérence, je vous conseille cette nuit à Philadelphie. Highlights : "John Brown", "Waiting For The Light To Shine", "Sugar Baby"
Son : 8/10.
156) NET #1386 / Tampa - Floride, USA [2 Février 2002] Contenu : 2002 sera l'année du piano et surtout, des morceaux acoustiques sublimes. Et ça débute fort avec un "Blowin' In The Wind" qui n'avait plus sonné de manière aussi poignante depuis bien longtemps. L'harmonica est encore très présent et illumine "Boots of Spanish Leather". Et la foule s'enflamme lorsque Dickie Betts (membre fondateur des Allman Brothers) s'invite pour un putain de solo sur "Rainy Day Women". Bref, l'année débute sur les chapeaux de roues.
Highlights : "Blowin' In The Wind", "Boots Of Spanish Leather", "Rainy Day Women #12&35".
Son : 8/10.
157) NET #1420 / Paris [29 Avril 2002]
Contenu : Un son superbe qui vous replonge directement dans l'ambiance de ce concert parisien au Zénith. Avec Jim Keltner qui a repris la batterie, le groupe est en grande forme et Dylan se déplace avec grâce et détermination tout au long d'une setlist impeccable. "Love & Theft" domine encore la partie et cette fois, les morceaux sont solides, comme le prouve un "Honest With Me" d'enfer, où Charlie s'en donne à coeur joie. Armé d'une cistre (instrument datant de la Renaissance), Larry sublime la partie acoustique. Si vous y étiez, n'hésitez pas à venir en parler. Je n'y étais pas mais l'écouter est un régal du début à la fin.
Highlights : "Hummingbird", "She Belongs To Me", "Cold Irons Bound"
Son : 9/10.
158) "Masked And Anonymous Sessions" [16 Juillet 2002]
Contenu : Un concert filmé et enregistré pour la bande-son de "Masked & Anonymous", film énigmatique de Larry Charles où le Zim tient le premier rôle. Toujours aussi troublant face à une caméra, complètement déconnecté du monde des mortels, Dylan livre dans ce film une non-performance assez hypnotique à regarder et le film se savoure comme un OVNI apocalyptique truffé de bons comédiens et de scènes folles. Pour ce qui est de la musique, on retrouve le groupe habituel pour onze titres interpretés solidement, dont le rare "Dirt Road Blues" et les reprises "Amazing Grace", "Diamond Joe" et "Dixies". On aurait préféré l'intégrale de cette partie de plaisir aux reprises internationales bancales distillés sur le soundtrack officielle. Mais bon, c'est trouvable sur la toile, donc j'arrête de bouder.
Highlights : "Dirt Road Blues", "I'll Remember You (meilleure que l'originale)", "Cold Irons Bound"
Son : 10/10.
159) NET #1432 / Newport Festival [3 Août 2002]
Contenu : Comme on a pu le voir précédemment, les passages de Dylan au Newport Festival ne sont pas passés inaperçus entre 63 et 65, où il a marqué l'histoire de la musique américaine brutalement. Depuis, les choses ont changés, et histoire que ce retour ne soit pas un concert comme un autre, Dylan s'affuble d'extensions capillaires et d'une fausse barbe qui ont également marqués les esprits (c'était pour les besoins de "Masked & Anonymous", il me semble). À part ça, c'est comme d'habitude : les rocks sont entraînants, les morceaux acoustiques sublimes et on trouve d'excellents enregistrements. Trente sept ans plus tard, Dylan n'a pas perdu de son mordant.
Highlights : "The Wicked Messenger", "Girl Of The North Country", "You Ain't Goin' Nowhere"
Son : 9/10.
160) NET #1456 / Red Bluff - Californie, USA [7 Octobre 2002]
Contenu : L'automne 2002 est plus connu sous le nom du "Piano Tour". En effet, bien avant de malmener son synthé pour le correct comme pour le pire, Dylan pianote ici avec délicatesse et maîtrise. Concentré, il chante de manière concernée et ajoute des couplets supplémentaires à ces vieux morceaux, reprenant également un morceau de son ami Warren Zevon, atteint d'un cancer. De son côté, Larry, il alterne tous ses instruments : slide guitar, cistre, pedal steel, violon, formant un habillage soyeux qui apporte un charme supplémentaire à l'ensemble. Quand à Charlie, il se lâche sur "Tombstone Blues" ou la reprise improbable du "Brown Sugar" des Stones. Probablement le meilleur show de 2002 et clairement le mieux enregistré. Highlights : "You're A Big Girl, Now", "Tombstone Blues (formidable piano)", "High Water"
Son : 9,5/10.
161) NET #1490 / Fairfax - Virginie, USA [22 Novembre 2002]
Contenu : Les passionnés du NET décrivent parfois ce show comme un concert de fin du monde, un tour de chant juste avant l'apocalypse. Dernier concert de la tournée, dernier concert pour Charlie (qui veut passer plus de temps avec sa famille mais finira par revenir huit ans plus tard), hommage à Warren Zevon qui vit ses dernières heures et surtout, incroyable jam-session sur "Summer Days". Les témoins disent que chaque membre du groupe, dont Dylan, se sont allongés sur scène pour triturer leurs instruments le plus fort possible. L'enregistrement est plutôt fidèle à cette ambiance déchaîné. Et tout se termine sur un "Blowin'in the Wind" somptueux et un "All Along the Watchtower" qui annonce la fin des temps. Même le "Old Man" de Neil Young est de la partie. Incroyable, c'est à entendre absolument.
Highlights : "Summer Days (huit minutes de jam !)", "Accidentaly Like A Martyr", "All Along the Watchtower"
Son : 8/10.
162) NET #1554 / Syracuse - New York, USA [22 Août 2003]
Contenu : Mais le monde ne s'arrête pas et Dylan reprend la route, inusable. Avance rapide jusqu'à l'été 2003 où on le retrouve à New York en grande forme, malgré une voix de plus en plus malmenée. Le français Freddie Koella a repris la guitare et s'en sort plutôt bien, épaulé par un certain Tommy Morrongiello. Malgré un son qui sonne parfois un peu le renfermé, j'écoute cet enregistrement avec plaisir, parce que la setlist est formidable et que le tout tient la route du début à la fin. Avec comme souvent, des frissons supplémentaires sur "Senor" et "This Wheel's On Fire", quasiment construit sur la même structure et qui glacent le sang à tous les coups, la première avec l'harmonica, la seconde avec un solo de guitare féroce. Comparé à d'autres concerts précédents où Dylan s'épuise plus rapidement, il garde ici sa barque à flots.
Highlights : "Senor (Tales Of Yankee Power)", "Dignity", "This Wheel's On Fire"
Son : 7/10.
163) NET #1564 / Berlin [20 Octobre 2003]
Contenu : Avec ses nouvelles couleurs plus sombres, la voix de Dylan peut encore émerveiller. On peut y être allergique certes, et ça ne fera qu'empirer au fil des années. Mais j'aime la manière dont il se bat pour tenir la mélodie ou bien se lance dans un chanté/parlé qui fait la part belle à certaines tournures de phrases et fonctionne à merveille sur certains morceaux, comme un "Desolation Row" particulièrement réussi. Le concert de Berlin est bien enregistré et offre un bon aperçu de 2003, où Dylan se repose plus que jamais sur l'architecture de ses morceaux et reçoit toute la bonne volonté d'un groupe toujours aussi solide. En plus, le piano est toujours de la partie et l'harmonica est beau sur "Love Minus Zero" et "Every Grain Of Sand".
Highlights : "Desolation Row", "Things Have Changed", "Every Grain Of Sand"
Son : 8,5/10.
164) NET #1586-1588 / Londres [23-25 Novembre 2003]
Contenu : Loin d'être les mieux enregistrés ou les plus solides de l'année, ces trois show londoniens sont pourtant les plus mémorables. Comme c'est souvent le cas lors des derniers concerts de l'année ou des résidences, Dylan sort clairement de la routine. C'est un miracle pour ceux qui attendent impatiemment les multiples surprises que peuvent offrir une setlist du NET : "Jokerman" pas joué depuis des lustres et remaniée avec enthousiasme, "Romance in Durango" qu'on aurait jamais espéré revoir depuis la Rolling Thunder et qui tient la route, gardant tout son charme gitan, "Dear Landlord" avec un piano sublime" ainsi que de vieux trésors extraits des "Basement Tapes"... Certains ont dû sauter de joie dans la salle. Et même si la voix dont je parlais plus haut vous a convaincu d'arrêter le NET en 2002, ne boudez pas votre plaisir car Dylan crache ici les mots avec conviction et vigueur. Je vous conseille le concert du 24 novembre, celui qui sonne le mieux.
Highlights : "Jokerman", "Romance in Durango", "Dear Landlord"
Son : Entre 7 et 8/10.
165) NET #1604 / Toronto [20 Mars 2004]
Contenu : Et 2004 marque un point de non-retour pour la voix. C'est bien simple, on a l'impression que Dylan avale des rasoirs pendant toute sa performance. Mais si la première approche est difficile, on y trouve un véritable plaisir ensuite, un peu comme si on habituait ses oreilles aux subtilités du jazz (j'en sais rien, je connais mieux la voix du vieux Dylan que le jazz). À partir de maintenant, se rendre à un concert du Zim, c'est trembler au son de ses raclements de gorge et faire abstraction de toutes les critiques idiotes du genre "ça ressemble pas à la version studio donc c'est naze" ou "pourquoi il a un groupe ?" (inchangés depuis 1965 au final). Alors savourez ce chouette concert à Toronto, bien enregistré, où Dylan fait chanter le public sur "Just Like A Woman" et met le feu sur "Cold Irons Bound" et "Million Miles", usant avec toujours autant de réussite de son harmonica virevoltant. De plus, le piano n'a pas disparu et l'ambiance bluesy sied bien à son organe déchiré.
Highlights : "Million Miles", "Cold Irons Bound", "Positively 4th Street"
Son : 8/10.
166) NET #1643 / Motril - Espagne [10 Juillet 2004]
Contenu : Dans ses meilleurs moments, Dylan sonne quand même aussi bien qu'en studio. Et dans ces cas-là, c'est merveilleux. Surtout quand le groupe est aussi inspiré (Stu Kimball est une excellente addition) et que l'enregistrement est de cette qualité. Les guitares étincellent sur le sous-estimé "Tweedle Dum & Tweedle Dee", et offrent un nouvel arrangement superbe pour "Positively 4th Street". "Hard Rain" risque de vous étonner et "Not Dark Yet" n'a pas perdu de son émotion. Pas une minute de trop pour ce show où, lors d'une chaleureuse nuit espagnole, tout est sous contrôle.
Highlights : "Tweedle Dum & Tweedle Dee", "Positively 4th Street", "Not Dark Yet"
Son : 9/10.
167) NET #1649 / Poughkeepsie - New York, USA [4 Août 2004]
Contenu : Plutôt que de tout miser sur l'acoustique et la douce intimité, Dylan profite de ce concert face à 700 personnes dans un club bondé pour enflammer les lieux. C'est brute de décoffrage, survolté, Dylan crache comme une vieille bagnole à fond sur l'autoroute, joue de l'harmonica d'une main et du piano de l'autre, et on imagine le public en sueur qui grimpe aux murs pour s'échapper de ce joyeux carnage. Du bon vieux rock'n'roll comme on en fait plus, à écouter très fort sous la canicule.
Highlights : "The Wicked Messenger", "High Water", "Ballad Of A Thin Man"
Son : 8/10.
168) NET #1693 / Rochester - New York, USA [13 Novembre 2004]
Contenu : Si vous ne devez écouter qu'un seul concert datant de 2004, je vous recommande chaudement celui-ci où la voix est plus claire, plus expressive, où le groupe se déchaîne, où l'harmonica et le piano font de "Visions of Johanna" une version d'anthologie et où le son est impeccable. "Ballad of Hollis Brown" sonne comme "Highwater" et Dylan développe avec talent son parler-chanter qui lui permet de zizgaguer avec aisance entre chaque morceaux. Ou de gueuler le blues des jours solitaires avec un punch surprenant.
Highlights : "Visions of Johanna", "Lonesome Day Blues", "Dignity", "Ballad of Hollis Brown"
Son : 9/10.
169) US Fall College Tour [Octobre-Novembre 2004]
Contenu : Et l'année se termine par une nouvelle tournée des universités, de Berkeley à Harvard, où les étudiants s'enflamment au son de la voix du maître et de son orchestre bluesy, revisitant classiques et raretés, à la conquête d'un public qui sans cesse se renouvelle. Plusieurs compilations existent et valent le détour malgré un son à la qualité aléatoire. C'est également un best-of de blagues qui prouve que le Zim est heureux d'être là.
Highlights : "Ballad of A Thin Man", "Blind Willie McTell", "I'll Remember You", etc...
Son : Entre 6 et 8/10.
La suite très bientôt. Si Dylan ne sonnera plus jamais comme avant et que ses performances seront plus controversés et moins solides durant la deuxième moitié de décennie, il a encore beaucoup à nous offrir, que ce soit en studio ou sur scène...