Condat.
Fiche signalétique: papetier. Usine créée en 1907, implantée à Condat (Dordogne)
800 emplois directs (premier employeur privé du département)
Chiffre d’affaires 2007: 382 millions d’euros
Filiale du groupe Lecta, deuxième producteur européen de papier couché
Un grand consommateur d'énergie.
Située entre Périgueux et Brive, l'usine Condat consomme chaque année plus de 350 GWh, l'équivalent d'une ville de 60.000 habitants. A cela s'ajoute Condat, une consommation d'environ 750 GWh de vapeur par an. L'usine dispose d’une unité de cogénération avec une puissance électrique de 100 Mégawatts. Cette unité fonctionne 5 mois par an, l'hiver, dans le cadre d’un contrat d’obligation d’achat où l’électricité est rachetée par EDF à un prix bonifié.
Un réseau sous-dimensionné?
Le hic, c'est que l'usine subit de nombreuses perturbations, émanant du réseau d'alimentation électrique de RTE (réseau de transport). Chaque coup de foudre dégrade ce qui n'est plus du tout une histoire d'amour entre RTE et Condat: "Notre éloignement de la source de production se traduit par une perte d'énergie, déplore Frédéric de Agostini, directeur de l'usine de Condat. A cela s'ajoute l'impact de la foudre qui, l'été, perturbe gravement le réseau. En 2007, nous avons relevé 102 incidents..."
Perturbations relevées en 2007: à droite (abscisses), la "force" des creux de tension, à gauche (ordonnées) leur durée. Les points bleus signalent des incidents perturbant la production, les points rouges des incidents nécessitant un arrêt de la production. L'encadré en haut à gauche situe la zone à partir de laquelle la responsabilité de RTE est engagée.
La sanction, pour l'usine, est immédiate: "au mieux, la production est interrompue pendant deux heures". Car ces perturbations "bloquent partiellement ou totalement la production de papier et endommagent les machines". Il y a parfois pire: "le 11 janvier 2006, il a fallu plus de 24 heures pour que RTE rétablisse l'électricité! Et, lorsque les incidents ont lieu la nuit, au bout du fil, chez RTE, il n'y a personne."
A Condat, on estime le préjudice entre 600.000 et 1 millions d'euros par an, dont 300.000 euros liés au "vieillissement prématuré des matériels électroniques". La pilule est d'autant plus amère que l'usine a investi 3 millions d'euros ces dernières années pour améliorer son installation électrique. Et que son réseau interne, à la suite d'un audit mené par Schneider, a été considéré comme "performant". Pour Frédéric de Agostini, la problème est ailleurs, dans le "sous dimensionnement du Réseau de Transport d'Électricité (RTE) en Dordogne."
Ce que RTE ne veut pas entendre. Interrogé par l'AFP, le responsable de la région sud-ouest de RTE, Denis Hoffmann, a indiqué que les "petites imperfections" subies par Condat résultent "du fonctionnement normal du réseau".
La fracture électrique
Compte-tenu de la taille de l'usine, le cas de Condat est exceptionnel, même s'il existe, selon Frédéric de Agostini, une dizaine d'autres entreprises dans le même cas. Mais c'est aussi ce que vivent, à une échelle évidemment moindre, de petites entreprises raccordées au réseau de distribution en milieu rural. Jean-Pierre Dessaix, directeur du Syndicat départemental d’énergie de la Dordogne (SDE 24), observait ainsi que "ce que vit Condat, c'est ce que subissent régulièrement les petites PME de Dordogne".
Victimes de la "fracture électrique".
On suivra donc avec intérêt la suite donnée à la plainte que Condat, soutenu par le conseil général, s'appête à déposer devant le Cordis (Comité de règlement des différends et des sanctions) piloté par la Commission de régulation de l'énergie (CRE). C'est en effet la première fois première fois qu'un client soumet à la CRE un problème d'alimentation lié à un refus d'investir sur le réseau électrique.