VENDETTA, de R.J ELLORY

Par Geybuss

Thriller - Editions livre de Poche (Sonatines) - 763 pages -8.00 €

Parution en poche en septembre 2010

L'histoire : En Louisiane, la fille du gouverneur est enlevée et son garde du corps retrouvé mort, atrocement mutilé. Alors que l'enquête piétine, un homme appelle le FBI. Il se prénomme Perez et promet de tout dire à condition qu'il puisse s'adresser à Ray Hartmann, un enquêteur d'Etat de New York...

Celui ci se retrouve contraint à retourner à la Nouvelle Orléans.... Et à écouter Perez qui lui raconte sa vie, étape par étape. Seulement, et seulement lorsqu'il aura terminé, Perez donnera l'adresse où il retient la fille prisonnière.

Mais Perez n'est pas un homme comme les autres. Toute sa vie, il a été tueur à gage pour la mafia...

Le temps presse et Perez semble prendre tout son temps... Une guerre des nerfs pour nos agents du FBI et pour le lecteur !

Tentation : Mon coup de coeur pour Seul le silence du même auteur

Fournisseur : Ma PAL !

Mon humble avis : ( vendetta = vengeance en Italien) Ellory confirme ici sa maestria du récit. Car même si Vendetta comporte certains éléments que je n'aime pas trouver dans un roman, il faut bien avouer que j'ai été agrippée par  ce livre à l'atmosphère étouffante et au suspens implacable.

Ma relative aversion pour les pavés commence à être connue de tous.... je fais une ou deux exceptions dans l'année, Vendetta en est une. Et pourtant, je maintiens.... Pourquoi autant de pages ? Franchement, 200 pages de moins n'aurait pas nuit à mon intérêt, au contraire, j'aurais alors octroyé  à ce livre les 4 étoiles que son sujet mérite. Mais je me suis souvent lassée des états d'âmes conjugaux très redondants de notre agent Hartmann et des inquiétudes familiales de notre mafieu Perez, toutes aussi répétitives, même dans les mots choisis pour en parler. A mes yeux, c'est le premier bémol de ce livre.

Un 2ème bémol pour la route.... La profusion des personnages, tant dans les forces de l'ordre que du côté de la mafia, qui m'ont un peu perdu et fait survoler quelques passages qui ressemblent à un listing de ne noms et de titres mafieux. Certes, Ellory voulait écrire un roman sur la mafia et, manisfestement, il s'est excessivement bien documenté et maîtrise son sujet à la perfection... Mais l'aspect documenté est parfois trop visible.

Mais mais.... Vous lirez ce livre car malgré mes bémols, Vendetta est un monument ! Tout d'abord, les atmosphères....

Celle de la Nouvelles Orléans, de la Havane, de Chicago, de Miami, de New York... et même du bureau où Hartmann reçoit les confessions de Perez : on y est. On transpire à cause du climat, on tousse à chaque cigarette allumée, on perçoit les cris du carnaval, on  grelotte dans les rues de Chicago et malgré cela, à chaque page, c'est une certaine touffeur qui règne.

Ce roman vous fait traverser un demi siècle.... de l'histoire des Etats Unis et de Cuba. Où l'on voit Castro se saisir du pouvoir peu à peu, Kennedy se faire assassiner, Nixon avoir quelques aqua soucis... Et Ellory qui y va de ses hypothèses... Et si la mafia n'était pas loin de tout  cela ?

Vendetta est bien sûr une plongée dans le monde de la mafia, est même si cet univers est à l'opposé de notre culture, de nos valeurs, il s'immisce en nous comme une fascination. Surtout que le mot mafia est très peu usité dans le livre, remplacé bien sûr par le mot " La famille", et la Cosa Nostra (cette chose qui est la nôtre). Et Ellory est assez fort pour ne pas juger et nous amener à nous interroger. Car franchement, au cours de ma lecture, je me suis demandée si ces hommes autant craints qu'admirés, qui justifient tout par une loyauté sans faille à La Famille, ne sont pas pour la plupart des moutons sans cervelle, qui suivent un mouvement bien encadré.... Ou bien des hommes morts de trouilles à l'idée de s'affranchir d'une famille enfermante (il y a d'ailleurs je pense dans cette notion de famille mafieuse un parallèle possible avec les effets d'une famille lambda disséquée dans tout cabinet de psy !)

Même Perez, ce tueur à gage qui nous raconte parfois dans le détail tous les crimes qu'il a commis, on ne sait pas si on finit par l'admirer (pour son sang froid, sa culture et "sa présence", si on doit le plaindre ou le détester... Mais finalement, un attachement apparait parfois pour disparaitre plus tard. Rien n'est figé, rien n'est immuable. Et c'est une sensation de lecteur très intéressante.... Ne pas savoir ce que l'on ressent pour un personnage, gênés que nous sommes par nos valeurs...

Enfin, the last but not the least, un final grandiose, inattendu, même si un peu aidé par une relative incompétence du FBI qui a bien arrangé notre auteur..... Mais dans les 20 dernières pages, vous réaliserez qu'Ellory vous a baladés pendant les 740 premières. Un coup de bluff génial. Chapeau l'artiste ! Une Vendetta sacrément subtile !

"Le recul est un outil extraordinairement efficace pour déterminer le bien-fondé d'une décision, malheureusement, il est alors toujours trop tard"... "Ce qui est parfait à un moment précis ne le sera pas nécéssairement 5 minutes plus tard. Il y a toujours la variable ultime : Les gens."

"Malgré tout ce qu'il avait fait, Perez n'avait jamais prétendu être autre chose que lui même"

"L'âge est un juge et une cour et un jury. Vous vous tenez face à vous même et vous voyez votre vie comme si elle était une pièce à conviction dans un procès. Vous vous interrogez, vous vous posez des questions et attendez des réponses et quand vous avez fini, vous délivrez votre verdict".

"Le recul est lui aussi un juge, mais il est biaisé et ne montre pas les choses telles qu'elles étaient sur le moment. C'est un paradoxe"

L'année dernière, R.J Ellory a eu l'extrême gentillesse de répondre à mes questions

ICI en VO et LA en VF