Quelle posture adopter au lendemain d’une réélection, à l’évidence frauduleuse, de Joseph Kabila, qui menace de plonger l’ex-Zaïre dans le chaos? Un vrai casse-tête.
Ce constat s’apparente à un aveu d’impuissance. Formulé quelques heures avant l’annonce, ce vendredi, de la “victoire” du sortant Joseph Kabila -crédité de près de 49% des voix contre un peu plus de 32% à son principal rival Etienne Tshisekedi-, il émane d’un acteur-clé de la politique africaine de la France. Que dit-il? Ceci: “Ce scrutin a été à l’évidence entaché par de multiples travers, dont la fraude. Mais nul n’est en mesure d’apporter la preuve que ces sérieux écueils ont inversé le verdict des urnes. L’affirmer, c’est conforter l’opposition dans son intransigeance, voire encourir le reproche d’encourager la violence. Si, à l’inverse, nous avalisons le dénouement officiel, on nous fera le procès de rouler pourKabila. En clair, nous avons le choix entre deux mauvaises options.” Comment sortir d’un tel dilemme? “Tout dépendra de l’attitude de Tshisekedi [lequel s'est proclamé entretemps 'président élu de la République démocratique du Congo', revendiquant 54% des suffrages]: jusqu’où ira-t-il? Mais aussi du comportement de l’armée et de la police vis-à-vis de ses partisans, selon qu’elles tirent dans le tas, au risque de déclencher une réaction en chaîne incontrôlable, ou qu’elles se montrent relativement permissives. Un autre facteur pèsera: la réaction des géants du continent, l’Angola, l’Afrique du Sud, la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC), l’Union africaine. L’impression dominante à ce stade, c’est qu’aux yeux de la plupart des dirigeants influents, la reconduction de Joseph Kabila est plus à même de prévenir le chaos et de préserver une forme de stabilité. En revanche, s’il y a des manifs monstres, des militants tués par dizaines et un pouvoir qui vacille, ni ces pays ni ces institutions ne pourront rester inertes.”
Il y a donc fort à parier que Paris, à l’instar d’autres partenaires occidentaux de Kinshasa, s’en tiendra à une ligne minimaliste: marquer ses distances envers un processus électoral calamiteux, s’abstenir de tout jugement formel quant à la validité du résultat, appeler chacun au “calme” et à la “retenue”, inviter les forces de l’ordre à la “modération” et les leaders au “respect de l’Etat de droit”. Un peu comme s’il existait, dans l’ex-Zaïre, un Etat et une justice.
Par Vincent Hugeux
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