Un accord à minima semble se profiler au Conseil européen, qui ne répondra pourtant en rien à la crise actuelle que connaît l'Europe. En effet, il s'agira d'un accord intergouvernemental - imposé par la France et l'Allemagne - engageant les 17 États-membres de la zone euro et quelques volontaires kamikazes. La Grande-Bretagne ne désire au reste pas en faire partie afin de préserver la compétitivité de la City... Prévisible, mais ô combien hors sujet dans la crise actuelle, car la Grande-Bretagne n'a pas l'euro et a clairement fait comprendre qu'elle n'a aucune vocation à l'avoir !
Même si je suis tout à fait d'accord avec l'idée qu'il ne faut pas dispenser un État des règles qui s'imposent aux autres, je trouve tout de même que Nicolas Sarkozy oublie un peu vite le passé lorsqu'il affirme qu'il eût été inacceptable "d'exonerer le Royaume-Uni d'un certain nombre de réglementations sur les services financiers". Quelqu'un pourrait-il en effet lui rappeler les nombreuses concessions faites à Thatcher et à ses successeurs tant sur le plan politique, qu'économique et social ? Quant à l'envolée lyrique sur l'indispensable régulation financière, il me semble qu'on l'attend toujours tant sur le marché des CDS et des titres d'États, que sur les autres marchés financiers...
L'Allemagne a évidemment obtenu ce qu'elle voulait : le renforcement de la discipline budgétaire, qu'elle n'a pourtant cessé de bafouer avec la France depuis de nombreuses années (Cf. pacte de stabilité...). Il s'agit encore une fois du mauvais diagnostic (dette publique, quand tu nous tiens...), ce qui nous conduira toujours plus loin dans les mauvais remèdes et donc vers le précipice ! Désormais, on évoque des sanctions automatiques en cas de non respect des critères avec contentieux devant la Cour de justice ! Néanmoins, Valérie Pécresse a cru bon de déclarer "Je crois qu'on a vraiment très fortement renforcé l'euro, parce qu'il y a une solidarité de la zone euro qui s'exercera, parce que la BCE sera un outil très puissant de cette solidarité, parce que nous avons affirmé la volonté de tous les Etats d'aller vers la discipline budgétaire, vers la règle d'or, vers le redressement des finances publiques".
Alors là, on croit rêver ! Quelle solidarité peut-il bien y avoir au sein d'une zone où 0200:fr:PDF">l'article 125 du TFUE (clause de no-bail out) condamne tout transfert budgétaire permettant de renflouer
un État en difficulté ? Les termes du traité sont du reste sans ambiguïté aucune :
"L'Union ne répond pas des engagements des administrations centrales, des autorités régionales ou locales, des autres autorités publiques ou d'autres organismes
ou entreprises publics d'un État membre, ni ne les prend à sa charge, sans préjudice des garanties financières mutuelles pour la réalisation en commun d'un projet spécifique. Un État membre ne
répond pas des engagements des administrations centrales, des autorités régionales ou locales, des autres autorités publiques ou d'autres organismes ou entreprises publics d'un autre État membre,
ni ne les prend à sa charge, sans préjudice des garanties financières mutuelles pour la réalisation en commun d'un projet spécifique".
La BCE est donc censé devenir un "outil très puissant de cette solidarité" ? Certes, la Banque centrale européenne (BCE) sera probablement chargée de gérer le FESF et le futur Mécanisme européen de stabilité (MES, qui aura une capacité de prêts de 500 milliards d'euros), mais elle n'assumera pas le rôle de prêteur en dernier ressort que l'on serait en droit d'attendre d'elle pour calmer la crise. Mario Draghi, son président, l'a clairement laissé entendre lorsqu'il a annoncé la baisse du principal taux directeur de l'institution à 1 % et une série de mesures pour assurer aux banques de la zone euro un accès aux liquidités qui font tant défaut actuellement.
Quant à ceux qui espéraient voir le FESF ou le futur MES endosser ce rôle à la place de la BCE, ils peuvent se réveiller de leur doux rêve. D'une part le FESF ne reste dispose plus guère que de 250 milliards en raison des sommes engagées pour le Portugal, l'Irlande et la Grèce, et l'utilisation d'un effet de levier qui permettrait de lever 1 000 milliards d'euros au moins s'est évanoui (on table plutôt sur une somme comprise entre 600 et 700 milliards d'euros). D'autre part, même si les dirigeants européens ont décidé d'avancer l'entrée en activité du MES d'un an, peut-on croire qu'un fonds doté de si peu de moyens pourra servir encore à quelque chose en juillet 2012 ? Surtout que l'Allemagne s'est opposée vigoureusement à l'idée de le doter d'une licence bancaire qui lui aurait permis d'avoir accès au guichet de la BCE... Quant aux eurobonds, ils ne font même plus partie des options lointaines envisageables... donc exit le fédéralisme à tout jamais !
Enfin, histoire de confirmer que la zone euro ne peut plus s'en sortir, il a été envisagé de renforcer les moyens... du Fonds monétaire international à hauteur de 200 milliards d'euros ! triste aveu d'échec : les dirigeants européens débattent encore et encore lors d'un énième sommet de la dernière chance, nous vendent encore plus d'austérité au moment où tout va déjà mal, et in fine on dote le FMI de 200 milliards d'euros supplémentaires pour venir en aide aux États en difficulté de la zone euro ?
Que l'on m'ôte d'un doute : à quoi servent encore les institutions de la zone euro ?
N.B1 : aux États-Unis, le Tea Party a déclaré qu'il était opposé à ce que les travailleurs américains paient pour renflouer les "bureaucrates européens qui prennent leur retraite à 50 ans avec tous leurs avantages sociaux". Qui se charge de leur rappeler qu'AIG a été renfloué par des Republicains avec de l'argent public et que cet argent à servi à dédommager des banques étrangères qui s'étaient assurées auprès d'AIG ?
N.B2 : pendant ce temps, la Grèce et le Portugal s'embourbent dans la récession et beaucoup d'autres pays risquent également de connaître la tempête l'année prochaine, surtout après ce nouveau sommet qui n'arrange rien !
N.B3 : l'image de ce billet provient du site daily
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