En état de poésie 3 : Helberto Helder

En état de poésie (3) : Herberto Helder

«...le poète ne transcrit pas le monde, il est le rival du monde. » H. Helder

Helder, parlant de l'exercice de la « traduction » parle, lui (qui est aussi un intense traducteur), de « poèmes CHANGéS en français ». Il s'agit bien d'un « transport ». Transport, translation et passage.

Sanguin, flux et reflux l'énergie poétique, pré-langage énergétique. Estampe dépourvue d'encre dont les contours secrets se tracent à la flamme rouge crépitante :

« Incertain grandit un poème
dans les désordres de la chair.
Il monte sans mots encore, purs plaisirs et férocité,
peut-être comme du sang
ou une ombre de sang irriguant l'être.

Et le poème grandit recueillant tout en son sein. »

H. Helder 

Le sang c'est lui qui transporte le souffle ignée de l'Esprit. Le poète, Helder, qui un temps, des temps, arpenta le monde, c'est retiré, il se cache l'impétueux pour lancer mieux son filet sur l'ombre lumineuse du monde. Il s'est, à vrai dire, exhumé de ce monde pour s'inhumer en état de poésie :

« Et déjà nul pouvoir n'abolira le poème.
Insoutenable, unique,
il envahit les maisons reposant dans les nuits,
les lumières, les ténèbres autour de la table,
la force soutenue des choses, la pleine et libre harmonie du monde
En bas, l'instrument perplexe ignore l'échine du mystère.

Et le poème se fait contre le temps et la chair. »

« La cuillère dans la bouche » in Le poème continu

(traduction Magali Montagné et Max de Carvalho, éditions Chandeigne)

Inspir et expir le poème, mais hors espace-temps,

Contre la chair et le temps il se fait, il se défait pour la chair et le temps.

Expir et inspir,

« quand » il se fait il se défait

« quand » il se défait il se refait.

Comme on dévide, on peut délire...

Helder apprend le poème continu.

C'est une respiration. Avec et contre le monde. Avec lui contre lui. Pour lui contre lui.

Comme on contredit, on peut contrelire...

Contrelire c'est poétiser le monde !