L'ex-président soviétique Mikhaïl Gorbatchev demande l'annulation des élections législatives remportées par le parti de Vladimir Poutine, que des milliers de Russes s'apprêtent à dénoncer pour une troisième journée consécutive dans les rues de Moscou.
« Je considère que les autorités ne peuvent prendre qu'une seule décision : annuler les résultats des élections et en organiser de nouvelles », a déclaré le dernier dirigeant de l'Union soviétique, cité par l'agence russe Interfax. « La direction du pays doit reconnaître qu'il y a eu beaucoup de falsifications et de manipulations, et que les résultats ne reflètent pas la volonté des électeurs. » — Mikhaïl Gorbatchev « Il y a chaque jour plus de Russes qui ne croient pas en l'impartialité des résultats annoncés. Et, selon moi, ignorer l'opinion publique discrédite les autorités et déstabilise la situation », a encore déclaré le Prix Nobel de la paix.Russie unie, du premier ministre Vladimir Poutine, a été créditée de 238 des 450 sièges à la chambre basse du Parlement, la Douma. Les 13 millions de votes que le parti a perdus depuis les dernières législatives lui ont fait perdre 77 sièges.L'opposition soutient cependant que la chute aurait pu être encore plus importante, s'il n'y avait pas de fraudes électorales.
Les observateurs de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) ont relevé de « fréquentes violations » de la loi électorale, dont « de sérieuses indications de bourrage des urnes ». Washington a dit croire que le scrutin n'a été « ni libre, ni équitable ».
Le blogue de Jean-François Bélanger : Le système Poutine est il soluble dans les médias sociaux? Des centaines d'arrestations de manifestants anti-PoutineCette opinion est certainement partagée par les milliers de Russes qui se sont rassemblés à Moscou pour une troisième journée consécutive, mercredi, pour dénoncer ces élections. Selon les observateurs, les manifestations des derniers jours sont les plus importantes depuis les années 1990.
Le rassemblement de mercredi a toutefois été de courte durée, devant la démonstration de force de la police russe, qui a placé un cordon de sécurité dans le centre-ville et qui a poursuivi les arrestations.
« On arrête les gens pour rien, j'ai l'impression qu'on n'est pas loin de 1937 [l'année des pires répressions de l'époque stalinienne]. » — Galina Stepanova, 45 ans Les policiers russes ont procédé à des centaines d'arrestations depuis le début des rassemblements.
Les États-Unis ont condamné ces arrestations et se sont dits inquiets du sort des personnes arrêtées. Ils ont appelé les autorités russes à relâcher les personnes « injustement interpellées » et à « préciser où elles se trouvent et dans quelles conditions elles sont détenues ».
Mobilisation sur les réseaux sociauxSur le réseau social Facebook, un groupe dénommé « Contre le parti des escrocs et des voleurs », invite les Russes à se rassembler tous les jours à 19 h, heure locale, à Moscou.
Un autre groupe, baptisé « Manifestation pour des élections honnêtes », lance un appel sur les réseaux sociaux à un autre rassemblement, samedi après-midi, place de la Révolution, à deux pas du Kremlin.
De l'avis même du ministère de l'Intérieur, pas moins de 51 500 policiers et 2000 paramilitaires russes sont actuellement déployés dans les rues de la capitale. Les autorités préviennent les protestataires de ne pas participer à des manifestations non autorisées.
Mardi, près de 600 manifestants ont été arrêtés à Moscou, et 200 autres l'ont été à Saint-Pétersbourg. Lundi, environ 300 personnes ont été interpellées dans la capitale russe, et une centaine d'autres dans l'ancienne capitale impériale. Les manifestations réunissent quelques milliers de personnes.
Le blogueur anticorruption Alexeï Navalny et l'un des leaders du mouvement d'opposition Solidarnost, Ilia Iachine, ont notamment été condamnés à 15 jours de prison pour avoir résisté à leur arrestation.
Le candidat Poutine Malgré les manifestations qui érodent sa popularité et celui de son parti, le premier ministre Vladimir Poutine a officiellement déposé son bulletin de candidature en vue de la présidentielle du 4 mars prochain.
M. Poutine, âgé de 59 ans, a été président de la Russie de 2000 à 2008. Il s'est retiré au profit de Dimitri Medvedev, la Constitution lui interdisant d'effectuer plus de deux mandats consécutifs.
Des changements à la Constitution ont fait passer la durée d'un mandat à six ans, de sorte que Vladimir Poutine pourrait théoriquement diriger le pays de près de 140 millions d'habitants jusqu'en 2024.