En Occident, nous vivons dans des villes. Depuis 2007, on estime même que plus de la moitié de la population mondiale vit en zone urbaine. En marge de l’exode rural massif auquel nous assistons depuis plusieurs décennies, certaines communautés s’organisent pour rompre avec les tendances actuelles et rendre possible des modes de vie différents. Plus soucieuses des enjeux environnementaux et de la qualité de vie véritable, leur démarche s’insère dans une réflexion sur les enjeux de long terme. Ce dossier vous propose de découvrir l’une des initiatives les plus abouties à l’heure actuelle : l’éco-quartier EVA Lanxmeer.
Welkom bij Culemborg
Situé dans la ville de Culemborg aux Pays-Bas, à 20 km au sud d’Utrecht et 60 km d’Amsterdam, le site d’EVA Lanxmeer occupe 30 ha au sud de la ville. Le quartier est ainsi au centre de l’activité économique du pays. Une telle situation fait d’EVA Lanxmeer un lieu prisé où il n’est pas nécessaire de compromettre le confort moderne pour vivre de manière vertueuse et responsable.
Ce sont maintenant plus de 240 maisons solaires passives, 40 000 m² de bureaux et de surfaces professionnelles, une ferme urbaine, un centre d’information, un centre de bien-être, un centre de conférences, des lieux de convivialité et d’accueil dont bars, restaurant et hôtel, qui ont été construits.
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Un quartier conçu par les habitants, pour les habitants
C’est en 1994 que le projet a vu le jour sous l’impulsion de Marleen Kaptein. L’initiative faisant des émules, différents acteurs se sont progressivement rassemblés au sein de l’association E.V.A. (ecologisch centrum voor Educatie, Voorlichting en Advies). La municipalité a eu un rôle prépondérant dans le développement du quartier en apportant son soutien, des terrains et divers financements.
La phase de conception du village, jugée primordiale par ses fondateurs, a réuni de nombreux experts et officiels aux côtés des 80 futurs habitants. Toute prise de décision au sein de la communauté suit un processus démocratique et fait appel à une participation active des habitants. La prise d’initiative est également fortement encouragée. Le projet est souvent cité comme un exemple remarquable d’aménagement décidé et organisé par des citoyens (bottom-up).
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Les principes de composition du quartier
A la base de la conception du quartier, un plan d’ensemble définissant la composition globale du site : axes structurants, schéma de gestion des eaux, emplacements des différents éléments (habitat, bureaux, agriculture, écoles, etc.). Sur ce plan de base est venu se dessiner des îlots tous très différents les uns des autres, pensés en fonction des besoins et envies des futurs usagers, habitants ou salariés.
Un des concepts fondateurs du quartier est la mixité fonctionnelle. C’est à dire que des lieux à usages différenciés y sont présents : habitats collectifs et individuels, bureaux, écoles, commerces, services ; on y trouve même une ferme biologique et des vergers.
Espaces publics, collectifs et privés se côtoient. Les habitations sont regroupées autour de jardins communautaires intérieurs, mais chaque ménage possède un jardin privé délimité par des haies et bocages. Les cheminements publics ont été pensés pour s’intégrer au paysage et ne présentent donc pas de distinctions fortes. Pourtant pas de confusion, les zones privées apparaissent clairement, mais l’ouverture des espaces les uns sur les autres crée une atmosphère paisible et sécuritaire.
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Qui dit éco-quartier, dit éco-conception des bâtiments
Évidement, une attention toute particulière a été apportée aux bâtiments. A ce titre, plusieurs générations d’édifices se côtoient. La plupart sont constitutés d’ossature bois, des maisons en paille ayant fait récemment leur apparition dans le quartier. Les bâtiments les plus récents intègrent naturellement des technologies plus efficaces que les autres. Sur le site, les énergies solaires et éoliennes sont fortement misent à contribution. Des panneaux solaires thermiques et photovoltaïques privés (sur les toits), collectifs (sur les parties communes) et des éoliennes canadiennes sont omniprésents dans le complexe. Les maisons utilisent également, à leur avantage, les apports naturels en énergie en appliquant les principes de l’architecture bioclimatique, notamment par l’utilisation de baies vitrées ou de serres qui capturent la chaleur des rayons du soleil. Une partie des logements sont énergétiquement indépendants (non connectés au réseau). Le quartier dispose aussi d’une station biomasse qui, en créant du biogaz, alimente les réseaux électriques et de chauffage collectif.
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Une gestion de l’eau intégrée et innovante à l’échelle du quartier
Autre ressource indispensable au confort des habitants, l’eau joue un rôle majeur dans le quartier. Construit au-dessus d’une importante nappe phréatique, une attention toute particulière se devait d’être portée à la gestion des eaux usées. Le système a été pensé dès les premières ébauches de plan. De nombreux dispositifs de récupération des eaux de pluies et autres systèmes d’économie d’eau permettent aux habitants de réduire leur consommation d’eau . Le traitement des eaux usées est différencié et assuré par un système complexe de tranchées d’infiltration pour les eaux de ruissellement, de lagunes naturelles pour les eaux grises et par un marais filtrant. Les eaux des toilettes sont collectées séparément, les fluides filtrés et les boues solides valorisées en biogaz. Le système repose sur l’implication des habitants, qui ne peuvent, par exemple, utiliser de la javel.
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Entre ville et campagne
Sans surprise, une importance toute particulière a été accordée aux espaces verts. Avec pour objectif de s’intégrer au reste du paysage, le quartier propose de nombreux espaces végétalisés. Le système de gestion des eaux usées à ciel ouvert offre d’ailleurs un cadre magnifique. Les murs et toits végétalisés assurent également un couvert végétal important sur le quartier et apportent une meilleure étanchéité et isolation aux bâtiments. Les jardins collectifs et privés sont au cœur de la vie des familles, en proposant aires de jeux pour enfants et autres sites récréatifs comme des barbecue partagés. Sans oublier la ferme urbaine et les vergers qui composent une grande partie des espaces verts. Le fonctionnel et l’esthétique sont ainsi habillement mariés pour offrir un cadre de vie de qualité.
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Les voitures aux placards
En terme de mobilité, les initiatives sont également nombreuses. Ainsi, les voitures sont formellement proscrites du site et doivent stationner à l’extérieur des zones d’habitation. Les habitants vont même jusqu’à partager une flotte de 7 véhicules. Le plan d’ensemble définit les axes de circulations principaux. Le moyen de transport roi est le vélo, comme partout aux Pays-Bas. Les habitants peuvent facilement circuler en deux roues et en transport en commun. En effet, le quartier se trouve à proximité de la gare de Culemborg qui dessert rapidement les principales villes alentours et notamment Utrecht.
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La visite de EVA Lanxmeer démontre que des actions locales et citoyennes sont possibles. Finalement assez semblable en apparence des parcelles classiques aux alentours, cet éco-quartier jouit d’une atmosphère différente. Les habitants y semblent apaisés et fiers de leur accomplissement collectif. Tous ensemble, ils ont réussi à démontrer que qualité de vie et écologie sont deux concepts qui vont très bien ensemble.
Ludovic Coutant
&
Fanny Virton Lavorel
Pour aller plus loin :
Article Wikipédia
Article du Monde sur l’histoire du quartier
Fiche d’analyse par Energycities
Site officiel de EVA Lanxmeer (en NL)
Présentation par l’association EVA Lanxmeer (très complet en EN)
Vidéo sur le traitement des eaux du quartier
Crédits photo :
Fanny Virton Lavorel
L’association EVA Lanxmeer