S’il n’y avait eu, il y a quelques années, la voix fragile de Carla Bruni chantant Quelqu’un m’a dit, cela aurait pu être avec Berry, avec son Bonheur, que l’on aurait goûté pour la première fois en France un folk aussi gracieux, aussi bouleversant, aussi léger et profond à la fois, aussi souriant et désespéré dans le même couplet. Un prodige d’équilibre et de sincérité comme il n’en paraît pas souvent, un disque enregistré dans un salon à la campagne et arrivé un peu par surprise sur le catalogue d’Universal, qui compte parmi les chocs de ce début d’année et pourrait bien inaugurer une carrière.
Berry, donc, sait laisser tomber la goutte d’encre noire sur le croquis au fusain, elle sait éclairer la courte image qui laisse deviner le drame sous la ouate paresseuse du folk, elle sait rendre bouleversante une petite phrase de rien, portée par un accord anodin. Un talent rare, et qui dépasse la vague néo-folk qui depuis quelques années inonde la France.
Berry pose sa voix aux fragilités bien assumées sur des mélodies à peine habillées d’un peu de guitare ou de percussions. Parfois, un copain passe par le salon de Lionel : un sax ou des chœurs en lingala s’installent dans ses chansons. "A douze chansons, on a dit : ' on arrête, on va quand même rendre sa maison à Lionel.'" Ils pensent envoyer les maquettes aux maisons de disques, comme tous les amateurs. Mais le frère de Manou travaille dans une crèche, près de la place de la République, à Paris, où une salariée d’Universal dépose son enfant. Il passe un disque, à tout hasard… et quelques jours plus tard Berry signe chez Mercury, en même temps qu’elle trouve un manageur et tourneur pour s’occuper de sa carrière.
Tapis rouge…
Certes d’une moindre puissance que celui qui a accompagné la sortie de l’album A Mouthful de The Do, le mois dernier, le buzz qui précède Berry est de ceux qui annoncent le succès.
Berry : Le bonheur (Carnet de route n°2)