Plus le dépistage est réalisé tôt, plus on peut espérer avoir une espérance de vie normale, rappelle Dominique Costagliola, directrice de l'unité Inserm stratégies thérapeutiques et virologie clinique dans l'infection à VIH, en cette Journée mondiale de lutte contre le sida. L'infection à VIH conduit à l'immunodépression (baisse du taux de certaines cellules, les lymphocytes CD4) et au sida (survenue d'une des 23 infections opportunistes ou tumeurs associées à l'immunodépression). Il faut environ huit ans après l'infection pour que le taux de CD4 devienne inférieur à 200/mm³ et environ dix ans pour que le sida survienne. Les combinaisons d'antirétroviraux utilisées pour traiter l'infection permettent de contrôler la réplication du virus dans le sang : cela s'accompagne d'une remontée du taux des CD4 et d'une diminution du risque de sida et de décès. En France, environ 110.000 personnes infectées par le VIH étaient prises en charge en 2010 et 87 % d'entre elles étaient traitées par des antirétroviraux. Près de 90 % des patients sous traitement depuis au moins six mois avaient une charge virale contrôlée.
Situation très contrastée
Dans ce contexte, qu'en est-il de la mortalité en France ? La situation est très contrastée selon les patients et dépend en grande partie du stade de la maladie au moment du diagnostic de l'infection et de la prise en charge médicale. Environ un tiers des personnes sont prises en charge en ayant déjà le sida ou un taux de CD4 inférieur à 200/mm³. Ainsi, 12,7 % des patients pris en charge alors qu'ils ont déjà le sida décèdent dans les quatre ans, alors que le taux de mortalité n'est que de 1,6 % pour ceux qui sont pris en charge lorsque leur taux de CD4 est supérieur à 200/mm³.Chez les hommes non utilisateurs de drogues par voie intraveineuse dont le taux de CD4 est supérieur à 500/mm³ sous traitement par antirétroviraux, le risque de décès est similaire à celui de la population générale. Chez les femmes dans la même situation, le risque devient similaire après trois ans, période pendant laquelle le taux de CD4 est au-dessus de 500/mm³ sous traitement. Pour les patients initiant un traitement au stade sida, le risque de décès est supérieur à celui de la population générale, même lorsque le taux de CD4 redevient supérieur à 500/mm³ après la mise sous antirétroviraux.
Cancers et maladies du foie
De quoi meurt-on ? Les études «ANRS Mortalité» réalisées en 2000 et en 2005 ont montré qu'environ 1 700 personnes infectées par le VIH étaient décédées en 2000, et 1 830 en 2005. En 2005, 36 % des décès étaient causés par une maladie définissant le sida, 17 % par un cancer (hors hépatite), 15 % par une maladie du foie, 8 % par une maladie cardio-vasculaire et 5 % par suicide. La part des décès liés à ces causes a augmenté entre 2000 et 2005 et celle des décès liés au sida a, elle, diminué. En effet, les patients infectés par le VIH, y compris ceux dont la charge virale est contrôlée, ont plus de risques de développer des cancers, des maladies cardio-vasculaires et des maladies du foie que la population générale.Quelle est l'espérance de vie des personnes infectées par le VIH lorsqu'elles sont sous traitement ?
Une récente étude anglaise vient d'estimer que, sur la période 1996-2006, l'espérance de vie d'un homme de 20 ans vivant avec le VIH et traité était de 39,5 ans. Elle était de 50,2 ans pour une femme. Elle était estimée à 57,8 et 61,6 ans respectivement en population générale. Le facteur «CD4» est ici encore déterminant : un patient de 20 ans initiant un traitement lorsque son taux de CD4 est inférieur à 100/mm³ a une espérance de vie de 37,9 ans. Elle est de 41 ans si les antirétroviraux sont administrés lorsque le taux de CD4 est entre 100 et 200/mm³, et de 53,4 ans lorsque le taux de CD4 se situe entre 200 et 350/mm³.
Toutes ces données soulignent que le diagnostic de l'infection à VIH doit être fait le plus précocement possible pour limiter le risque de décès et qu'il est possible d'espérer atteindre une espérance de vie proche de la moyenne lorsque le traitement n'est pas initié à un stade trop tardif de l'infection. »
source: Le Figaro.fr