TRANSMUSICALES DE RENNES 2011
LES CONCERTS
jeudi
Cinq heures de routes pour aller à Rennes et trouver la ville sous la pluie. Pas grave, rien ne peut entamer le moral quand on sait qu'on va passer le weekend aux Transmusicales, enfin. Malheureusement, j'arrive trop tard, pas moyen de voir le concert des Spadassins à l'Ubu et de retourner dans les sixties, dommage, ça avait l'air vraiment chouette.
Ca commence donc par Group Rhoda à la Cité (là où avait eu lieu la toute première édition des Transmusicales, en 1979, ouais ouais), qui se remplit au fur et à mesure jusqu'à former une audience honnête à la fin. La petite Mara, affublée d'une robe multicolore, prends le soin d'enlever ses bottes au tout début du concert, comme pour se retrouver dans une ambiance familière pour délivrer sa musique intimiste à synthétiseurs. Les rythmiques minimalistes peuvent rappeler Young Marble Giants, les morceaux étant plus bruts et décomposés que sur les enregistrements. On pensera aussi à une version cosmique de Serafina Steer. Group Rhoda fait son show comme elle le ferait dans un squat de San Francisco. Aucun artifice scénique, des silences entre les morceaux, mais au final ça prend assez bien.
Pour passer la soirée, le choix s'aiguille sur le théâtre de l'Aire Libre où squatte toute la semaine la bande à Kütu Folk records, le fameux label clermontois. Chaque soir deux ou trois artistes délivrent un mini-concert puis toute la clique se ramène pour chanter ensemble sur scène des morceaux de chaque signature Kütu. Pour l'occasion ils ont fait une jolie déco avec des lustres et surtout une machine à coudre à facettes. A peine le temps de s'asseoir sur les gros fauteuils rouges que Dempster Highway finit son set, trop bête. C'est St Augustine, aka François Régis Croisier qui suit. J'ai beau ne pas être une grande fan de folk (ça m'endort plus qu'autre chose, très bonne idée ces sièges confortables d'ailleurs), je me surprends à beaucoup aimer la prestation intime du monsieur. Ses morceaux sont tristes et beaux et sa voix résonne dans toute la salle, c'est prenant comme tout. Mince, est ce que je vais me transformer en adoratrice des types à chemises à carreaux ? Pas sûr en fait, parce que la prestation d' Hospital Ships après, que pourtant j'attendais avec envie, n'est pas à la hauteur de mes espérances. Pire : c'est ennuyeux. Il aurait mieux fait de s'accompagner de plus de musiciens, seulement un guitariste à côté, ce n'est pas assez. En fait le clou du spectacle à l'Aire Libre, c'est le dernier concert, quand tous les artistes du label jouent et chantent tous ensemble les titres des uns et des autres, tout de suite ça donne un relief impressionnant. Si j'étais une personne sensible, je pleurerais, mais à la place je souris devant cette chouette chorale qui me fait parfois penser à des Crâne Angels plus organisés.
vendredi
Après une bonne nuit réparatrice, on se lève et file à l'Ubu en début d'après midi pour aller voir les jeunes formations locales que le patron des Trans Jean-Louis Brossard a jugé prometteuses. Et ça commence par Juveniles dans une salle pleine à craquer entre les professionnels à l'affut, les coupains venus encourager et les autres qui ont compris que c'était gratuit.
En fin de printemps donc, les Juveniles, un trio rennais composé de membres d'anciennes formations plus ou moins glorieuses, ont débarqué sur la toile grâce à une très bonne communication et un single d'inspiration new-wave, "We Are Young" (depuis sorti chez Kitsune). Alors évidemment, ils avaient plutôt intérêt à faire leurs preuves en live aux Trans histoire que le soufflé ne retombe pas. Et ils n'ont pas totalement convaincu. Oh, c'est carré, le son est impeccable, on sent qu'ils ont bien bossé, mais c'est aussi ça le problème : ça manque de sincérité et surtout de folie sur scène. "We Are Young" est même tout mou en live (surtout quand on loupe une phrase du premier couplet, hein), heureusement qu'ils ont "Ambitions" qui est plus efficace. Ah et le chanteur a la panoplie du hipster, tandis qu'il y a un autocollant Wu Lyf sur la basse, nous ça nous a bien fait rigoler.
En revanche, y en a des choses à regarder au concert de Splash Wave, entre la collection de synthés et le chanteur en short et avec un beau tee-shirt de Moscou qui mange sa banane-téléphone. C'est toujours marrant de voir la réaction des gens quand ils comprennent que le duo ne chante qu'au vocoder, et si on adhère totalement au concept, on trouve ça super bien. En plus ils ont fait de gros efforts scéniques pour l'occasion. Il y a même eu des special guests : Marie aka La Food, la chanteuse de The 1969 Club, une meuf un peu ghetto ("faites du bruit", "big up") et plus tard Yan Wagner (qu'on avait interviewé ici) et sa grosse voix pour un slow cosmique. Mention spéciale à la distribution de BN à la fraise pour l'heure du goûter et surtout au final où le chanteur fait de l'aérobic sur "Bad N'Rad", surprenant.
Au fait, vous pouvez revoir tous les concerts des Trans à l'Ubu sur la web tv de l'université de Rennes.
Gros fail d'organisation ensuite (premier d'une longue série) : Il n'y a plus de place pour aller voir Haight Ashbury à la Cité. Cris, larmes, il n'y a rien d'autre à faire que d'aller errer dans le village pro, de buffet gratuit en buffet gratuit, un petit sentiment de culpabilité au ventre.
Rendez-vous pris au Parc Expo où Breton joue dans un hall très clairsemé, horaire précoce oblige. Après une intro qui sonne drôlement Foals, le collectif déballe ses morceaux hybrides durant un très court set. Certains moments sont très bons, d'autres franchement pas terribles, tandis que le chanteur baragouine un français quasi parfait entre les différentes chansons. Ils font bien moins mystérieux que ce qu'ils veulent faire croire, c'est bête. Encore une preuve que l'aura de mystère ne sert pas forcément les groupes (coucou Wu Lyf). Ils avaient promis des surprises pour ce concert, apparemment ils voulaient parler de leurs collages de vidéos, pas grandiosement originaux. Certains ont vraiment adoré le concert, d'autres ont été super déçus, en définitive, on peut dire que ce n'était pas la claque escomptée.
Un peu plus tard on va voir Colin Stetson au hall 4, surtout par curiosité, pour le voir émettre ses sons bizarroïdes avec son gros engin impressionnant. Ah c'est sûr que ça change de l'utilisation habituelle d'un saxophone. Mais le concept a ses limites et passées les premières minutes d'hallucination, on commence à s'ennuyer un peu. Surtout qu'il n'y a scéniquement rien à voir, le musicien le dit lui même en remerciant les gens qui fument, parce que ça fait joli à regarder. Ok.
Enfin, Alexander Tucker m'achève sur les coups de deux heures du matin, petite nature que je suis. Il faut dire aussi qu'il nous a bien roulés. On pensait le voir jouer en live, et à la place on retrouve un grand chevelu caché derrière un ordinateur. Il y a des sons intéressants (des fois on se croirait presque dans une messe psychédélique), mais pas assez pour convaincre, je préférerais retrouver un lit.
samedi
Ce samedi après-midi (j'allais écrire "matin", tant les Trans ça décale), retour à l'Ubu, où il y a un peu moins de monde qu'hier, et c'est bien dommage pour les gens d'avoir raté 50 Miles From Vancouver. On les avait déjà repérés et mis dans nos pronostics, et on ne s'était pas loupé. C'est vraiment bien, et en live aussi. De toute façon le shoegaze pop (appelons ça ainsi ce sera plus simple) ça marche toujours, et si les quatre Rennais sur scène ne sont pas archi-communicatifs, tant pis, y a les compos pour rattraper.
Par contre, juste après, on s'est rendu compte qu'on avait faux. Jesus Christ Fashion Barbe ça avait l'air vachement bien, mais le live est très décevant, zéro miracle : de la pop à guitare de base, servie par trois gus un peu trop vieux et manquant d'énergie et de présence scénique. Je ne crois plus en Jésus.
Ensuite on va tester le 4bis et voir de la meuf : Giana Factory, un trio de danoises aux longs cheveux. Leur musique sombre, mélange de pop et d'éléments électroniques, où s'enroulent des voix féminines en choeur est habillée visuellement par de jolies images de montagnes et d'étoiles, le genre de truc vu et revu mais qui est toujours beau à regarder, et puis ça occupe l'oeil. Sans être inoubliable, le concert est assez bon pour donner envie de se plonger un peu plus dans l'univers et la discographie de ces filles.
Quand je vous parlais de fail : pour des raisons indépendantes de ma volonté, je n'irais pas au Parc Expo ce soir, et je ne saurais pas ce que vaut Hanni El Khatib en live, pour me consoler, je rigole en apprenant la grosse bourde du Télégramme.
Tout ça pour dire que les Trans c'est vraiment bien, encore mieux que dans notre imagination. Mais ça passe beaucoup trop vite et on rate plein de trucs qu'on voulait voir. A charge de revanche, on se revoit l'année prochaine. Ah, etu n article sur l'ambiance transmusicale arrive dans la foulée, stay tuned.