La vierge froide et autres racontars de Jorn Riel, Bonneval, Tanquerelle, ma BD du mercredi
Par Mango
Choisi à la va vite à la fermeture de la bibliothèque, j’ai eu la main heureuse puisque cet album de racontars danois m’a beaucoup plu. Il faut dire que mon aimable bibliothécaire, (ce jeune plein d’enthousiasme et passionné de BD dont j’ai déjà beaucoup parlé), a la bonne habitude et prend le temps de signaler ses préférences par des petits cœurs faits maison qui ne m’ont encore jamais déçue.Il a aimé la BD que je présente aujourd’hui et ouf, moi aussi ! Dommage seulement qu’elle ne puisse entrer ni dans le Top de Yanek ni dans le challenge Roaarrr de Mo’.
Il s’agit d’ histoires de trappeurs du Groenland écrites par l’ethnologue danois Jorn Riel après avoir passé lui-même seize ans sur la banquise , dans les années cinquante. Ses racontars ont eu un grand succès. Il en parle comme d’histoires vraies qui pourraient passer pour un mensonge. A moins que ce ne soit l'inverse"Ces sept histoires se passent toutes dans les chalets des trappeurs, ensevelis sous la glace et distants de centaines de kilomètres les uns des autres. Ces hommes rudes et solitaires vivent à deux mais se connaissent tous car le besoin de se retrouver et de se mettre à parler longuement avant de retomber dans le silence des nuits interminables leur arrive par à-coups, comme un besoin vital pour ne pas sombrer totalement. C’est alors qu’ils se racontent des histoires étranges auxquels chacun s’efforce de croire et même parfois leur vie en est bouleversée. Ma préférée est celle qui a donné son nom à l’album: La vierge froide ... ou les ravages d'Emma.
Pourquoi ce titre? La première explication du terme, la plus officielle vient des jeunes vierges qui préparaient des sandwiches au poisson ou à la viande froide pour les marins. Mais la vierge froide était également le nom d’un outil de masturbation en forme de rouleau, datant du 19ème siècle. Les gens qui l’ont utilisé ont été emprisonnés, parce que l’onanisme était sévèrement interdit à cette époque. (Tanquerelle)
Quand Mads Madsen, à son retour de congé dans le sud, eut terminé de raconter ses souvenirs de voyage à son compagnon William le Noir, il inventa pour l’ambiance de nouveaux événements et un soir, à sa propre surprise, il créa Emma, une femme splendide faite rien qu’avec des beignets aux pommes, deux yeux bleu ciel et une moue rouge.Il en parla si bien que William le Noir en tomba amoureux et en racheta les droits. Il l’échangea contre ce qu’il avait de plus précieux: son fusil, ses cartouches, son traîneau d’affût. Tous les deux passèrent alors un bel hiver, chacun content de ce marché jusqu’au jour où Mads Madsen dut partir relever les pièges. Quelques jours plus tard, William le noir vit arriver Bjorken, un voisin qui avait l’air bien malade, totalement désespéré. Il finit par avouer être amoureux de la femme de William, cette Emma dont venait de lui parler Mads Madsen. C’est ainsi qu’un nouveau troc eut lieu et qu’Emma, la vierge froide, fut à nouveau échangée contre le seul bien précieux de Bjorken: son tatouage de dragon qu’il avait dans le dos.Toutes les histoires sont ainsi : drôles, tendres, poétiques et réalistes à la fois.De plus les dessins me plaisent, avec des portraits bien typés et facilement reconnaissables, classiques, qui laissent la part belle au récit. Les auteurs: Gwen de Bonneval est un dessinateur, scénariste de bandes dessinées né à Nantes, °1973, qui vit et travaille à Paris.Hervé Tanquerelle, °1972, dessinateur nantais lui aussi, a fait un voyage au Groenland en août de cette année, en compagnie de Jorn Riel. Il le raconte sur son blog passionnant
ICICe qui est sûr, c'est que ce voyage va nourrir le troisième tome des racontars que nous devrions commencer en janvier, si tout se passe bien. Seul bémol à tout ça, c'est que Gwen de Bonneval ne sera pas du voyage alors même qu'il est l'instigateur du projet d'adaptation des racontars.Un entretien très intéressant de
Gwen et TanquerelleICILa vierge froide et autres racontars de
Jorn Riel, Gwen de Bonneval, Hervé Tanquerelle (Sarbacane, 2009, 147 pages, 7 nouvelles, traduit du danois par
Susanne Juul et Bernard Saint Bonnet) Bonneval (scénario), Tanquerelle, (dessins) d’après l’œuvre de Jorn Riel.