L’étoffe des légendes T1 : L’Obscur (calendrier de l'avent 7)

Publié le 07 décembre 2011 par Litterature_blog

Raicht - Smith - Wilson © Soleil 2011

Ça commence comme un cauchemar. Il fait nuit. Un enfant dort tranquillement dans sa chambre. Soudain, le placard s’ouvre. Des tentacules en sortent et saisissent l’enfant. Ce dernier est traîné sur le sol jusqu’au seuil de la porte où il disparaît. Une fois le silence revenu dans la pièce, les jouets du garçon quittent leur coffre et décident, après un court conciliabule, d’organiser une mission de sauvetage pour aller récupérer leur maître. Tous savent à quel point le risque est grand. C’est le Croquemitaine qui a kidnappé l’enfant et pour le retrouver, il va falloir se rendre dans son mystérieux royaume, l’Obscur. Une fois dans le monde du Croquemitaine, les jouets subissent une étrange transformation : l’ours en peluche devient un véritable ours brun, la poupée Pocahontas devient une princesse indienne, le colonel, un soldat de plomb, devient un vrai soldat, le canard en bois devient un vrai canard, etc. Une quête pleine de dangers et de rebondissements commence alors…
Un comics inclassable, à la frontière du conte et du récit fantastique. Bien sûr, ces jouets qui s’animent font penser à Toy Story. Mais on est loin du monde de Disney. L’univers est ici bien plus proche de celui de la série Fables avec le personnage du Croquemitaine (équivalent de l’Adversaire) et son mystérieux royaume sur lequel il règne en maître tout puissant. Malgré ces quelques points communs L’étoffe des légendes reste une œuvre originale. Les protagonistes ont chacun une vraie profondeur psychologique et les relations à l’intérieur du groupe sont très fouillées. Résultat, on découvre un récit riche et intense où sont abordées des notions telles que l’honneur, l’amitié ou la trahison. Avec le soupçon supplémentaire de violence et de cruauté propre aux contes, force est de constater que l’ensemble apparaît solidement charpenté. Sur la quatrième de couverture Brian K. Vaughan, auteur de Y le dernier homme, qualifie l’histoire de « sombrement merveilleuse ». Je n’aurais pas dit mieux.
Le dessin de Charles Paul Wilson III est superbe : de grandes cases très détaillées, beaucoup de gros plans, un découpage dynamique. L’animation des jouets devenus vivants est parfaitement rendue et l’alternance entre les scènes d’action et celles plus calmes donnent rythme et fluidité au récit. Niveau couleur, le ton sépia utilisé à chaque page offre une patine particulière à l’ensemble du recueil. Pour ne rien gâcher, l’ouvrage est superbe : format carré, papier et cartonnage épais, vernis sélectif sur les couvertures, sans compter cette entêtante odeur d’encre que j’adore. Un vrai bel objet que l’on prend plaisir à manipuler et à sentir (oui je sais, ça peut paraître bizarre mais j’aime sentir les livres, c’est un fétichisme comme un autre !).
Une énorme et belle surprise que cette nouvelle série découverte par le plus grand des hasards sur une table de mon libraire. On discutait la semaine dernière avec Mo’ de la diversité des comics suite à mon billet sur Criminal. C’est une réalité incontestable, l’univers de la BD américaine est décidément d’une richesse sans limite, loin, très loin des sempiternels super-héros en collants moule-burnes qui focalisent l’attention du grand public.
L’étoffe des légendes T1 : L’Obscur, de Mike Raicht, Brian Smith et Charles Paul Wilson III. Soleil, 2011. 128 pages. 19,95 euros.

Raicht - Smith - Wilson © Soleil 2011