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Faut-il enterrer le Doha Round ?

Publié le 06 décembre 2011 par Jblully

Faut-il enterrer le Doha Round ?- @ Beboy - FotoliaVoilà plus de 10 ans que le Doha Round tourne en rond et que les résultats ne sont pas à la hauteur de l’énergie déployée. Les déclarations de bonne intention du G8 ou lors de conférences du FMI et de la Banque mondiale n’ont pas suffi à débloquer la situation. La crise financière passant par là, les priorités des Etats et des entreprises elles-mêmes sont désormais ailleurs. Au réflexe de survie s’ajoutent des discours sur la démondialisation qui commencent à séduire et ne créent pas un environnement favorable à des négociations commerciales internationales. Au risque de se répéter, il faut prendre conscience que le Cycle de Doha est devenu anachronique. Les espérances placées dans le cycle et la volonté d’en faire le cycle du développement ne coïncident plus avec les urgences actuelles.

Pascal Lamy, Directeur de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), qui a longtemps tenté de sauver le bateau alors qu’il prenait l’eau, commence lui-même à tenir des discours moins positifs. Sa détermination à finaliser le Cycle semble s’affaiblir.

Mais faut-il sauver le Cycle à tout prix ? On rappellera que l’Union européenne s’est engagée dans ces nouvelles négociations internationales en espérant pouvoir imposer plus de régulation à ses partenaires. Très vite, elle s’est rendue compte que ses partenaires avaient d’autres priorités et que la régulation ne serait pas au cœur des débats. Le niveau d’ouverture des marchés proposé à la table des négociations est relativement faible. Dans ces circonstances, qu’est ce que l’Union européenne a vraiment à gagner ?

Alors que l’Union européenne engage la réflexion sur la réciprocité des échanges commerciaux et s’oriente vers la recherche d’accords équilibrés, a-t-elle vraiment intérêt à privilégier aujourd’hui la voie multilatérale ? L’Union européenne est tellement ouverte à ses partenaires commerciaux que le point de départ des négociations multilatérales est largement déséquilibré. La volonté des pays émergents d’ouvrir leurs marchés est par ailleurs réduite. Ne devrait-elle pas dès lors favoriser la voie bilatérale pour s’engager davantage sur le terrain de la réciprocité ? A tout le moins, les accords bilatéraux peuvent lui permettre d’inclure les questions de régulation. La Commission européenne intègre d’ores et déjà des chapitres entiers relatifs à la concurrence dans ses nouveaux accords de libre échange.

Par ailleurs, le secteur des services qui a un intérêt à plus de libéralisation mondiale ne semble pas vraiment préciser ses attentes. Les négociateurs européens ne semblent pas bénéficier de directives précises et claires en la matière.

Plus encore, des voix s’élèvent pour réclamer de nouvelles statistiques du commerce qui prennent en compte l’internationalisation des processus de production. Comme l’a appelé de ses vœux, Jean Arthuis, lors d’une conférence au Sénat en 2010, il faut un cadre statistique exhaustif et solide qui établisse une mesure du commerce en valeur ajoutée. « Pour un bien exporté, il s’agit de compter toute la valeur ajoutée qui y est incluse et de lui soustraire toute la valeur ajoutée des intrants importés, afin d’éviter leur double comptabilisation le long de la chaîne de production ». Les négociations actuelles ne s’appuient pas sur des statistiques suffisamment satisfaisantes pour pouvoir poursuivre sereinement les discussions.

Enfin vouloir faire perdurer le Cycle de Doha est nuisible pour l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) qui perd de sa crédibilité. La crise institutionnelle n’est plus très loin.

En conséquence, la Conférence ministérielle qui se tiendra à Genève du 15 au 17 décembre 2011 doit être l’occasion de mettre un terme à au Cycle de Doha ou de le mettre entre parenthèses. L’OMC ne se retrouvera pas pour autant dépourvue. Les sujets de l’énergie, du changement climatique ou de la sécurité alimentaire devront être rapidement abordés et l’OMC devra intensifier son pouvoir régulateur en la matière. Il appartiendra à l’Union européenne de définir sa philosophie et de jouer un rôle de leadership.


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