Ne nous voilons pas la face, l’intrusion des agitateurs de Greenpeace sur des sites nucléaires français n’est pas une bonne opération pour le président Sarkozy. Alors que l’opération Restore SarkHope battait son plein et que les sondages élyséens recommençaient à frétiller de la queue, l’invasion du joyau de la technologie française, de ce qui sépare l’homme de la bougie, est une fausse note. Sans parler de ce qui aurait pu arriver – l’explosion d’une centrale nucléaire ne condamnerait que ses voisins immédiats, mais imaginons que des malfrats s’introduisent dans les comptes de campagne d’Edouard Balladur ou de Nicolas Sarkozy ? C’est l’ensemble de l’édifice national qui vacillerait. Comment un président incapable de gouverner ses réacteurs nucléaires pourrait-il gouverner la France ? Il convient donc de rétablir rapidement la confiance, en produisant une pédagogie de cette crise, suffisamment simple pour être comprise par le plus grand nombre de Français.
L’Agence d’Idées Variae a réuni son groupe de travail « NucléAir France » qui a produit ces quelques scénarios explicatifs, que nous offrons gracieusement à l’UMP pour rassurer les Français sur sa capacité à dompter l’atome en toute sécurité.
Scénario 1 : un stress test dans le cadre du Grenelle de l’environnement
La candidature Borloo n’est plus, mais l’esprit du Grenelle nous hante encore. Dans une logique de co-construction des politiques énergétiques vertes de demain, l’État s’est entendu avec Greenpeace pour organiser des stress tests impromptus de ses centrales nucléaires. Un accord de co-gouvernance et de co-élaboration de plusieurs pages a été rédigé et signé par les deux parties. Problème : une fois les tests commencés, les émissaires des deux camps ont découvert qu’ils avaient parlé du Mox, mais pas de son traitement [ou l'inverse : personne n'y comprend rien, l'essentiel est de la dire avec un air grave et soucieux]. Furieux de cet oubli, les inspecteurs de chez Greenpeace ont changé leur feuille de route en cours de mission, menaçant d’occuper les centrales. La prochaine réunion du Bureau national d’EDF devrait permettre d’obtenir un arrangement acceptable pour les deux parties.
Éléments de langage : « Les militants de Greenpeace sont de l’uranium dont on fait les girouettes ».
Scénario 2 : une attaque par des commandos de salafistes Auvergnats
Si les Français s’intéressaient un peu plus à la langue anglaise, ils auraient remarqué que Greenpeace signifie la Paix verte, ce qui n’est rien d’autre qu’un euphémisme pour dire « Jihad ». Cela devait finir par arriver : enhardis par la permissivité et le multiculturalisme de la gauche, des Auvergnats intégristes ont décidé de s’en prendre à un symbole de la civilisation occidentale, à ces Grandes Dames de fer qui ont l’audace de montrer le visage nu de leurs cheminées à nos belles campagnes. Outrage insupportable pour la frange dur des Auvergnats, qui ont organisé cette action en réaction. Heureusement, ils ont été maîtrisés sans heurts, grâce à l’intervention de Brice Hortefeux comme interprète-négociateur.
Éléments de langage : « Nous proposerons la semaine prochaine au Parlement une loi interdisant le port de la barbe et du voile dans un périmètre de 100km autour des centrales nucléaires ».
Scénario 3 : une journée portes ouvertes dans les centrales françaises
Il y a une raison toute bête à la réussite de l’intrusion des activistes de Greenpeace : les centrales organisaient justement, ce jour, une opération en direction du grand public, intitulée « Le nucléaire à cœur ouvert ». L’affiche, alléchante : « Venez découvrir la France qui rayonne tôt, l’énergie propre du futur ! Entrez dans un réacteur sans combinaison, et faites prendre des couleurs rigolotes à vos enfants ! ».
Éléments de langage : « Le césium, ça vous gagne » ; « Les rayons sont sympa » ; « MOX-imum ».
Scénario 4 : un exercice de tir à balles réelles pour nos gendarmes
C’est un jeune militant de l’UMP qui a, malgré lui, vendu la mèche :
Eh oui : il avait été organisé, ce jour, un lâcher de militants de Greenpeace, volatile nuisible bien connu des chasseurs de nos terroirs. C’est logique : d’un côté, la menace grandit dans nos banlieues, où des armes de guerre sont saisies chaque jour, nécessitant une intervention plus musclée des forces de l’ordre ; d’un autre côté, il faut commencer par les aguerrir, ces forces de l’ordre, sur des cibles moins récalcitrantes et plus habiles à tendre des banderoles qu’à ajuster des tirs de fusil à pompe. L’opération se serait déroulée sans encombre, nonobstant la sortie maladroite de ce jeune sot, qui a parlé de terroristes, alors qu’il ne s’agissait que de cibles mouvantes écologistes. Les Français ont bien raison de se méfier des jeunes.
Éléments de langage : « Un voyou s’éteint, un policier s’éveille ».
Scénario 5 : un fait, vous n’avez rien vu
Tout est résumé par le titre de ce scénario. Si ces quelques irresponsables verts (pléonasme, certes) ont pu passer à travers les mailles du filet, c’est parce que les équipes de ces centrales étaient occupées à repousser de vraies menaces qui, du coup, ne sont pas arrivées jusqu’à vous. Il se trouve que le réacteur de Nogent-sur-Seine était victime de la conjonction d’un micro-séisme local et d’une tornade, tandis que celui de Cruas subissait un assaut d’espions chinois, qui font rien qu’à essayer de voler nos secrets industriels et délocaliser nos entreprises. Or comme l’a dit notre président à Toulon, « L’Europe ouverte à tous les vents, ça ne peut plus durer ». C’est donc justement parce que les forces de sécurité étaient occupées à bloquer les menaces les plus importantes que les activistes de Greenpeace ont pu réussir leur forfait. D’où le juste mot d’Eric Besson, qui a parlé de simples « dysfonctionnements » à corriger.
Éléments de langage : « La réussite de Greenpeace est la preuve de notre détermination à lutter contre les vraies menaces ».
Romain Pigenel
Les autres notes du think tank Variae sont ici.