La vie semble s’être incrustrée dans chacun des recoins. Une fois la bibliothèque enlevée du mur, il reste des traces, des traces de poussière. On a beau frotter cela reste incrustré comme ancré dans la profondeur même du mur. Il y a ce coin de mur avec la poussière qui là encore a fait son travail. Le gris s’est mis sur les plans pas dans les coins, dessinant une géométrie par défaut dont la matière semble s’être absentée. Il y a encore le sol avec ces longues planches de bois où des souvenirs minuscules se sont insinués dans les fêlures de l’arbre mort. On trie, on retrouve des papiers oubliés, on revoit des visages qu’on a aimé, tant aimé que ce fut presque impossible, toute cette peau dans un appartement. On se souvient des nuits à rencontrer des corps anonymes, la joie et la folie de cet anonymat qui a laissé des traces. On a du mal à effacer sa présence. Il y a comme un air de tristesse dans l’espace. On sait qu’on doit partir donc on se tient dans cette activité de déménagement consistant à enlever ce qui reste. Chaque mouvement a son importance on tente donc de s’économiser. Enlever ce qui reste, c’est soustraire ce reste, reste d’une présence, reste de quelques années, reste d’une existence à un endroit donné localisé dans le XXème arrondissement de Paris en France. Il y aura d’autres corps en ce lieu, des paroles échangées, des cris peut être, des souffles de jouissance, des peaux croisées et décroisées. Je sais que je laisse là tant et tant de choses. Il ne restera que des photos dans des cartons. Où vais-je donc mettre tout cela à présent?