Ian McEwan, Sur la plage de Chesil (Gallimard, 2008)
Sur un thème un brin provocateur – une nuit de noces qui tourne mal – Ian McEwan, par petites touches incisives, décrit l’Angleterre des années 60 prise entre les feux d’une morale conservatrice et l’époque de la libération qui s’épanouira plus tard. Dans ce court roman, l’amour qui unit Edouard et Florence est indiscutable, profond, solide, mais le malaise de ces deux adolescents se joue de leur absence d’expérience sexuelle qui va les confronter à la peur et au dégoût pour l’un, au trac pour l’autre, les précipitant dans un avenir qu’ils n’ont pas voulu ainsi. La construction romanesque emprunte la voie mélancolique des contes, par flash-back, pour nous décrire les différences sociales, le poids des conventions et les drames familiaux. Enfin, comme dans les épilogues des pièces de Shakespeare, le narrateur nous apprend, dans la dernière partie du livre, ce que l’un ignorera pour toujours de la destinée de l’autre, une fois séparés. Une histoire au goût amer ou désenchanté, même si l’empathie de l’auteur pour ses personnages lui confère une douceur impalpable.Egalement disponible en coll. Folio (Gallimard, 2010)