Ce matin, Th Gomart (IFRI) parlait sur France Culture et commentait les élections en Russie. J'ai retenu cette formule : "la Russie, c'est deux tiers une dictature, un tiers une démocratie". J'adore la formule que je trouve très éclairante, et qui dépasse le cas de la Russie.
En effet, alors pourtant que Russie unie a obtenu un score flatteur (49,5 % des voix au premier tour), chacun note la déception du parti au pouvoir : en effet, malgré les différentes pressions qui seraient intolérables en Occident (bourrages d'urnes, trafics de bordereaux électoraux, pressions sur les lecteurs, attaques informatiques contre les sites indépendants, bannissement des observateurs), on n'obtient pas un score soviétique ni même un score africain. Car facialement, 49,5, c'est moins de la moitié. J'ai quand même quelques notions de mathématiques, faut pas croire.
Mais il arrive en tête, et il a bien dû obtenir un tiers des voix. Bien sûr, là ne réside pas le tiers de démocratie qui fait le titre de ce billet..... cela signifierait que tous les autres sont du parti de la dictature (ce qui est peut-être le fait de certains, d’ailleurs).....!
Les analystes expliquent l'érosion électorale comme la lassitude (la colère) contre la corruption. Je crois qu'il s’agit là d'une grande loi, qui a été à l’œuvre au sud de la Méditerranée mais qui travaille également l'Afrique noire : les gens en ont marre de la corruption : cela ne signifie pas qu'ils sont pour la démocratie, contrairement à la vue schématique des occidentaux (voir billet).
Au fond, le système démocratique a perdu de son attrait : ce qu'on voit aux États-Unis ou en Italie ne fait pas forcément rêver, et certes 535 jours sans gouvernement sont possibles en Belgique, en évitant que les gens en viennent aux mains ou aux fusils, mais ce n'est pas ce qu'il y a de plus convainquant. Les gens ne sont donc pas contre l'efficacité, si celle-ci nécessite de passer outre certaines règles de "démocratie" (et surtout, si elles apportent réellement du développement économique, regardez la Chine voire le Brésil). Mais il faut un minimum de transparence et de règles de droit pour réguler le système.
Un tiers - deux tiers.... Je ne dis pas que c'est satisfaisant, encore moins que c'est bien : je constate que ça convient à beaucoup.
NB : puisqu'on parle de la Russie, un russophone patenté (merci à RP qui a fait l'agent) me donne cette traduction d'un commentaire en russe d'un lecteur russe d'égéa (russkyi, voir ici) : je le trouve intéressant car il vient à l'appui de ce billet. "Monsieur OK: j’exprime mon opinion personnelle sur l’analyse que vous faites des évènements politiques dans le monde. Des évènements dont se servent les politiques. Tout dépend comment ils sont présentés. Chez les russes, le temps de ‘l’affection’ pour l’Ouest est dépassé, dans la société russe, la conscience nationale et le patriotisme renaissent.
Personnellement je salue les nouveaux aspects, les nouveaux équipements de l’Armée russe, la modernisation de son potentiel nucléaire. Les analystes de l’Ouest notent le partenariat et les bonnes relations sur le placement du bouclier anti missile américain-Otan. Sur ce sujet l’Ouest ne donne aucune réponse fondamentale. Pas de réponse à la question Qui est visé ? Mais comme le disent les politiques russes, le point de retour n’est pas encore atteint ! Mais il fait réfléchir. Merci pour cette discussion sur votre site.
O. Kempf