Tester la résistance des matériaux. Déterminer le moment où la brisure détruit le fonctionnement. Opérer le déplacement de la matière et de la forme et dans la brisure faire en sorte que ça continue à marcher. Voir comment ça se fêle, comment ça se débranche. Faire circuler l’électricité plutôt que de jeter. Voir apparaître de nouvelles images, de nouveaux sons, imprévisibles que l’on attend. Frapper, piétiner, exploser.
Penser à mettre à nue les structures et les fils. Dissiper l’électricité et lui permettre de circuler hors des canaux. Démonter les gaines, ce qui est autour, le design, le plastique, les formes qui ne sont que formalisme. Laisser les composants à l’air libre. Penser à de petits écrans à cristaux liquides, images à aggrandir avec des lentilles en plastiques, fils suspendus dans l’obscurité, gaîne délaissée, défaire les objets de l’industie. Refuser la pseudo-esthétique qui n’a de readymade que le nom (car elle est seulement passive) où les moniteurs, où les marques (Sanyo, Sony, Dell, etc.) s’accumulent. Choisir un autre espacement.
Il y a souvent le désir de faire disparaître le matériel: cacher les fils, les ordinateurs, dissimuler la source lumineuse de la projection, choisir un angle diminuant la possibilité des ombres, etc. C’est devenu là le lieu commun de l’exhibition des arts numériques, presque un réflexe que chacun suit. Ce désir n’est-il pas poussé par le fantasme d’une image pure, débarassée de la gravité matérielle, de toutes ces machines qui entourent les images? Une image donc qui n’est pas celle qu’expérimente celui qui produit l’image. Remarquez combien l’atelier de l’artiste numérique est parcouru de fils, de poussière accumulée dans les milles recoins que permettent les machines? Ne faudrait-il pas alors faire ressentir plus encore l’aprêté matériel, non pas pour faire une démonstration de force technologique ou pour exhiber les composants comme on exhibe les trophées d’une pratique nouvelle, mais plutôt pour jouer d’une limitedisjointe entre la matière/la forme/la fonction.