Le couple franco-allemand, sans l’avouer, suit le conseil de Jean Cocteau : "puisque ces mystères nous échappent, feignons d’en être les organisateurs". Comme si la gestion de la zone euro devait désormais s’apparenter à celle d’une épicerie placée sous la surveillance étroite de son banquier.
Là où il faudrait voir grand, les deux dirigeants jouent les gagne-petit préférant resserrer les boulons plutôt que de se servir de la puissance de l’euro avec l’émission d’euro-obligations. L’austérité donc à défaut de solidarité et surtout la démonstration d’une incapacité à formuler une vision pour l’Europe.
Une désertion politique dans laquelle les dirigeants plutôt que d’assumer leurs responsabilités préfèrent s’en dessaisir en les confiant aux juges européens puisque in fine, la Cour européenne de justice pourrait vérifier que les pays respectent bien la règle d'or, qui sera inscrite au préalable dans les Constitutions.
L’idée d’un nouveau traité est une mauvaise idée au mauvais moment. Tout d’abord parce qu’elle est émise à une période où les désaccords sont les plus forts et où les opinions publiques, comme leurs élites politiques, ont perdu confiance dans leur destinée européenne. Une idée également mal née car imposée par le Directoire Franco-Allemand aux autres partenaires mis devant le fait accompli par une déclaration à destination des marchés par presse interposée.
La présidence polonaise de l'UE a d’ailleurs aussitôt réagi pour déclarer que le renforcement de la convergence économique au sein de la zone euro ne doit pas se faire au détriment de la cohésion de l'Europe à 27. Hélas, il est déjà trop tard. Comment en effet poursuivre dans une intégration européenne quand le respect des "petits États" est déjà de l’histoire ancienne.
A cet égard, la leçon d'histoire pathétique d’Helmut Schmidt (93 ans), en fauteuil roulant, sur l’isolement de l'Allemagne en Europe est un rappel salutaire qui visait certes Angela Merkel mais qui, par ricochet, concerne également à la France.