En 2006
Aujourd'hui, j'y vais sur la pointe des pieds, je m'attaque à Shabana Azmi, sans doute l'une des meilleures actrices depuis les années 1970.Papa (Kaifi Azmi) poète ourdou et parolier, maman (Shaukat Azmi) actrice de théâtre, tous deux communistes.
Shabana Azmi naît en 1950 et grandit dans l'ambiance particulière des réunions de gauche à la maison, ce qui explique sans doute en partie la tournure que va prendre sa carrière.
Après des études de psychologie, elle suit les cours du Film and Television Institute of India à Pune, d'où elle sort diplômée en 1973.
Dès 1974 son premier film d'auteur dirigé par Shyam Benegal, Ankur, qui lui vaut les louanges de Satyajit Ray et de la critique, ainsi que son premier National Award de meilleure actrice.
Les années qui suivent sont de la même veine, car elle sait choisir ses films et mettre à la disposition du réalisateur son jeu subtil et réaliste.
Elle ne délaisse pas pour autant le cinéma commercial, pour lequel elle tourne un film de temps à autre, bien que son talent y soit moins visible. On la voit par exemple dans le célèbre Amar Akbar Anthony (Manmohan Desai,1979) ou Khamosh (Vidhu Vinod Chopra, 1985), mais elle revient toujours à ses premières amours.
C'est ainsi qu'elle reçoit 3 autres National Awards pour Arth (Mahesh Bhatt, 1982), Khandar (Mrinal Sen, 1984) et Paar (Goutam Ghose, 1984).
Parallèlement au cinéma elle poursuit une carrière d'actrice de théâtre non seulement en Inde au Prithvi Theater à Bombay mais aussi en tournée aux Etats-Unis, en Europe et au Pakistan avec la pièce Love Letters de A.R. Gurney, qui tournait encore en Inde au début de l'année 2011.
Avec quelque 130 films, dont la majorité sont tournés vers le cinéma d'auteur, elle aborde des rôles très divers qui lui permettent d'exprimer ses propres idées.
En effet, il ne faut pas oublier que l'héritage de ses parents l'amène à s'investir dans divers combats sociaux parmi lesquels les droits de la femme, les malades du sida, les habitants des bidonvilles, et le communautarisme.
Ses idées l'ont d'ailleurs amenée à s'impliquer dans la politique quand elle devient membre de la Commission nationale d'intégration avant d'être élue à la Rajya Sabha (chambre haute) du Parlement.
Difficile de faire un choix dans ses films. J'ai opté pour un film par décennie et une flopée de "Et aussi" qui m'ont touchée.
Ankur (1974). Chronique sociale
Dans un village, une jeune femme vit avec son mari, un potier sourd-muet et alcoolique.
Quand le fils du zamindar du village revient après avoir terminé ses études, il s'installe dans une vieille bâtisse où la jeune femme et son mari doivent le servir.
Attiré par la jeune femme, le jeune homme est source de rumeurs dans le village qui guette les absences du sourd-muet pour espionner sa femme. Un jour, elle a des nausées...
Une chronique dans un cadre rural et quasi moyenâgeux où les traditions passent avant tout. Ce film a reçu une pluie de récompenses en Inde (où il ne touche que peu de spectateurs, cependant), mais aussi dans plusieurs festivals étrangers.
Réalisateur : Shyam Benegal
Héroïne : Shabana Azmi
Héros : Anant Nag
Compositeur : Vanraj Bhatia
Notre avis : 3,5/5
Arth (1983). Psychologique
Un cinéaste tombe amoureux de l'une de ses actrices, qui souffre de problèmes psychologiques.
A travers une fine exploration, le réalisateur étudie la façon dont les protagonistes, et en particulier l'épouse, vont tenter de s'adapter à la situation.
Ce film parallèle, inspiré de la vie du réalisateur, nous montre le jeu sensible et réaliste des deux actrices principales du film, bien supérieur à celui des acteurs.
Réalisateur : Mahesh Bhatt
Héroïnes : Smita Patil, Shabana Azmi (Filmfare de meilleure actrice)
Héros : Kulbhushan Kharbanda, Raj Kiran
Compositeurs : Chitra et Jagjit Singh (couple)
Chanteurs : Chitra et Jagjit Singh
Notre avis : 3,5/5
Fire (1996). Homosexualité
Dans une famille élargie de la classe moyenne, deux frères se sont mariés sans amour. L'un a gardé sa dernière petite amie et délaisse son épouse, l'autre a fait vœu d'abstinence pour obéir au swami qui lui dicte sa vie.
Les deux femmes délaissées, qui s'occupent des tâches ménagères et de leur belle-mère handicapée, ne voyant aucun espoir, finissent par tomber secrètement amoureuse l'une de l'autre. Mais rien ne peut rester caché dans cet univers clos.
A sa sortie, le film a déclenché des manifestations hostiles des partis nationalistes, à tel point que sa projection a été momentanément interdite car le gouvernement estimait qu'elle troublait l'ordre public et risquait de nuire à la tradition du pays... (qui va faire la cuisine ?). La performance des 2 actrices est tout en délicatesse
Réalisatrice : Deepa Mehta
Héroïnes : Shabana Azmi, Nandita Das
Héros : Kulbushan Kharbanda, Javed Jaffrey
Compositeur : A.R.Rahman, Merlyn D'Souza
Notre avis : 4,5/5
Morning Raga (2005). Fusion
Trois personnes qui ne se connaissent pas, mais qui ont connu un drame dans leur vie, se rencontrent et s'unissent par amour de la musique ; ils finissent par retrouver le plaisir de vivre qu'ils avaient perdu.
Ce film d'un réalisateur telougou, qui fait à la fois honneur à la musique carnatique et aux rythmes contemporains étudie avec sensibilité le profil et les réactions de chaque personnage.
Réalisateur : Mahesh Dattani
Héroïnes : Shabana Azmi, Perizaad Zorabian
Héros : Prakash Kovelamudi
Compositeurs : Mani Sharma, Amit Heri
Chanteurs : Bombay Jayashree, Kalyani Menon, Ranjani Ramakrishnan, Ramnath
Notre avis : 3,5/5
Et aussi...
Films parallèles : Nishant (Shyam Benegal, 1975), Junoon (Shyam Benegal, 1979), Masoom (Shekhar Kapur, 1983), Mandi (Shyam Benegal, 1983), Godmother (Vinay Shukla, 1999)...
Films commerciaux : Makdee (Vishal Bhardwaj, 2002), Tehzeeb (2003), Honeymoon Travels Pvt. Ltd. (Reema Kagti, 2007), Dus Kahaniyaan (parmi les dix histoires, celle du plat de riz, Sanjay Gupta, 2007)...