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L'ère des boites vocales

Publié le 02 février 2008 par Abfaboune

En promo sur le plateau du Grand Journal de Canal +, Benjamin Biolay, à propos de la crise dans l'industrie musicale évoquée par Michel Denisot, n'a pas parlé des vilains internautes qui téléchargent illégalement la musique, et notamment la sienne. Il a parlé de "l'ère des boites vocales", celle des producteurs qui ne répondent pas au téléphone.
Si un artiste confirmé comme lui, auteur d'albums salués par le public comme les critiques, compositeur talentueux d'autres interprètes, parle ainsi, on imagine la peine que peuvent avoir les jeunes artistes, inconnus, pour décrocher un rendez-vous, faire écouter leurs maquettes, pour enregistrer un disque*. Pas étonnant qu'on les retrouve sur myspace music pour se faire connaître.
Même si le marché du disque est en mutation, que l'industrie n'a pas su prendre le virage du contenu immatériel, elle a bon dos de dire que c'est uniquement à cause du p2p, et pas de ses cadres qui ne croient qu'en la Star Ac' et autres Nouvelle Star pour lancer de nouveaux "artistes".
Dans un marché en chute de 17,4 %, qui ne voit son rebond que dans l'application grandissante de lois antipiratage, avec les dites "ripostes graduées" proposées dans un rapport récent, personne ne vient s'interroger par exemple sur les prix : un album acheté tout à fait légalement sur Internet est parfois plus cher que les CD bradés que l'on trouve souvent dans les Fnac et consorts.
Supprimer les DRM, et permettre aux fichiers de passer d'un ordi à un autre, vont dans le bon sens. Il conviendrait aussi de se mettre d'accord sur le format, entre autres choses.
Mais surtout, il serait salutaire que les maisons de disques, par exemple EMI, s'interrogent sur le fait que leurs artistes phares, Radiohead, Robbie Williams, The Rolling Stones et Cold Play notamment claquent la porte, partent à la concurrence ou refusent simplement de livrer leur nouvel album, parce que le fonds de pension qui est propriétaire d'EMI exige le licenciement d'un tiers des effectifs, et aussi parce qu'ils ne sont pas d'accord avec la nouvelle politique de ses dirigeants (le nouveau boss serait un "tyran" selon Robbie, un gros con quoi).
Le simple fait que la tournée des Rolling Stones rapporte beaucoup plus d'argent que la vente de leurs albums devrait faire tilt dans la tête des producteurs : dans l'ère numérique, ce sont notamment les artistes qui déchirent sur scène que l'on va voir, même si on les a téléchargés illégalement. Et si le disque n'était plus qu'un outil de promotion ?
* cette analyse me semble valable pour l'industrie du cinéma, de la télévision, de l'édition, comme s'il y avait une inhibition ambiante, chaque personne en place craignant pour sa place, avec une marge de manœuvre de plus en plus réduite. Pas d'innovations, pas de nouveautés, continuons à faire ce qui marche, pas de prise de risque, pas de prise au téléphone.

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