Après les préliminaires sur les outils, voici en scoop les
premières photos de la vigneronne à l'œuvre avec son sécateur, se sont soldés par des échecs - soit on ne voit que la manche de ma veste, soit je réussi à couper la bandelette de ma
caméra, soit carrément le fil de fer le plus proche...
Mais l'autre jour j'ai finalement réussi à attirer Klaus, qui s'occupe à faire du balivage dans nos bois de chêne vert, à venir avec moi donner la preuve, que je ne fais
pas que parler de cette opération essentielle pour la récolte prochaine.
Le beau temps, avec un soleil généreux et un ciel bleu clair, était au rendez-vous, comme vous voyez.
Ma position n'est pas vraiment professionnelle sur ces photos, mais plus dictée par le photographe et la lumière. Pour ne pas se casser le dos, il est préférable de toujours travailler face à la pente, donc à Lisson, le dos au soleil:-)
J'ai fais mes débuts dans la taille il y a 25 ans en arrière, dans une très vieille vigne plantées dans les années 1920 par le père du vieux Monsieur, qui nous avait confié ce petit hectare en fermage. C'étaient nos premiers essais en viticulture pratique et vinification, bien avant la plantation des vignes de Lisson.
Des souches vénérables, qui m'arrivaient presque à la taille, vieux Carignans, Grenaches noirs et blancs, Alicante Bouchets avec leur jus teinturier, quelques Aramons généreux et ici et là des Muscats d'Hambourg pour la bouche et même des Chasselats, tous formés en gobelet, qui m'apprenaient vite, que chaque pied demande une autre approche, pour s'adapter à son personnage.
Les premiers jours, le propriétaire m'accompagnait, pour me donner des explication, mais vite, il me laissait continuer et ma seule compagnie restaient les merles, qui fréquentaient le grand lierre avec ses baies mures et du temps en temps le Gros Marcel, un vieux chasseur du village, qui rangeait son fusil, vu que j'étais là au milieu et le changeait contre une petite pioche, pour déterrer les magnifiques poireaux de vigne, qui se remettaient vit à pousser dans ce terroir proche de la rivière, que nous ne désherbions plus chimiquement.
La surprise pour moi était le passage sur les petites terrasses plus haut, qui étaient plantées exclusivement en Œillade, variété de Cinsault et cépage prolifique en gourmands de toute sorte, donc bourgeons, qui repoussent sans cesse partout sur le vieux bois des troncs et qui augmentent considérablement les coups de ciseaux à donner à chaque taille, si on veut les tenir propre. Cela ralenti la cadence!
Mais ce sont des vieux souvenirs entre temps, la vigne du Cabanis était arrachée contre une prime pendant la première vague d'arrachages, qui visait à diminuer les surfaces plantées dans le Midi dans les années 1980 - et qui, comme dans notre exemple, touchait malheureusement aussi beaucoup de vieilles vignes peu productrices sur les coteaux de l'arrière pays, qui n'étaient pas les plus responsables de la crise de la surproduction de cette époque....
Mais retournons au présent: Comme déjà expliqué ici, nos vignes sont pour la plupart formées en gobelets, à trois bras avec un courson, taillé à un œil franc, donc en prévision de 6 sarments avec 5 à 6 raisins pour une souche.
Cela s'appelle une taille courte, qui donne des souches avec une végétation très aérée, sans entassement des feuilles, bien ouverte au milieu, pour laisser rentrer le soleil et favoriser la photosynthèse et un climat sain dans la souche. Cela évite beaucoup de traitements et vise des rendements très bas, pour une bonne maturité régulière des raisins et des jus riches en polyphénoles et anthocyanes. Selon nos cépages, ces rendements théoriques oscillent entre 15 et 20 hl/ha - avant prélèvements de sangliers, blaireaux et autres prédateurs.
Une souche de Mourvèdre, qui montre ces principes très bien. Le Mourvèdre est un cépage à port érigé, cela veut dire, que ses sarments sont assez raides, pour tenir debout tout seul, sans palissage. Cela permet de travailler entre les souches et les rangs même à des stades avancés de la végétation, pour nettoyer autour des pieds et couper l'herbe, faire des traitements nécessaires et même pour la récolte.
C'est donc à la taille, que le vigneron décide déjà du vin de
son futur millésime - en espérant que le climat va ensuite jouer son jeu.
Lisez aussi les réflexions, comme d'habitude très bien tournées, d'un collègue vigneron/blogueur en contemplation d'un tailleur au bord de sa route ici ou d'un autre du plein milieu de sa parcelle ici.
Philippe de Château Bas nous a copié encore deux autres sources anciennes sur l'opération sur son blog là et
là.