Je reviens ici tel un étranger. Pas vraiment canadien et plus totalement parisien, ville où je suis né.
A chaque retour c’est toujours le même sentiment d’une superposition de la géographie et de mes souvenirs, d’instants volés à mon enfance. A un an, la descente abrupte du Père Lachaise en landeau. La rue Erard, le marais, les halles, l’Usine à Croix de Chaveau, le théâtre Dunois, la salle de concerts rue Raymond Losserand.
Tout est là, si proche qu’aucune nostalgie, pour je ne sais quel âge perdu, n’est possible. Simplement l’intensité de cette superposition.
Sans doute ne pourrais-je plus vivre ici, je pourrais y passer, y repasser comme un touriste habitant: les sourires y sont trop rares, les ateliers inexistants, les relations trop sociales, quelque chose sans doute d’un état d’esprit qui mse semble appartenir à un autre temps, à une autre vitesse. Mais il y a toujours cette superposition des temps et des espaces, toutes ces histoires anonymes et tout à la fois singulières qui ne cessent, sur Internet ou ailleurs, de me pousser à produire, à chercher l’écho de ce silence qui nous rend sensible à ceux qu’on ne connaît pas.
Je suis à la terrasse d’un café, j’observe et je sais combien cette observation est une figure classique, un cliché, j’imagine la vie des passants, je joue à imaginer cela comme un enfant, il y a quelques regards, des complicités dont je ne peux vérifier la réciprocité mais que j’espère ici, chez moi.