Nouvel épisode des interviews de Variae, nous avons pu, après de longues négociations, poser quelques questions à la Crise économique, à l’occasion du discours de Nicolas Sarkozy à son sujet à Toulon – le deuxième du nom.
Bonjour Madame la Crise, c’est un grand moment dans la vie de blogueur que de vous interviewer … Il y a votre actualité, très riche ces dernières années, et puis il y a surtout le rendez-vous avec Nicolas Sarkozy jeudi soir à Toulon, qui va vous affronter, pas trop stressée ?
[Grand éclat de rire] Ah Sarkozy, oui, Toulon … Bon écoutez vous avez déjà vu du catch ? Eh bien là c’est pareil, c’est un beau spectacle, bien organisé, très spectaculaire, mais ne vous en faites pas, on ne va pas donner les coups pour de vrai, enfin il ne va pas me donner de coups pour de vrai. Il va enfiler son masque, « L’Ange de Neuilly », « Le Régulateur de la Finance », « Le Sauveur de l’Europe », ce genre de nom de scène pour épater la foule, mais je m’en sortirai sans une égratignure, pas d’inquiétude !
Comment cela ? Il vous a déjà victorieusement affrontée à Toulon non ? En 2008 !
Vous êtes vraiment naïf ou bien ? « Le laisser-faire c’est fini. Le marché qui a toujours raison, c’est fini. » Ben voyons. C’est sans doute pour ça qu’aujourd’hui il en est réduit à supplier les agences de notation – des structures privées, émanation du marché, qui notent les Etats – pour qu’elles ne punissent pas son pays … Qu’est-ce qu’il vous a promis encore à Toulon la première fois ? Ah oui, « Je ne conduirai pas une politique d’austérité qui aggraverait la récession. Je n’accepterai pas des hausses des impôts et des taxes qui réduiraient le pouvoir d’achat des Français ». Et vous en êtes à combien de plans d’austérité en France, depuis, 2, 3 ? Et de nouvelles taxes depuis 2007 ? Plus de cinquante, si je compte bien. Du catch je vous dis, du catch ! Je lui avais même fait passer un petit mot à l’époque : « T’en fais pas un peu trop mon Nico ? Ça va se voir, enfin j’te dis ça, j’dis rien ».
Ah parce que vous vous tutoyez tous les deux ?
Bien sûr ! Je vais vous dire : on fait un bon tandem lui et moi. Oh, au début on se méfiait l’un de l’autre, mais finalement, on a trouvé nos marques. Il me nourrit en faisant baisser votre pouvoir d’achat, en démoralisant les Français, en étant incapable de contester l’égoïsme d’Angela Merkel, en laissant la finance s’amuser et les riches s’enrichir sur votre dos. Et moi en retour, je le lave de toutes ses responsabilités et je lui donne matière à gonfler ses petits muscles, vous savez, son numéro habituel, le « Je suis le capitaine dans la tempête, vous n’allez quand même pas donner le gouvernail à un socialiste mou », et tout le reste. Tango et Cash, un peu !
Quel cynisme !
Bof. Vous feriez quoi, vous, si vous étiez à sa place, donné à 40-60 au second tour de l’élection présidentielle contre un adversaire désigné par plusieurs millions de Français ? Et dites-vous bien qu’il n’a pas fini de parler de moi : dès que François Hollande va faire une proposition, il dira « on ne peut pas, c’est la crise, il faut l’austérité » et qui d’autre pour gérer l’austérité que celui qui l’a installée, hein ? Non franchement, respect mon Nico, chapeau l’artiste.
Et vous dans tout ça ?
Moi ? Je prospère (youp-la-boum), je vais permettre de justifier les décisions les plus antidémocratiques, les plus hostiles au peuple. Une bonne purge, crise sociale, crise monétaire, crise de civilisation, crise sanitaire, crise systémique, crise, crise, crise ! [rire dément]
La Crise devenant incontrôlable, nous avons dû mettre un terme à l’interview.
Romain Pigenel
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