Homeland: 1.09 Crossfire
Naïvement, je croyais que suite aux dernières révélations, le rythme de l'enquête allait continuer à s'intensifier, que l'action serait d'autant plus au rendez-vous. Malheureusement, tout ce à quoi on a droit, ce sont des investigations qui s'embourbent dans des scandales religieux. Je trouve ça assez rageant, sachant que je voyais dans le dérapage du FBI dans la mosquée une opportunité de donner une nouvelle ampleur à l'intrigue. Elle n'est donc pas saisie et on préfère l'utiliser comme source de twists pas particulièrement fins. La ruse dont use Carrie avec les fédéraux est le moins prévisible mais l'utilisation de tensions entre agences et la carricature du FBI n'en sont pas moins faciles. Les révélations de la femme de l'imam que Carrie tente de faire parler, quant à elles, se voyaient bien venir de loin. Rapidement, on peut comprendre que le personnage a un rôle à jouer tant il y a une insistance sur elle dans des scènes où elle n'a pas d'utilité. Au milieu de ces fâcheux et grossiers contre-temps, il y a quelques points positifs tout de même. Les échanges avec l'imam conservent une certaine ambiguïté, très bien soutenue par la prestation de Danes et son partenaire. Carrie entretient toujours sinon une excellente dynamique avec Saul. Tous les deux sont brisés par leur travail mais pourtant, ne vivent que pour ça, ce qui fait qu'ils se complètent si bien. J'aime d'ailleurs particulèrement cet échange en fin d'épisode: You live for this shit - So I've been told.
Je regrette toutefois de voir Saul si en retrait dans cet épisode. Après le départ de sa femme Mira, il aurait été intéressant d'explorer davantage son chagrin. J'aurais, en fait, même volontiers troqué la partie de la cavale de Walker contre un vrai focus sur Saul. Bon au fond, j'ai compris quelle idée il y avait derrière ce qui est montré dans la "partie de chasse" en forêt du traître. C'était nécessaire pour montrer la détermination du personnage à accomplir sa mission. Mais bon sang que ça manque de finesse. Dès la rencontre avec le chasseur du coin, on comprend instantanément que Walker va lui faire la peau. Aucune surprise alors dans l'exécution brutale s'ensuivant.
Au bout du compte, c'est Brody qui m'a le moins ennuyé. Le personnage me captive toujours autant. Je redoutais tout de même de le voir perdre l'ambiguïté qui fait son charme à travers les flashbacks proposés retraçant sa période de captivité afghane. En effet, ceux-ci visent à donner des explications quant à son comportement. On y découvre le soldat, hébergé en toute hospitalité par Abu Nazir et réquisitionné pour apprendre l'anglais à son fils, Issa. Celui-ci finit par fraterniser avec Brody, qui s'attache à lui. Il meurt toutefois peu de temps après dans un bombardement américain, laissant Brody traumatisé et c'est ce qui est présenté comme le moteur de sa trahison. On peut trouver l'explication assez tirée par les cheveux et le recours à l'émotion assez facile avec l'utilisation d'un enfant. N'empêche que j'ai été convaincu malgré toute la bancalité de cette hisoire. D'abord parce que Damian Lewis est un acteur formidable qui y insuffle une intensité et un naturel évident, la scène où il dégage le corps de Issa des décombres étant même bouleversante. Puis, parce qu'on est à première vue dans une volonté de bannir le manichéisme en atténuant l'image diabolique de Nazir dans les flash-backs et en soulignant d'autre part la barbarie des Américains dans leurs attaques. La situation gagne de ce fait en réalisme.
Enfin, il faut reconnaître qu'on laisse un champ de possibilités étendu pour le personnage. On suggère, de fait, que Brody acte en faveur de Nazir de sa propre initiative et que ce dernier n'exerce aucune pression sur lui. A nouveau, à partir de là, les pistes sont multiples. Le personnage peut toujours être un agent-double, tout comme, même en étant véritablement dévoué à Nazir, finir par se rétracter de sa mission... ou encore devancer à la fois Nazir et les Etats-Unis et servir ses propres intérêts. Ce qui donne d'autant plus d'intérêt à l'imminente proposition de poste politique que les terroristes lui ordonnent d'accepter.
En conclusion, première petite déception pour Homeland. Seul le mystère autour de Brody reste convaincant par ses nuances et ses nouvelles promesses. L'épisode enchaîne sinon les rebondissements prévisibles et mous du côté de l'enquête, cassant du coup le rythme. La série peut toutefois toujours compter sur un cast exceptionnel et une incertitude latente toujours efficace.