Megaupload en sommeil

Publié le 29 novembre 2011 par Alteroueb

Au lendemain d’une nouvelle et très pertinente réflexion comme à l’accoutumée du Lider Minimo au sujet de la nécessité de filtrer les sites de streaming, une Loi HADOPI 3 en somme, la brutale impossibilité d’accès au site Mégaupoad hier vers 23 heures a enflammé la communauté, notamment sur Twitter. Le «direct download» serrait déjà impacté, filtré, interdit, inaccessible ? En fait, il n’en est rien. Mégaupload vit très bien, aux antipodes, mais un petit problème de DNS, les serveurs qui changent les noms de sites tels qu’on les connaît en adresses IP seules compréhensibles par des machines, a fichu une belle frousse aux internautes un peu partout sur la planete.

Ca faisait longtemps que je n’avais pas pondu un petit billet «geek», poussé en cette période pré apocalyptique électorale par une actualité bouillonnante. Mais finalement, le sujet est assez proche parce que HADOPI voit sa finalité se déplacer de son aspect «protection de la création» en «outil de surveillance», éminemment politique….

HADOPI a vu le jour sous la pression d’un lobby qui reste attaché à un modèle économique en vigueur au temps de l’industrie du vinyle. Les «Majors» n’ont pas vu les conséquences du virage numérique, et ne se sont pas adaptés aux nouveaux modes de distribution que permettait cette révolution. Pour rattraper la sauce et continuer de bénéficier d’une manne qui revient normalement aux artistes, on use ainsi d’un expédient pour le moins fallacieux en inventant le nouveau pirate des temps modernes. D’ailleurs, parallèlement, les mêmes ou leurs copains, expliquent les licenciements en masse des ouvriers comme un fait normal, presque banal, parce qu’ «ils n’ont pas su s’adapter aux méthodes modernes et aux nouveaux besoins de la société»… Ainsi, pour compenser leur manque de clairvoyance, les gros labels se sont vus offrir une Loi sur mesure. Par analogie, c’est comme si les ouvriers bénéficiaient d’une Loi interdisant les licenciements… 2 poids et 2 mesures !

Mais en même temps, HADOPI, autorité purement administrative, arrange bien les pouvoirs parce que cela permet d’exercer un filtrage, donc une potentielle surveillance des flux. En retournant la charge de la preuve sur le prétendu pirate, via l’installation obligatoire sur son PC d’un élément logiciel, un super «malware», c’est bien un mouchard en bonne et due forme qui effectue une bien sale besogne. Inutile de dire qu’un tel dispositif serait excessivement dangereux pour les libertés individuelles, même si elles ne tombaient pas entre de mauvaises mains.

Mais la donne à quelque peu changé, puisque la justice européenne vient de condamner le filtrage du Web. Par un arrêt du 24 novembre par la Cour Européenne de Justice (CEJ), dans une affaire opposant la SABAM (SACEM belge) à un FAI, la CEJ rappelle les droits fondamentaux de l’Union, notamment en matière de «protection des données à caractère personnel ainsi qu’à leur liberté de recevoir ou de communiquer des informations». En cette période ou les velléités de limitation des libertés est patente, cet arrêt sonne comme un rappel vigoureux à la Loi. Et pan sur les doigts.

Dans ce grand tourbillon HADOPI, le dernier épisode de la saga est quasi burlesque. L’ARJEL, l’autorité de régulation des jeux en ligne, cette nébuleuse destinée à promouvoir le racket à toute heure, qui arrose des mafias proche du pouvoir, mis en place avec la haute bienveillance des puissants de ce pays, voit ses ouailles contribuer via la publicité (pop-ups, page d’attente…) au financement de Megaupload que les mêmes tentent actuellement d’interdire… On avait bien pris l’habitude du n’importe quoi, mais là, on a incontestablement franchi un nouveau palier. Mort de rire.

Dans ce pays, à force de multiplier de telles gesticulations, on serait plutôt mort de honte.