Mais bon.. là je viens de sortir du Centre Pompidou, initialement pour aller voir la rétrospective Edvard Munch. En fait, j’ai pu aussi y découvrir la sublime exposition « Danser sa vie »
Edvard Munch (1863-1944) souvent plus considéré comme un artiste du XIXème siècle était en fait résolument « moderne », c’est la thèse que défend l’exposition que lui consacre le Centre Pompidou, à travers près de cent quarante œuvres, dont une soixantaine de peintures, cinquante photographies en tirages d’époque, une trentaine d’œuvres sur papier, des films et l’une des rares sculptures de l’artiste. Son expérience de la photographie, du cinéma, ses lectures de la presse illustrée ou encore ses travaux pour le théâtre ont en effet profondément inspiré un ensemble d’œuvres à voir évidemment.. mais plus d’un point de vue historico/culturel que d’un point de vue sensoriel..
Femme en pleurs, d’Edvard Munch (1907). Huile sur toile, 121 × 119 cm.
Malgré son importance, ce peintre me laisse, à quelques œuvres près comme « Femme en pleurs » très « Bonnardienne » et « La nuit étoilée », totalement Froide !! Un bel exemple de limite entre « intellectuel » et « sensoriel » (vous aurez deviné que le second qualificatif me sied évidemment mieux).
Cela étant dit, même la froideur d’une « non-émotion » est analysable et recèle un intérêt. Je me suis donc tout de même appesantie sur la question : la caractéristique la plus intéressante de son travail est la construction des tableaux souvent conçus autour de diagonales apportant une grande profondeur tout particulièrement dans les paysages. Mais son fort intérêt pour la photo, le cinéma et la vidéo, valorisé par l’exposition, est loin d’être unique.. D’autres artistes de son époque, comme Bonnard, Vuillard, ou bien Mucha, se passionnaient pour ces techniques. Les multiples autoportraits dans son atelier ou de la fin de sa vie, avec de faux airs de Paul Newman (il faut reconnaître qu’il était plutôt bel homme !) démontrent beaucoup d’égocentrisme.. D’ailleurs dans une interview de 1930, Munch déclarait : « Un jour lorsque je serai vieux, et n’aurai rien d’autre de mieux à faire que d’écrire mon autobiographie, alors tous mes autoportraits ressortiront au grand jour. »
Stjernenatt (Nuit étoilée) 1922-1924 Huile sur toile 120,5x100cm ©Munch-museet, Oslo, Norvège ©ADAGP
Bon d’accord.. j’y vais un peu fort mais bon je me suis quand-même copieusement ennuyée.. Jusqu’au moment où j’ai pénétré dans les salles de l’exposition attenante : « Danser sa vie, Art et danse de 1900 à nos jours« (Danse et Arts visuels aux 20e et 21e siècles).
Alors là, ce fut immédiatement la découverte d’un tout autre univers ! Du début du XXème siècle à nos jours : la libéralisation, voire même l’explosion du Corps par la Danse. Peintures, sculptures, vidéos, photos, dessins d’artistes pour des décors de pièces ou de ballets, bref la traduction du Lien et de la Fascination des artistes pour les racines du spectacle vivant..
À chaque époque, son univers. Le tout traité par thématiques : Danse et Peinture, Danse et Sculpture, Danse et Bauhaus, etc. Danser sa vie montre comment danse et arts plastiques ont interagi pour nourrir les courants majeurs et les figures qui ont écrit l’histoire de l’art moderne et contemporain. L’exposition montre l’intérêt commun de l’art et de la danse pour le corps en mouvement. Révélant cette face cachée des avant-gardes et cette source vive pour l’art contemporain, Danser sa vie fait dialoguer toutes les disciplines, des arts plastiques – jusqu’à la vidéo contemporaine – et de l’art chorégraphique.
Charlotte Rudolph : « Le Saut de Palucca », vers 1922-1923
Le titre Danser sa vie est emprunté à la danseuse Isadora Duncan, pionnière de la danse moderne : « Mon art est précisément un effort pour exprimer en gestes et en mouvements la vérité de mon être. (…) Devant le public qui venait en foule à mes représentations, je n’ai jamais hésité. Je lui ai donné les impulsions les plus secrètes de mon âme. Dès le début, je n’ai fait que danser ma vie », explique-t-elle dans son ouvrage Ma vie, publié en 1928.
Je me suis ainsi remémoré les « happenings » d’Yves Klein avec ces femmes peignants à même le sol avec leur corps, nu, trempé dans le mythique et incontournable « Bleu Klein ». En face, une chorégraphie de Jan Fabre (chorégraphe, danseur, artiste et plasticien..) avec une femme dansant nue sur une scène baignée d’eau comme s’il pleuvait : le corps luisant et brillant, sculptant chaque muscle sous la peau..
Magnifique !!!
INFORMATIONS GENERALES Le Centre Pompidou est ouvert tous les jours, sauf le mardi et le 1er mai.« Edvard Munch, l’œil moderne »
21 septembre 2011 – 23 janvier 2012
11h00 – 21h00
11h00 – 21h00
Nocturnes tous les jeudis jusqu’à 23h
Fermeture des caisses à 22h
Jan Fabre, "Quando l'uomo principale è una donna", 2004 - Filmé par Charles Picq à la Maison de la danse, Lyon, avril 2004 - Direction, scénographie et chorégraphie : Jan Fabre - Danseuse : Lisbeth Gruwez - source : DP Danser sa vie, Centre Pompidou, Paris 2011/2012
Merce Cunningham dans Changeling. Crédit : Richard Rutledge