Certains secrets devraient rester enterrés à tout jamais, se dit Murray Watson, enfoncé jusqu’aux genoux dans la boue du cimetière de Lismore, au nord de l’Écosse, en compagnie d’une femme qui avait toujours refusé de lui parler. Mais pourquoi s’est-il obstiné à chercher la vérité sur ce poète mort noyé à vingt-cinq ans et à peu près inconnu ? Peut-être parce que la vie d’un enseignant à l’Université de Glasgow manque de piment ? Pourtant il avait des relations clandestines et un peu perverses avec la jeune femme de son directeur de thèse, justement un ami d'Archie Lunan, son poète. Pourquoi a-t-il fallu qu’il s’acharne à vouloir dévoiler la vie de ce groupe d’étudiants desannées 70, tous devenus universitaires respectables et ennuyeux ? Était-ce tellement étonnant qu’ils aient été hippies et aient, c’était l’époque, goûté à toutes les substances ?
Mais la vraie recherche n’est-elle pas avant tout celle de la littérature ?
- Editions Métailié -
- Traduit de l'anglais ( Ecosse ) par Céline Schwaller -
Etrange polar qui relève bien plus de la quête que de l'enquête. S'il est prenant et se dévore de la première à la dernière page, le rythme et le ton ne sont pas ceux d'un thriller mais ceux de l'introspection et de la réflexion malgré un épilogue épique par nuit de tempête sur la petite île de Lismore. L'investigation réelle, construite sur les témoignages, débute relativement tard dans ce récit centré sur le personnage de l'universitaire et non du poète. On en apprendra bien peu sur la poésie de ce jeune hippie disparu précocement depuis des dizaines d'années. On se noit aussi dans l'alcool dans ce roman. Le parcours du docteur Murray Watson sur les traces du poète qui le fascine depuis l'université devient initiatique tant sa propre vie en est bouleversée. Des scènes urbaines et universitaires amères, les paysages et les chemins d'Ecosse chagrins, une atmosphère désenchantée plutôt que noire, relevée d'une excellente pointe d'ironie, le temps à la fois distendu et resseré, il y a du gothique dans ce roman. Rien n'est élémentaire pour ce docteur Watson, cruellement détaché du monde, ses recherches improbables comme autant d'errances.
En extraits :
" - Je veux faire connaître ses poèmes à un public plus large.
- Et vous pensez qu'une biographie est le meilleur moyen d'y parvenir ? La vie plutôt que l'oeuvre ?
- La vie et l'oeuvre.
- Pourquoi pas, après tout, la vie a détruit l'oeuvre. "
" - Parfois, il faut savoir lâcher prise, se connecter avec la nature, se souvenir de la beauté de l'existence.
Lyle froissa l'emballage du kebab pour en faire une boule qu'il jeta dans une poubelle débordant déjà de déchets.
- Car demain nous mourrons, dit la Bible.
Le papier trembla au sommet de la pile, puis tomba sur le sol. Rab se pencha, ramassa l'emballage et le bourra soigneusement dans le fût de la poubelle. Un air de satisfaction devant un travail bien accompli s'afficha sur son visage.
- Bien, vers quel lieu de débauche nous dirigeons-nous maintenant ? "
" Parfois, quand il était jeune, Murray avait eu l'impression que le malheur était tout ce qu'il avait. Il le choyait, n'osant pas le laisser partir de peur de se perdre lui-même. Murray se rappelait avoir enlevé la pointe de son compas en maths pour l'enfoncer lentement dans sa paume y creusant un stigmate fait maison. C'était stupide. De bout en bout. La vie et ce qu'on en faisait. Stupide. "
- Le billet de Keisha -
- Merci à NewsBook pour ce partenariat avec les éditions Métailié -
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