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« L’Avare » et le grand capital à la Fabrique du Vélodrome (2/3)

Publié le 28 novembre 2011 par Sheumas

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   Elles ne sont plus que trois à résister, à refuser l’avis de délocalisation que leur patron impose à l’usine. Si elles ne libèrent pas la place, elles en seront délogées par les CRS. Tant pis, les nouvelles du monde extérieur ne sont peut être pas bonnes, mais elles ne céderont ni à la détresse, ni à la morosité ! Elles ont d’emblée fait le choix du théâtre et du jeu. Obstinément, elles jouent « l’Avare » de Molière. La situation mise en place dans cette pièce est odieuse et le texte foisonne au point de les libérer de leur angoisse et de leurs tourments.

   C’est là l’une des sources du plaisir que les trois comédiennes, qui jouent tous les rôles à la fois, offrent au spectateur. Sans se décourager, les trois ouvrières qu’elles incarnent d’abord rejouent dans la fiction leur opposition au « grand capital ». Harpagon est « le patron » : il veut ne rien céder aux subalternes et tout garder pour lui, argent, réputation, plaisir. Cette situation bloquée génère le détraquement des personnages. Chez ce père abusif, chez ce tyran domestique, être amoureux, oser une conversation, organiser un repas de mariage, emprunter de l’argent, tout devient grotesque et bouffon... La mise en scène, bijou de précision parfaitement réglé dans le petit espace de la Fabrique du Vélodrome, fonctionne parfaitement. Pantomimes, petite musique de menuet, gestuelle saccadée, métronome du temps scénique, carillon des trois actes rythmés par les coups de fil. Elise et Valère sont articulés comme des personnages de boite à musique. Harpagon, bandit manchot obsédé de la calculette, Harpagon, chippendale sexagénère, Harpagon Picsou, recroquevillé et pitoyable sous la lumière jaune, Harpagon Cruella d’Enfer qui fait défiler sous son fouet les 101 dalmatiens de la condition humaine.


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