ADP est-il en haut ou en bas du classement ?
C’est un thème de discussion éphémère, d’une importance très relative mais qui anime les dîners en ville : CDG est-il le pire des aéroports européens ? Ou, tout au contraire, l’un des «meilleurs» ?
A en croire un sondage dont on ne sait rien, réalisé dans des conditions qui ne sont pas limpides, CDG serait le pire de tous : inconfortable, envahi par les vagabonds, peuplé de personnels impolis et peu enclins à rendre service aux voyageurs.
Les mêmes observateurs, à supposer qu’ils s’appuient sur des critères crédibles, ont décrété qu’Amsterdam-Schiphol était «the best of the best». Cela tout juste devant Londres Gatwick, ce qu’on a d’ailleurs beaucoup de mal à comprendre. En revanche, on est moins étonné d’apprendre que Zurich aurait l’aéroport ...le plus propre tandis que Munich 2 serait plus «relax» que les autres.
Qu’en penser ? De préférence, rien du tout, le monde merveilleux des aéroports échappant, nous le savons tous, à toute logique cartésienne. D’autant qu’ADP avance de tout autres informations, sorties d’on ne sait où : CDG serait en deuxième position sur le podium européen, tout de suite derrière Schiphol. Ce dernier ferait donc l’unanimité, si l’on ose dire, de quoi consoler le groupe Air France-KLM, le pire au Sud, le meilleur au Nord.
Reprenons la réflexion autrement, en s’efforçant tout simplement de faire preuve de bon sens. On peut alors se risquer à avancer que CDG est très largement perfectible, sans susciter pour autant la réprobation. Le sens de l’accueil, du service, y est effectivement moyen à l’image de la manière de faire française, celle de la principale destination touristique au monde mais un peu malgré elle ou sans le savoir.
Nouis sommes ici au coeur des affirmations gratuites et, bien sûr, invérifiables. Ainsi, ADP martèle que les passagers sont sa priorité absolue et précise que 4.000 passagers sont interrogés chaque mois et qu’il en résulte un taux de satisfaction de 85,8%. Si l’intime conviction fait défaut, on peut quand même noter que d’ici à 2015, ADP va investir 750 millions d’euros «pour améliorer l’information et l’accueil». C’est évidemment une bonne chose, à supposer que l’on arrive à faire le bonheur des agents d’accueil malgré eux. Ce qui est loin d’être certain.
ADP, comme beaucoup d’autres plates-formes aéroportuaires, est désormais soucieuse de rentabilité, sur base d’un statut qui n’a plus rien à voir avec celui de son lointain canal historique. En cette matière, il n’y a pas débat : les aéroports prétendent qu’ils vivent dans un environnement concurrentiel, ce qui ne peut bien entendu pas être «démontré». Il serait autrement facile de démontrer qu’ils bénéficient de confortables monopoles.
Dans cet esprit, on relève qu’un nouveau bâtiment va être construit entre les terminaux A et C de CDG et, on retient son souffle, «offrant une grande diversité de commerces et de services. Très bien ! Mais on préférerait entendre que des efforts redoublés seront consacrés à l’amélioration des flux aux contrôles de sûreté, que les autorités font l’objet d’un lobbying d’enfer pour que les personnels de police chargés des contrôles d’immigration soient plus nombreux et mieux formés.
Les problèmes, les jugements, les appréciations vont bien au-delà de l’aspect clinquant des aérogares modernes, envahies par les marques, le luxe, la volonté de susciter des envies dépensières. Ainsi, on a appris, il y a peu, que le projet de liaison ferroviaire entre Roissy et la gare de l’Est, attendue depuis de nombreuses années, est remise aux calendes grecques. «CDG Express» aurait dû être inauguré il y a bien longtemps pour mettre un terme, une fois pour toutes, au calvaire du voyage en RER, au départ de la gare du Nord.
Dès lors, peu importe l’un ou l’autre palmarès sorti de nulle part. Les voyageurs, ceux de la vraie vie, veulent plus, mais autrement. Ils sont saturés de boutiques de luxe, ils veulent, on finit par l’oublier, voyager mieux. Oui, voyager.
Pierre Sparaco - AeroMorning