Quand la France était dirigée par de grands hommes d'Etat cultivés !

 

"En 1948, lorsque j'ai atteint l'âge de participer à une élection, j'ai donné mon premier vote au sempiternel candidat socialiste à l'élection présidentielle qu'était Norman Thomas... Et donc, en mai dernier [1981], lorsque j'ai reçu une invitation personnelle à assister à l'investiture de François Mitterrand en tant que président de la France, une fois mon étonnement passé je me suis fugacement demandé si cet honneur n'était pas, peut-être, une reconnaissance de ce vote que j'avais fait trente-trois ans auparavant. Mais bien sûr que non : François Mitterrand, à l'inverse des autres chefs d'Etat de notre époque, apprécie les écrivains plus que les membres de toute autre profession (les avocats, les scientifiques et même les hommes politiques), et son invitation, adressée à moi ainsi qu'à six autres auteurs, était une simple confirmation de cet intérêt.
Il est intéressant, je pense, que parmi les "amis du président" (le petit groupe de cent vingt-cinq personnes environ qui se sont rassemblées à l'Arc de Triomphe pour la cérémonie d'investiture) il n'y ait eu aucun représentant du corps diplomatique, pas de dignitaires étrangers, et que l'apparat ait été réduit au minimum.... J'étais en compagnie de deux auteurs américains, vêtus simplement comme moi en veste et cravate : le dramaturge Arthur Miller ainsi qu'Elie Wiesel, romancier et essayiste qui a écrit sur la Shoah. Les autres, vêtus de la même façon, étaient le romancien colombien Gabriel Garcia Marquez, l'écrivain mexicain Carlos Fuentes, Julio Cortazar d'Argentine et Yachar Kemal de Turquie...
 Lors du déjeuner à l'Elysée, je me suis trouvé assis à côté de Claude Cheysson... [qui] m'a demandé ce que je pensais de cette réunion, particulièrement du fait que tous les écrivains présents et moi eussions été invités... Même dans des circonstances moins solennelles, ai-je [répondu], il est très rare que les écrivains reçoivent une telle reconnaissance, surtout aux Etats-Unis où, depuis John F. Kennedy du moins, ce genre d'honneur est ordinairement réservé aux rocks stars, aux comiques et aux champions de golf, et j'ai souligné combien il était agréable de participer à cette célébration avec un président qui était si manifestement et si passionnément amoureux de l'écrit... L'intérêt pour la culture et l'intellect n'est pas qu'une question de style chez mitterrand, cela fait intimement partie de son identité...
(William Styron, Des havanes à la Maison Blanche, pp 82 et suivantes)

  "En 1948, lorsque j'ai atteint l'âge de participer à une élection, j'ai donné mon premier vote au sempiternel candidat socialiste à l'élection présidentielle qu'était Norman Thomas... Et donc, en mai dernier [1981], lorsque j'ai reçu une invitation personnelle à assister à l'investiture de François Mitterrand en tant que président de la France, une fois mon étonnement passé je me suis fugacement demandé si cet honneur n'était pas, peut-être, une reconnaissance de ce vote que j'avais...